Publié le 7 Jun 2020 - 00:06
ABDOULAYE BAR DIOUF (AGENT DE JOUEURS EN ITALIE)

‘’Il y a trop de trahison et de coups bas dans le football sénégalais’’

 

Le football, comme tous les autres secteurs de la vie, est fortement touché par la crise sanitaire liée à la Covid-19. Dans un entretien avec ‘’EnQuête’’, Abdoulaye Bar Diouf, agent de joueurs établi à Brescia, en Italie, fait le diagnostic de la situation du ballon rond dans le monde et au Sénégal. Il est également revenu sur les maux qui gangrènent le football sénégalais et les leçons à tirer de la pandémie pour un meilleur devenir de la discipline.

 
 
Le ballon ne roule presque plus comme il le faut sur les pelouses, sur la quasi-totalité de la planète, depuis bientôt trois mois. N’est-ce pas une situation difficile pour les amateurs et acteurs du ballon rond ?
 
On avait l’habitude de voir des arrêts avec les vacances. Mais avec un tel arrêt, brutal, c’était difficile pour tous ceux qui gravitent autour du football. On avait en face de nous un ennemi qui faisait peur. A un moment donné, il y a eu une psychose dans le monde entier. Face à cette pandémie, on pensait à la mort. C’est une maladie qui, quand elle nous atteint, peut se propager dans notre famille et mettre en danger nos proches. Le monde n’a pas encore trouvé des solutions fiables contre le virus. C’est ce qui faisait que même si c’était difficile de vivre sans le football, les gens avaient quelque part oublié le ballon rond. Les acteurs, tous ceux qui s’activent autour, étaient solidaires de la lutte contre le coronavirus. Ils étaient tous mobilisés derrière les médecins. Le football manquait sur le terrain, mais on le vivait autrement avec plaisir, grâce aux gestes de solidarité des fondations des clubs, de grands footballeurs du monde, Chiellini, Bonucci, etc., qui applaudissaient le corps médical. Le monde entier avait une préoccupation autre que le football même si des solutions sont en train d’être recherchées pour que les activités reprennent. 
 
Dans les différents pays, les dirigeants du football sont en train de voir comment reprendre les compétitions. L’Allemagne a relancé son championnat depuis le 16 mai. Comment appréciez-vous cette reprise de la Bundesliga, en cette période de pandémie de coronavirus ?
 
Le football, c’est aussi un public. Ils ont repris, mais timidement dans des conditions exigées par la lutte contre cette pandémie. Ils ont joué, mais ce n’est pas le football, à vrai dire. Le football va avec l’ambiance, le contact des acteurs, les accolades après les buts. Le foot est collectif et la manière dont les joueurs célèbrent les buts dans le championnat allemand est trop individuelle. On n’a pas ce goût footballistique qu’on sentait d’ordinaire. Ils vont peut-être terminer, seulement, il y aura un impact sur le côté financier. Avec cette situation, le football va un peu perdre sa valeur. Et un peu partout, s’ils reprennent, ce sera la même chose. La priorité des fédérations est de terminer la saison, mais la saveur du football manquera, parce qu’il n’y aura pas de spectacle. 
 
La saison 2019-2020 en France est définitivement arrêtée et les championnats de Ligue 1 et Ligue 2 ne reprendront pas avant septembre, conformément à l’annonce du Premier ministre français. Pensez-vous comme certains que cette décision était hâtive ?
 
La décision d’arrêter le championnat français était hâtive, pour moi. En France, il y a une fédération et tous ceux qui gravitent autour du football. L’Etat, a peut-être pris une décision avec le ministre de la Santé et celui des Sports, mais il devait être patient et attendre, comme c’est le cas pour certains pays d’Europe, qui ont cherché à établir un protocole. C’était la meilleure solution. Mais en France, c’est comme si c’est le gouvernement qui décide de tout. Il devrait y avoir une concertation plus approfondie pour voir comment ce championnat pouvait arriver à son terme. Ils étaient partis pour une belle saison en France. Avec la décision de l’Uefa de faire passer les clubs des pays qui ont arrêté leurs championnats par les barrages, c’est la confusion totale pour le football français. Un club comme le PSG, qui fait de belles choses en Europe, sera pénalisé.
 
