Publié le 30 Oct 2020 - 00:33
A 72 HEURES DE LA PRESIDENTIELLE

Le RHDP, confiant, dévoile sa stratégie

 

Profitant de l’accalmie de ces derniers jours, le RHDP affine sa stratégie qui a pour seul but de remporter le scrutin de samedi prochain. En marge d’un moment d’échange avec la presse, le parti présidentiel demande à l’opposition de cesser sa désobéissance civile et de se concentrer sur le scrutin.

 

En dehors de la ville de Daoukro où les manifestations persistent, ce sont les caravanes favorables à Alassane Ouattara qui animent Abidjan. Ces dernières 48 heures, le pays n’a presque pas connu de manifestation.  Pendant ce temps, le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) multiplie les meetings politiques. Le candidat Alassane Ouattara et son équipe sont convaincus d’une victoire au soir du 31 octobre 2020. Une assurance qui découle, selon le parti, d’un travail de longue haleine depuis plus d’un an.

‘’Nous avons organisé durant un an des séminaires de mise à niveau, parce que le RHDP comprend des formations de cultures politiques différentes. Il fallait donc harmoniser les approches’’, explique le ministre Mamadou Sanogo, le directeur régional de campagne. Cet exercice a également permis de mettre à niveau les militants des bases des différentes formations politiques. ‘’Nous avons pour cela édité 50 000 manuels et, en même temps, il fallait être présents stratégiquement dans toutes les 549 commissions électorales locales’’, poursuit-il.

Cette année, ce sont au total 736 828 nouveaux majeurs qui sont aptes à voter. Et la majeure partie de ces derniers sont ‘’proches’’ du RHDP, à en croire Mamadou Sanogo. Qui poursuit : ‘’Nous nous sommes donné les moyens. Nous nous sommes dit que le budget doit être investi pour amener le maximum de sympathisants, donc, dans l’enrôlement. Nous sommes allés vers ces nouveaux majeurs. Les poches au niveau géographique où les gens ont le plus retiré les cartes sont dans les bastions naturels du RHDP.’’

Par ailleurs, une campagne de sensibilisation aura permis le retour de 536 000 transhumants.

 Actuellement, le taux de retrait de la carte d’électeur est source de polémique. L’opposition soutient qu’il est impossible que 41 % des électeurs aient pu retirer leur carte en considérant les récents événements liés à la désobéissance civile. Un point de vue totalement réfuté par le gouvernement. ‘’L’opposition est libre de dire ce qu’elle veut. Je ne vais pas me lancer dans des invectives. Ce taux de 41 % démontre qu’il y a de l’intérêt pour le scrutin. C’est déjà un message.

Ils se sont empressés de dire que leur mouvement est suivi, vu le taux de 41 %, parce que des personnes de manière artificielle viennent brûler des bus et autres transports en commun. Normalement, cette terreur entretenue devait décourager les Ivoiriens. L’opposition évite de dire que malgré toute cette campagne de déstabilisation, malgré toutes ses attaques, il y a 41 % d’électeurs qui sont allés retirer la carte. Ces citoyens se sont dit, malgré tout ce qui est créé de façon artificielle : nous allons retirer notre carte d’électeur. Et ces personnes qui sont allées récupérer leur carte ont vu cette ambiance, mais elles ont quand même effectué le déplacement. Si, par extraordinaire, on devait s’en tenir à ce taux minimum, déjà personne ne pourra dire que l’élection n’est pas crédible, mais nous irons plus loin que cela’’, déclare M. Sanogo.

‘’La carte n’est qu’un support d’invitation’’

Au regard du Code électoral ivoirien, la carte d’électeur n’est pas indispensable pour le vote. Un pan de la loi qui démonte, selon le parti d’Alassane Ouattara, les arguments de l’opposition. Et le ministre d’affirmer : ‘’La carte n’est qu’un support d’invitation et de facilitation pour retrouver son lieu et son bureau de vote. La carte d’électeur n’est pas imposée comme une condition sine qua non pour participer au vote. Au pire des cas, elle est importante pour les nouveaux majeurs et on est sûr qu’ils ont retiré leur carte d’électeur. Les autres Ivoiriens connaissent leur loi et savent qu’ils peuvent aller voter sans leur carte d’électeur. A travers leur téléphone, ils peuvent avoir toutes les infos quant à leur lieu de vote, surtout que le taux de digitalisation est très avancé dans le pays. Les gens ne font plus de la carte d’électeur une fixation.’’

L’homme politique indique par ailleurs que les localités en proie à des violences ne réunissent pas 7 % des électeurs à l’échelle nationale. Je demande aux Ivoiriens, insiste-t-il, de prendre le poids statistique de ces localités ; combien votent dans ces villes ? Les gens, dans ce pays, aiment grossir les faits. C’est vraiment dommage. Le RHDP reproche à ses adversaires d’attiser la haine en lieu et place de proposer des programmes.

Pendant que la formation politique est fin prête pour le 31 octobre, le porte-parole de la Plateforme de l’opposition, hier encore, a affirmé sur RFI qu’il n’y aura pas d’élection samedi prochain. ‘’Nous ne boycottons pas l’élection, mais nous dénonçons les conditions d’organisation de cette élection’’, a-t-il déclaré.

