Publié le 27 Mar 2023 - 21:42
RAMADAN

Le cure-dent, un bâtonnet aux multiples secrets

 

En cette période de ramadan, le cure-dent est en vogue. Le petit bâtonnet a de fervents défenseurs qui en chantent les vertus. Considéré comme ‘’trompe faim’’ ou paré de vertus thérapeutiques, il est trimballé un peu partout, en ces temps de diète.

 

Faisant un tour, vers 12 h, au marché de Keur Massar, en cette fin de semaine, l’endroit grouille de monde. À l’intérieur du marché, on rencontre un jeune homme de teint noir, transportant son commerce sur son épaule. Il s’emploie dans la vente de cure-dent, ‘’sothiou’’ en wolof. Il confie qu’il en vend, pendant toute la durée du mois de ramadan et que c’est plus rentable. Pathé Fall renseigne que la vente de ‘’sothiou’’ se porte bien, même en dehors du contexte de ramadan. Car les gens aiment prendre soin de leurs dents.

Il souligne que les femmes en achètent plus, parce qu’elles veulent avoir une bonne haleine. Durant le mois béni de ramadan, les ventes explosent. C’est pourquoi certains se consacrent à l’activité pendant cette période pour se faire de l’argent. En plus de l’hygiène buccale que cela apporte, les ‘sothious’ permettent aussi de tromper l’ennui’’, soutient-il.  

Le cure-dent a été fortement recommandé aussi par le Prophète Mohamed, développe Lô Ndame, consommateur fervent de ‘’sothiou’’.  ‘’Si c’était possible, j'ordonnerais à ma communauté de se curer les dents avant chaque prière’’, s’exclame-t-il, un bout de bois au coin de la bouche.

 ‘’Le cure-dents permet de modérer l’haleine en cette période de jeûne’’, explique pour sa part Ramasalihate, entrepreneure dans le domaine artisanal, qui s’en sert comme substitut à la brosse à dents.

En pleine séance de friction, mâchant le bout de bois ou le coinçant simplement dans la bouche, le Sénégalais ne se familiarise jamais autant avec le cure-dent qu’en période de jeûne. 

D’une longueur ne dépassant pas les 15 cm, le ‘’sothiou’’ est vendu pour des sommes en apparence dérisoires qui font le bonheur des vendeurs durant le mois de ramadan. Pour nombre de consommateurs, le cure-dent naturel possède de nombreuses vertus. ‘’Il éclaircit la vue, purifie l’haleine, assainit les dents et raffermit la gencive’’, soutient Tidiane, un septuagénaire. 

‘’Des microtraumatismes de la gencive et des dents peuvent survenir, suite à une friction excessive et prolongée’’

D’après un médecin trouvé dans une pharmacie située à Keur Massar ‘’Caseba’’ et souhaitant parler sous le couvert de l'anonymat, ‘’le cure-dents renferme effectivement des avantages. Il débarrasse, entre autres, les dents de la plaque bactérienne qui est responsable des maladies parodontales’’. Le chirurgien-dentiste ne manque pas cependant d’énumérer quelques dommages pouvant découler de l’usage du cure-dents. ‘’Des microtraumatismes (agressions) de la gencive et des dents peuvent survenir, suite à une friction excessive et prolongée. Aussi, les débris laissés par le cure-dent peuvent générer des bactéries’’, explique-t-il.

‘’Pour ne pas exposer sa bouche aux conséquences néfastes du cure-dent, un curage de 10 minutes suivi d’un rinçage de la bouche à grande eau suffit amplement’’, recommande le médecin.

Ainsi, ce n’est pas se curer les dents toute la journée ! ‘’Prenez de la dentifrice et nettoyez la bouche au lieu de cracher tout le temps. Soyons des gens qui réfléchissent, utilisons les moyens modernes, cela n’a rien d’anti-islam’’, peste-t-il. 

Si certains lui prêtent des vertus aphrodisiaques, d’autres affirment qu’il est formellement ‘’interdit de se curer les dents la nuit’’.  Une prohibition respectée par le corps social sénégalais. 

Au Sénégal, comme un peu partout en Afrique, personne n’hésite à avoir recours aux plantes médicinales pour se soigner, souvent en même temps que les services de la médecine moderne. Une sorte d’ouverture et d’enracinement dans le domaine de la santé.

On trouve ainsi de nombreux produits dans la pharmacopée, chez les herboristes dans les marchés, dans la rue ou encore à la source, à savoir dans les villages de l’intérieur du Sénégal. Les plantes médicinales sont utilisées entières ou en partie (feuille, tige, racine, écorce, fruit,) dans des préparations galéniques diverses.

De ce fait, en période de jeûne, le cure-dent naturel, appelé ‘’sothiou’’, devient un accessoire prisé par les Sénégalais qui se plaisent à mâchouiller les tiges marron, en sillonnant les rues de la capitale. Le ‘’sothiou’’ est principalement tiré des racines et des tiges d’arbres locaux. Les plus célèbres étant le colatier, le ‘’nep-nep’’, le filao, l’acacia et l’arak (arbre originaire d’Arabie saoudite). Ces tiges sont utilisées par toutes les catégories de la population et détiennent des vertus thérapeutiques avérées, soutiennent les consommateurs. 

DIANA DIA (STAGIAIRE)

Section: