Une bande de faussaires attraits à la barre hier

Un réseau de présumés faussaires, spécialisés dans le trafic de visas, de titres de séjour et de documents de voyage a été attrait, hier, à la barre du Tribunal correctionnelle de Dakar. Les prévenus de nationalités différentes encourent 2 ans ferme chacun.
Association de malfaiteurs, faux en informatique, faux et usage de faux en écriture privée et dans un document administratif, délivrance indue de document administratif, escroquerie, blanchiment de capitaux et complicité de ces délits. Ce sont les chefs de prévention dont répondait le quatuor de présumés faussaires attraits, hier, à la barre de la première chambre correctionnelle du tribunal de grande instance de Dakar. Ali Monday, désigné comme le cerveau, est accusé d’avoir mis en place un réseau de trafic de visas, de titres de séjour, de documents administratifs et de documents de voyage. Ce ressortissant nigérian est accusé d’avoir agi avec son compatriote Nwoye Chibueze Mark, le Mauricien Ngounou Frank Kontchou et le Ghanéen Mensah Alexander Navrose.
Ils ont été arrêtés, à la suite d’une dénonciation faite, le 18 septembre 2018, auprès des éléments de la cybercriminalité. Mais ce n’est qu’après plusieurs mois, plus précisément le 8 septembre, que les policiers ont appréhendé Ali au bar-restaurant dénommé ‘’Chez Puno’’, sis à Nord Foire. Après fouille, les policiers ont découvert sur lui une carte d’identité sénégalaise établie au nom de Moustapha Diop. Une clé Usb portant des relevés de comptes vierges dans les banques Boa, Zenith bank, Banque Sahélo Sahélienne et Banque Atlantique. Des documents portant les sceaux des administrations sénégalaises et gambiennes ont aussi été retrouvés par devers le suspect.
Lors de la perquisition de son appartement à Grand-Yoff, les policiers y ont retrouvé Frank et Mark qui détenaient, chacun, deux passeports différents. Le quatrième prévenu, Alexander, a été pris dans le second appartement d’Ali niché aux Hlm Grand Médine. Les enquêteurs révèlent y avoir découvert de faux certificats de mise en circulation vierge, un casier judiciaire sénégalais établi au nom d’Ali Monday et des reçus de transactions financières vers la Gambie, le Nigéria et le Ghana.
Interrogé, Mark avait déclaré qu’Ali devait l’aider à émigrer. Frank soutenait pour sa part qu’il était venu en vacances au Sénégal. Mais lorsqu’il a été confronté aux deux passeports mauriciens et camerounais établis à son nom, il a allégué qu’il était en transit au Sénégal. Il devait rejoindre l’Espagne et que sa mère est camerounaise. Alexander a lui aussi allégué être hébergé par Ali, en attendant son départ pour l’Ukraine. Interpellé sur les passeports (ghanéen, ivoirien et mauricien) et les 7 visas Schengen trouvés sur son téléphone, il a laissé entendre que ces documents de voyage appartiennent à des tiers dont son épouse et ses deux enfants.
Lorsqu’il a été interrogé, Ali avait avoué s’activer dans la confection de faux documents, notamment de passeports, de registres de commerce, relevés bancaires qu’il délivrait à différents candidats à l’émigration issus de différentes nationalités. Dans la même veine, il avait disculpé ses co-prévenus, en soutenant qu’il n’avait aucun rapport professionnel avec eux et que ses véritables associés sont établis dans d’autres pays, la Gambie, le Mali, le Burkina, la Chine, la Thailand, la France…
Dénégations à la barre
Face aux juges hier, Alexander, Mark et Frank ont maintenu leurs dénégations. Informaticien en maintenance de formation, ce dernier a confié qu’il faisait de la brocante au Cameroun et était venu au Sénégal pour ses activités commerciales. Parce qu'on lui a dit que le port est plus facile ici qu'au Cameroun. Se disant commençant, Mark soutient avoir été arrêté six jours seulement après son arrivée au Sénégal. A l’image de ses co-prévenus, Ali a contesté les faits, revenant sur ses aveux faits à l’enquête et à l’instruction. Le commerçant a soutenu que les agents n’ont retrouvé sur lui qu’un portefeuille et une carte d'identité au nom de Moustapha Diop. Mais elle ne comportait pas sa photo.
‘’La carte n'est pas à moi, mais, à Moustapha qui a voyagé en Indonésie’’, s’est-il défendu. Dans la même logique, il a contesté avoir reconnu qu’il s’activait dans la délivrance de faux documents. Lorsque le juge lui a demandé quel visa devait-il faire pour Moustapha Diop, il a déclaré que c'est ce dernier qui est allé déposer son passeport et qu’il ne lui a acheté qu'un billet d'avion. Or, devant le juge d'instruction, il soutenait qu'il devait la lui renouveler.
Si à l’enquête, il confessait avoir confectionné plusieurs visas pour des Gambiens et d’autres clients, il l’a nié à la barre. Ces variations dans ses différentes dépositions font que le substitut Pape Ismaël Diop estime qu’Ali est de mauvaise foi, parce qu'il n'est pas en mesure de justifier des activités, ainsi que Marc. Pour lui, les délits de faux sont établis, de même que le blanchiment de capitaux, puisque les mouvements de fonds ont été retracés. Ainsi, il a requis 2 ans ferme le concernant et 2 ans dont 1 an ferme contre ses co-prévenus.
Convaincu de la culpabilité de ses clients, Me Diongue a laissé entendre qu’il ne sert à rien de nier l'évidence. Néanmoins, il a sollicité une application bienveillante de la loi, compte tenu du fait que les prévenus sont des délinquants primaires.
Délibéré le 6 juin prochain.
FATOU SY