Il y aura une subvention, certes, de la part de l’Etat, mais elle ne permettra pas aux clubs d’assurer leur performance l’année prochaine en Europe. Les choses ont été faites de manière précipitée. Ce sera compliqué pour les clubs, parce qu’il y avait des abonnés annuels qui devront être remboursés. L’Etat français a peut-être proposé quelque chose à la Ligue professionnelle et à la Fédération française de football pour pouvoir régler certains déficits, parce qu’il y a les droits télé qu’on ne doit pas oublier.
 
Est-ce qu’ils seront payés avec cet arrêt du championnat ? S’il y a un prêt, comment le joueur sera payé ? C’est tout un problème quand un joueur a été engagé pour une année et qui joue peu de matches. Comment les clubs vont négocier ce prêt ? Il y a tant de choses à discuter avant de prendre une telle décision. C’est vrai que la Fifa a laissé aux gouvernements, qui sont souvent hors du football, la priorité avec leurs ministères de la Santé, de décider compte tenu de l’évolution de la pandémie dans leurs pays respectifs. Je vois qu’en France, les choses sont trop politiques. Ils n’ont pas laissé le temps aux dirigeants du football de réfléchir et trouver des solutions comme en Allemagne et ailleurs. 
 
Il y aura une redistribution des cartes dans le football. Certains clubs riches vont tomber et d’autres vont émerger.
 
Qu’en est-il en Italie ?
 
En Italie, la FIGC (Fédération italienne de football, NDLR), la Serie A, le ministre de la Santé, celui des Sports, Vicenzo Spadafora, le comité scientifique, se sont concertés et ont tout planifié pour que les choses puissent reprendre. Il y a également l’Association des médecins du sport dirigée par Enrico Castellacci, qui a eu aussi son point de vue sur le sujet. Damiano Tommasi, le président du Syndicat des footballeurs, demande 4 semaines de préparation avant le retour dans les stades. Le 28 mai 2020, le gouvernement a décidé la date de la reprise des compétitions le 13 juin prochain (Coupe d’Italie, NDLR), d’après son ministre des Sports. On peut désormais envisager la reprise de la Serie A le 20 juin prochain, si le nombre de cas infectés n’augmente pas de manière exponentielle. 
 
Même si les compétitions reprennent, le football ne risque-t-il pas de perdre son âme, quand on sait que le public, qui est un acteur majeur du spectacle, risque de mettre encore du temps avant de retrouver les gradins ? 
 
Il ne reste pas grand-chose pour boucler la saison. Si cela se fait, ils vont tout faire pour que la reprise du prochain exercice coïncide avec la fin de la pandémie. Le football, sans public, c’est comme une voiture sans carburant. C’est la chaleur du football. Sans le public, le football perd sa saveur. La Covid-19 a mis à terre toutes les activités sur la planète. Mais le monde va s’en remettre. D’ici l’année prochaine, nous retrouverons des stades pleins, avec le public qu’on avait l’habitude de voir. Seulement, il y aura un manque à gagner pour le moment. Les gens vont s’organiser pour avoir un public réduit avec le respect des mesures barrières. 
 
Il y aura une redistribution des cartes dans le football. Certains clubs riches vont tomber et d’autres vont émerger. Il y a les Arabes qui sont à côté, les riches du monde qui sont prêts à racheter les clubs. Mais le public reviendra dans les tribunes et d’ici quelques mois, on reverra le football comme il était avant. 
 
Les finales de Coupe d’Afrique des nations que le Sénégal perd toujours, c’est à cause de nos footballeurs, parce que nombre d’entre eux ont trahi
 
La crise de la pandémie de la Covid-19 a paralysé tous les secteurs de la vie. En tant qu’agent de joueurs, comment vivez-vous ces moments difficiles ?
 
La pandémie a paralysé toute la vie. Et en tant qu’agent de joueurs, on n’avait pas la tête au football comme tout le monde, au début. Je suis en même temps consultant en immigration. Je suis dans les associations en Italie, et actuellement je suis au Sénégal. Je passais beaucoup de temps avec les Sénégalais qui vivent des situations difficiles en Italie. J’ai été surpris, parce que j’étais en vacances ici. Toutes mes activités ont été bloquées et même avec mes contacts au Sénégal, des joueurs et des clubs comme Mbour Petite Côte avec qui je travaille. Je fais partie des conseillers du président de Mbour PC.
 
On avait préparé beaucoup de choses à faire avec des agents en France et même mes collaborateurs en Italie, mais tout est bloqué. On pensait qu’à survivre, dépasser cette situation, parce que la pandémie faisait peur. Mais depuis quelque temps, on a repris contact avec des joueurs en Europe et même ici au Sénégal où les choses sont un peu plus compliquées. Je travaille sur le dossier de l’international sénégalais Henri Saivet.
 