‘’Nous sommes sûrs de remporter la victoire’’

Toutefois, pour le ministre Mamadou Sanogo, rien ne pourrait empêcher le scrutin qui, d’après les calculs et rapports de meeting, donne la victoire au RHDP. ‘’Nous pouvons affirmer, au regard de notre travail et des éléments que nous avons conjugués pour arriver à ce résultat, que nous allons remporter l’élection. On a tellement travaillé que nous sommes sûrs de remporter la victoire. On n’a rien à cacher, c’est un jeu et nous sommes l’équipe qui s’est le mieux préparée. L’opposition devait travailler deux ou trois fois plus que nous. Vous êtes des challengers, mais je ne vois pas ce que vous faites’’, soutient le directeur national de campagne.

Le RHDP a formé plus de 80 000 superviseurs prêts à être déployés dans les 22 000 bureaux de vote. Ils seront également présents dans les 56 bureaux à l’extérieur du pays. A en croire le ministre, ces derniers maitrisent parfaitement un outil digital développé par le parti en 2010. La plateforme est cette année sous une version avancée.

‘’Nos superviseurs auront la data sur leur téléphone, grâce à l’application. Le RHDP s’est doté d’une plateforme très avancée, de dernière génération, qui nous permet de mailler le territoire. Il n’y a pas un seul hameau ou un endroit perdu qui n’a pas de bureau de vote. Ces personnes déployées nous enverront un PV sur le serveur central pendant la nuit électorale. Chaque opérateur va suivre une région ou une commune. Il n’y a rien à cacher, nous pourrons avoir, heure par heure, le nombre de votants’’, détaille le porte-parole du jour.

En outre, les militants recevront régulièrement des messages automatiques dans les différents lieux de vote avec en signature ‘’Allez remobiliser’’. ‘’Que nos adversaires en fassent de même ; ils peuvent copier notre stratégie’’, lance-t-il ironique.

Ce dispositif aurait permis au parti de suivre de près le scrutin d’octobre 2010. ‘’C’est le même dispositif mis en place. Qu’on ne vienne pas dire qu’il a gagné, parce qu’il est au pouvoir. On se donne les moyens de réussir et nous nous sommes bien préparés’’, ajoute-t-il.

Le parrainage de la discorde

L’autre point source de conflit est le parrainage. En lieu et place d’un passage à l’Assemblée nationale, cette mesure insérée dans le processus électoral a été actée par une ordonnance du chef de l’Etat. Chose que fustigent les opposants.  ‘’L’opposition était présente, lors de multiples réunions organisées par le Premier ministre. On ne peut pas dire aujourd’hui qu’on ignorait les règles du jeu. Nous, on a anticipé, en préparant la Présidentielle par une organisation décentralisée. Et ce système dit très clairement qu’en cas de doublons, seuls les parrains du premier venu en termes de dépôt de candidature sont valides’’, rétorque Mamadou Sanogo. Le RHDP compte à ce jour 423 000 fiches de parrainages digitalisées.

Confiant et serein, le président Alassane Ouattara entend modifier la Constitution une fois réélu, afin d’empêcher les hommes politiques âgés de 70 ans de prendre part à la Présidentielle. Il promet de ne point se présenter en 2025, parce que son choix actuel relève d’un ‘’sacrifice’’ pour la nation.

A l’en croire, Laurent Gbagbo pourrait regagner son pays, après le scrutin, et cela ‘’dans les conditions meilleures’’.

Les religieux, les Nations Unies et la Cour pénale internationale multiplient les appels au calme et au dialogue. Cette option semble peu probable, vu la position catégorique des opposants qui réclament le départ du président sortant. L’activiste Kémi Séba, présentement à Abidjan, s’est également impliqué dans le combat contre le troisième mandat. Le Franco-Ivoirien Tidiane Thiam a lui aussi choisi de soutenir l’opposition.

ECHOS DE CAMPAGNE

Mamadou Touré, Directeur central de campagne du RHDP

‘’Globalement, le processus électoral marche bien. L’élection aura bel et bien lieu le 31 octobre. Le président sera élu avec un score sans appel. L’opposition est pyromane. Ce n’est pas le RHDP qui a brûlé les bus, qui ferme les routes par des troncs d’arbres. Ils ne sont pas démocrates, car ils empêchent les autres de s’exprimer. Toutefois, la Côte d’Ivoire ira voter le 31 octobre dans la paix. Le gouvernement mettra tout en œuvre pour sécuriser les populations et le scrutin.’’

Adjoumani Kobenan, porte-parole principal du RHDP

‘’L’opposition avait assuré aller à ces élections, mais il a fallu que Soro Guillaume l’instrumentalise en leur disant qu’il fera un coup d’Etat. Aujourd’hui, tout le monde est situé sur les vraies intentions de cette opposition radicale qui rêve du pouvoir sans passer par les élections. Notre pays est à un tournant décisif de son histoire. Les Ivoiriens doivent faire un choix déterminant pour leur avenir, choisir un développement solidaire.’’

Kouadio Konan Bertin, candidat indépendant

‘’C’est par amour pour le peuple que j’ai décidé de me présenter à la Présidentielle. Cela fait 30 ans que j’apprends auprès du PDCI et maintenant, je veux servir tous mes parents. Il est urgent de soutenir aujourd’hui nos petits entrepreneurs qui seront demain nos grands champions nationaux. Il y va de notre indépendance nationale.’’

EMMANUELLA MARAME FAYE (ENVOYEE SPECIALE A ABIDJAN)

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