Publié le 2 Dec 2013 - 13:05
5E ANNIVERSAIRE DE L’APR

 Calculs et non-dits

 

Macky Sall a bien maintenu cette tradition d'hommes d'Etat à la fois président de la République et chef de parti politique. Comme ses prédécesseurs, il reste arrimé à sa formation et ses déclarations d'hier au King Fahd Palace de Dakar le confirment. Conséquence? Il est systématiquement rattrapé par la conjoncture domestique Le traitement des questions politiques locales prend souvent le pas sur les dossiers lourds sur lesquels il est attendu, notamment ceux économiques.

Confirmation donc d'une stratégie. Le président de la République a redit à ses alliés qu'il comptait sur eux pour conduire son mandat. Parfois, président de la République, lors de son discours, toujours chef de parti politique, il a longuement axé son discours sur les prochaines échéances électorales pour dire que s'il ne tenait qu'à lui, la coalition de mars 2012 resterait en l'état. Le chef de l'Etat reste dans l'esprit de sa gouvernance par alliances qu'il tient coûte que coûte à maintenir. A juste raison...

Pour le chef de la majorité présidentielle, les partis membres de la coalition "Benno Bokk Yaakaar" devraient rester constants dans leur démarche et maintenir la dynamique de la dernière présidentielle. Il dit grosso modo que les partis membres de la majorité présidentielle vont chercher des consensus, mais au cas où cela ne pourrait pas se faire, ils confectionneraient leurs proposer listes, mais en gardant à l'esprit l'idée que  ce sont des alliés qui vont aller à la guerre. Au cas par cas, selon les considérations locales, des alliances pourraient se nouer et rejouer le scénario des législatives passées.

Mais cela est-il seulement possible? Entre son parti qui essaie de se rendre massif avec l'arrivée dans ses rangs de barons selon une très subtile forme de transhumance, et la réalité politique dans les terroirs avec des partis alliés forts un peu partout, Macky Sall a découvert les termes de l'équation. Cette alliance était stratégique pour accéder au pouvoir ; tactique pour gouverner ; maintenant est venu le temps de la projection et… des soucis. Si Macky Sall a réitéré cet appel à l'union de sa majorité, c'est qu'il est bien conscient des faiblesses de sa formation, partagée entre bataille des chefs au plan local et déficit de structuration.

Un peu partout à travers le Sénégal, la coalition au pouvoir sera mise à mal. Dakar, la mère des batailles, pourrait faire naître un déchirement entre le PS et l'APR. A Saint-Louis, fief de Me Alioune Badara Cissé et de gros pontes du PDS, mais également de Mansour Faye, beau-frère de Macky Sall, ce sera presque comme une tragédie grecque. Que dire de la région de Kaolack, réputé être fief de l'AFP de Moustapha Niasse avec ses bastions dans la capitale régionale, les influences des politico religieux ? Que penser de Kaffrine où le socialiste Wilane tient la mairie alors que le PDS est aux manettes du Conseil régional avec Babacar Gaye à sa tête et Aliou Sow en embuscade ? Un peu partout à travers le pays, le scénario est identique. En Casamance, dans les régions de Sédhiou, Kolda et Ziguinchor, la majorité présidentielle aura fort à faire pour déboulonner des barons locaux, mais le pouvoir a ses réalités.

Quant à Thiès, il faudra une "révolution" pour empêcher Idrissa Seck de remporter la mise. C'est dans ce sens qu'il faut sans doute comprendre la colère de Macky Sall quand il a vu ses hommes de Thiès (les ministres Augustin Tine, Thierno Alassane Sall et le député Abdou Mbow) se donner en spectacle par militants interposés alors qu'ils ont le dossier le plus lourd. Tout  comme dans le département de Mbour où le secrétaire général du PS Ousmane Tanor Dieng distille peu à peu au sein de l'opinion et des électeurs l'idée que personne ne peut l'y battre.

Restent les fiefs naturels de l'APR, le vivier électoral des banlieues de Dakar, Fatick, des zones du bassin arachidier, le Fouta, le Djolof, Tambacounda et la Diaspora. Reste aussi à voir le comportent des votants à Touba… Peu de leaders émergents au plan local. Comme à l'Assemblée nationale où son parti n'a pas la majorité, les collectivités locales ne se présentent donc pas mieux. Car entre divisions, et déficit de leadership locaux, Macky Sall a compris qu'il faut limiter la casse en maintenant en l'état sa majorité.

GASTON COLY

 

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