Je suis en train de voir avec des gens comment entrer en contact avec lui. Avec la pandémie surtout, les clubs recruteurs vont plus mettre l’accent sur le talent. Il y a trois joueurs au Sénégal qui m’ont toujours intéressé. Malgré la situation, ils resteront dans le viseur des clubs européens. Il s’agit de Pape Matar Sarr de Génération Foot dont un grand d’Europe ne cesse de suivre son dossier. C’est un peu compliqué, un joueur qui appartient au FC Metz. J’en ai discuté plusieurs fois avec le président Mady Touré (président fondateur GF, NDLR). Il y a Moussa Ndiaye de Aspire. Mais le dossier est bloqué parce que les dirigeants de clubs sénégalais ont leur principe et leurs manières de faire. 
 
Il y a un autre gosse, Birame Diaw, de l’académie de football de Salif Diao (Galaxy Football Academy) qui m’intéresse. Il est déjà suivi en Europe, même si je n’ai jamais discuté avec Salif. Si ce n’était pas la pandémie, il pouvait faire l’affaire avec son profil. 
 
C’est compliqué, mais je tends la main aux dirigeants sénégalais, qu’ils nous facilitent le travail. En Europe, on continue à avoir des contacts avec certains joueurs. On est plus à l’aise avec ceux qui sont nés en Europe. Par contre, c’est toujours compliqué avec les joueurs nés au Sénégal. Il n’y pas la confiance. Moi, j’ai des réserves sur eux, même ceux qui jouent en équipe nationale. Des fois, tu fais du travail pour eux et à la fin, c’est la trahison. On est dans notre coin. On continue à bosser sans rien demander à personne. Dépenser sans rien gagner, c’est compliqué. Avec ces difficultés, on cherche toujours à donner du tonus à notre métier. Dans ces moments, il faut gérer son image pour l’avenir. C’est un passage de la vie pour tout le monde. Actuellement, je suis en contact avec peu de joueurs, mais avec mes collaborateurs en Italie, on essaye de faire quelque chose pour combler le vide. 
 
Pourquoi il y a de la méfiance en ce qui concerne les joueurs nés au Sénégal ?
 
Les joueurs qui sont nés au Sénégal, la majorité trahissent leurs dirigeants, les présidents de club qui ont tout donné pour leur formation. Quand ils sont sur le point de partir, il y a un papa ou un oncle qui se pointe pour réclamer : c’est mon fils ou mon neveu. Quand ils se rapprochent de l’équipe nationale, ils commencent à changer. Ils partent à l’étranger sans l’aval de leurs dirigeants et sans indemniser leur club formateur au Sénégal. La majorité, quand ils arrivent en Europe, tu es Sénégalais, tu travailles sur leur dossier, s’ils décrochent un contrat intéressant, ils te tournent le dos.
 
Par exemple, un joueur qui est en Italie, inconnu au Sénégal, on fait la promotion de son image en tant qu’agent ou agent intermédiaire dans l’agence qui le gère. Une fois qu’il est en équipe nationale et trouve d’autres joueurs qui ont des agents français, allemands… ils changent. Il arrive que tu les appelles et qu’ils ne répondent pas. J’ai fréquenté des joueurs nés en Europe et d’autres nés au Sénégal et qui jouent dans cette équipe nationale, cette génération et celles d’avant. Il y a une nette différence. Je connais Boucary Dramé ; il est né en France, Mbaye Niang et tant d’autres joueurs. Je sais combien ils sont plus ouverts et plus reconnaissants envers même ceux qu’ils connaissent tout simplement. Pourtant, on n’a rien fait peur eux. Boucary Dramé a fait sa formation au PSG. Il n’avait rien à attendre de moi. Je lui ai juste rendu un petit service. Depuis lors, il prend de mes nouvelles. Avec la Covid, il m’a demandé comment j’allais, si je n’ai besoin de rien. Mais avec plusieurs présidents de clubs, j’ai fait plus pour des jeunes Sénégalais footballeurs et on a perdu beaucoup d’argent.
 
J’ai apporté beaucoup de bagages au Sénégal que je ne donnais pas à mes petits frères. Je les remettais à des jeunes joueurs. Il y a de la trahison de la part des footballeurs nés au Sénégal. Heureusement, ce n’est tout le monde, mais la majorité manque de reconnaissance. Il y en a qui sont issues de bonnes familles, qui sont des gens reconnaissants. Il y a Mamadou Coulibaly d’Udinese qui est (prêté) maintenant à Trapani (Serie B italienne). Il m’a invité une fois au stade en me donnant un billet à Brescia. Il m’a montré du respect et j’étais honoré. C’est cela qu’on veut des gosses sénégalais. Il y a des joueurs que j’ai aidés, avec les collaborateurs en Italie, à avoir de bons salaires. Après, ils te tournent le dos. Ils font des actions au Sénégal pour dire qu’ils sont dans le social. Mais avant de faire des actes dans ce sens, il faut se souvenir de ceux qui t’ont aidé en Europe. Je dis que les finales de Coupe d’Afrique des nations que le Sénégal perd toujours, c’est à cause de nos footballeurs, parce que nombre d’entre eux ont trahi. Ceux qui ont investi, les dirigeants, les présidents de club, plusieurs sont en difficulté parce qu’il y a trop de trahison et de coups bas dans le football sénégalais.
 
Les centres de football au Sénégal dépendent beaucoup des revenus provenant de la vente de joueurs à l’étranger. Faudrait-il s’inquiéter pour eux, notamment les moins solides du point de vue organisationnel et financier ?
 
Les centres de formation comme Diambars, Génération Foot et Dakar Sacré-Cœur n’ont pas de problème, parce qu’ils ont déjà des partenaires. Diambars vient de signer un partenariat avec l’Olympique de Marseille. De plus, ils ont de jeunes internationaux qui sont ciblés en Europe. A Génération Foot, ils ont leurs joueurs qui doivent partir, même si la situation de la saison n’est pas l’une des meilleures. Cela va leur rapporter quelque chose. L’Olympique Lyonnais va aussi prendre des joueurs du côté de Dakar Sacré-Cœur, qui est en train de faire une belle saison. 
 
Par contre, les centres qui n’ont pas de partenaire vont souffrir de cette situation de crise sanitaire. Je m’inquiète pour des académies comme Aspire, qui pouvait se faire de l’argent avec un joueur comme Moussa Ndiaye, mais le temps presse. On n’aurait jamais pensé que Moussa n’allait pas signer avant l’arrivée de la Covid-19. Ils doivent faire vite. Mes inquiétudes vont également à l’endroit des clubs professionnels du Sénégal. Certains avaient commencé à avoir des partenaires en Europe. Mais voilà, les choses vont prendre du retard. Peut-être à la fin de la pandémie, ils vont revenir. 
 
Beaucoup de pays en Afrique ont arrêté leurs championnats. Au Sénégal, les fédéraux ont décidé de différer la reprise de la saison à novembre prochain, avec la formule des play-offs. Quelle est votre appréciation ?
 
Certaines fédérations qui ont décidé d’arrêter ont eu raison, parce qu’elles connaissent le contexte de leurs pays respectifs. Pour le cas du Sénégal que j’ai bien suivi, ce qui cloche, c’est que nos fédéraux ne se sont pas concertés avec les acteurs du football. C’est la Ligue professionnelle qui devait parler aux différents présidents de club et faire un document qu’ils vont transmettre à la fédération. Et celle-ci doit se concerter avec les autorités sanitaires, le ministre de la Santé et celui des Sports. C’est à la suite de ces échanges qu’une décision sera prise. Mais les play-down et les play-offs qui sont annoncés, c’est une manière de tuer certains clubs. Parce que dans ce cas, certaines équipes vont partir en Ligue 2, alors que la différence de points entre elles et celles qui sont en haut du classement n’est pas tellement importante. Ils doivent revoir leur manière de faire. La solution serait d’arrêter le championnat et de faire monter deux clubs de Ligue 2 dans la Ligue 1 pour avoir 16 équipes. Les autorités étatiques et la fédération, qui sera appuyée par la Fifa, doivent aider les clubs en leur attribuant des subventions. 
 
Le problème, au Sénégal, c’est que les dirigeants du football, à travers la fédération, donnent de l’argent le plus souvent aux ligues. Il y a des villes ou certaines zones dont les ligues n’ont pas accès à l’argent, parce qu’il n’y a pas de club de Ligue 1 ou de club amateur de renom. Pour moi, la distribution de l’argent à certaines ligues, c’est une manière de faire une campagne électorale pour remporter des suffrages. Une ville comme Matam, la subvention que donne la Ligue professionnelle ne doit pas être importante, parce qu’il n’y a pas de club dans le championnat professionnel.
 
C’est le cas pour certaines villes dans le pays. L’argent qui doit provenir de la Fifa doit servir aux clubs. Il faut une concertation. L’association des footballeurs, que je vois comme un syndicat, celles des entraineurs, des arbitres, des anciens footballeurs et des médecins du sport ont leur mot à dire. Mais se réveiller un jour et dire que le championnat sera poursuivi sans rien mettre de consistant sur la table… Ils ont prévu de donner 5 millions aux clubs (Ligue 1). Cela représente les frais d’un seul match pour un club de Ligue 1. 
 
Face aux énormes conséquences de la pandémie, l’avenir du foot professionnel sénégalais n'est-il pas menacé ?
 
Tout ce qui gravite autour de l’argent est menacé. Mais si ceux qui dirigent le football, je veux dire la fédération et les dirigeants des clubs, collaborent dans la vérité et prennent l’argent que la Fifa va leur octroyer pour aider les clubs, le football ne sera pas en difficulté. Même sans l’Etat, si l’argent de la Fifa est bien utilisé, il n’y aura pas de problème. Aucun club sénégalais ne peut survivre que seulement des poches de son président. C’est ça qui peut mettre en difficulté le football sénégalais. Avec ce contexte de Covid-19, ils doivent savoir que l’argent qui viendra de la Fifa servira à reconstruire le football sénégalais. Ce n’est pas une aide destinée à l’équipe nationale uniquement. L’Etat aussi doit aider les clubs, parce que ce sont des entreprises qui ont dépensé de l’argent durant la saison. Mais ils doivent établir une comptabilité claire de leurs dépenses pour que l’Etat puisse leur venir en aide. 
 
La progression de la pandémie s’accroit de jour en jour en Afrique. En plus, il y a une collusion des compétitions qui pointent à l’horizon. Pensez-vous que la Can-2021 puisse se tenir à la période indiquée (du 9 janvier au 6 février) ?
 
Déjà, ils doivent tout modifier parce qu’on devait être tout proche de la fin des éliminatoires de la Can-2021. Actuellement, on a joué peu de journées (1re et 2e journées). Il est donc impensable que la compétition se tienne au mois de janvier. Ils peuvent envisager un report peut-être. Mais le problème est qu’ils ne peuvent pas jouer au mois de juin, parce que l’Euro se jouera peut-être en 2021. En plus, au Cameroun, il y a la saison des pluies. Et si la Can ne se joue pas en 2021, ils vont jouer deux éditions d’affilée en deux ans, 2022 et 2023. La Côte d’Ivoire est en train de se préparer pour 2023. C’est impossible de jouer la Can-2021 aux dates initialement retenues et pour l’instant, ils ne peuvent pas se projeter, parce que la pandémie n’est pas encore finie. Pour l’instant, tout est flou. A la longue, la Fifa devra faire l’arbitrage. On ne peut pas jouer une coupe d’Europe en même temps qu’une coupe d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine. Les choses sont confuses. Elle doit se mettre autour d’une table avec les fédérations pour décider de ce qui se fera. 
 
Quelles sont les leçons à tirer par le monde du football de cette crise sanitaire liée au coronavirus ?
 
Cette crise sanitaire a touché tous les secteurs de la vie. Ce sont les acteurs du football qui doivent tirer les leçons de cette pandémie. En Europe, ils avaient tout mis en avant. Seul l’arrêt les a pénalisés. Mais ils se sont bien organisés. C’est plutôt les pays africains, comme le Sénégal où le football vit au jour le jour, des présidents qui sortent de l’argent de leurs poches et des joueurs sans syndicat avec des contrats qui ne le sont que de nom.
 
On doit réorganiser le football de notre pays. Le fonctionnement des clubs doit être revu, parce qu’à tout moment les choses peuvent s’arrêter. C’est le cas actuellement où les footballeurs sont payés à ne rien faire. L’Afrique est trop en retard par rapport à l’Europe qui a eu la chance de se préparer. Même si cette crise a surpris le monde entier et fait déjà des ravages, le football européen sera moins touché, parce qu’il est bien organisé. On peut parler de professionnalisme, mais le football sénégalais est encore dans l’informel. On doit apprendre de cette crise sanitaire pour mieux développer notre football.
 
LOUIS GEORGES DIATTA
 

 

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