Publié le 14 Jan 2013 - 17:03
ASSEMBLÉE GÉNÉRALE HOULEUSE

Conflit de générations et choc d'ambitions minent le M23

 

Le comité de coordination du mouvement des forces vives de la nation M23 a été installé samedi dans la douleur. A l’origine, des jeunes du mouvement se sont opposés avec hargne au projet de transformation du M23 en association, imposé par leurs aînés.

 

Cette assemblée générale du M23 aura tenu toutes ses promesses. Des générations en conflit, le choc des ambitions. Puis, la bagarre. Pendant une bonne dizaine de minutes, les gardes rapprochés, sur injonctions venues d’on ne sait où, se sont employés à expulser avec violence des jeunes devenus trop ‘’encombrants’’. La presse s’en est trouvée obstruer dans l’exercice de ses fonctions par de véritables nervis dans leur pratique.

 

Tout est parti de la volonté des aînés du M23 de transformer le mouvement en une association pour lui éviter d’être un mouvement ‘’spontané’’ sans orientations claires. Ce qui a été perçu comme un ‘’sacrilège’’ par des jeunes qui voient le mouvement comme la résultante d’un combat populaire pour l’affranchissement de la démocratie, alors embastillée. Les jeunes du M23 ont estimé que le mouvement ne souffre d’aucune incohérence et ne saurait être transformé en une quelconque association.

 

Symbolisant les aînés, Alioune Tine de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Radho), Amath Dansokho, Mamadou Mbodji, Penda Mbow entre autres, se sont vus arroser d’invectives par des jeunes qui voient en eux des ‘’opportunistes’’. Ils se seraient servis du mouvement ''pour acquérir des privilèges avec l’actuel régime'', accusent les jeunes. ‘’Je suis envoyé par mon parti Reewmi, j’ai été toujours présent même lors de la mort de Mamadou Diop. Où sont ces jeunes qui ont été emprisonnés ? Et maintenant vous êtes là en train de faire la mascarade de Macky Sall ; nous avons le droit de dire que le M23 ne sera pas politisé’’, peste Abou Diallo. Selon le président de la commission Orientations et Stratégies des jeunes du M23, Abdourahmane Sow, la convocation de cette assemblée est ‘’sélective et limitative’’. A l’en croire, le M23 est un esprit, de quoi demander un ‘’amendement’’ par rapport aux modes de convocation.

 

‘’Je serai très ravi comme à l’accoutumée de retrouver les mécaniciens, les marchands ambulants dans cette assemblée. Mais où est le reste de la population’’ ? s’interroge-t-il d'une voix ferme. Les jeunes du M23 qui se sont toujours opposés à la mutation du mouvement en une association, n’ont pas facilité la tâche aux dirigeants du mouvement qui étaient tranquillement occupés à poursuivre leurs travaux. Présents nombreux dans la salle, les jeunes ont commencé à distribuer des documents. Ce qui n’a pas plu aux gardes rapprochés des dirigeants.

 

L’un de ces derniers a commencé par arracher les documents remis à la presse et à l’assemblée. D’autres sont venus l’encourager et les jeunes ont commencé à riposter. Éclatent alors des tiraillements : ‘’Nous avons le droit de distribuer nos documents, nous sommes membre du M23’’, lancent-ils aux gardes rapprochés qui leur répliquent : ‘’Ce n’est pas notre problème, arrêtez de distribuer vos documents.’’ Il a fallu l’intervention d’Alioune Tine et d'autres pour que le calme revienne. 

 

Dans ces documents, la jeunesse du M23 a tenu à rappeler entre autres les durs moments qui ont jalonné la marche du mouvement et les conditions d’adhésion au mouvement qui est ‘’apolitique et non partisan’’. Poursuivant, les jeunes ont formulé des recommandations sur le document. Ils ont constaté pour le regretter que le traitement du pouvoir dans la démarche des audits et des dossiers à traiter est ‘’discriminatoire et sélectif’’. L’un des aînés Mamadou Mbodji, mécontent des propos tenus par les jeunes, dira : ‘’Le M23 n’est pas une organisation que nous avons créée comme ça. Quand nous avons fait l’appel, les gens sont venus en toute liberté. Il est évident que ce sont les gens qui sont venus librement qui ont signé les feuilles de présence et qui se sont engagés, ce sont eux qui sont là’’. Alioune Tine a prévenu qu’à partir de ce mouvement spontané, ils iront vers une association à but non lucratif. Le président de la Radho, de dire : ‘’Nous irons vers autre chose et nous savons que ça ne sera pas facile.’’

 

Après concertation des différentes entités qui composent le mouvement, le comité s’est retrouvé avec vingt postes attribués aux partis politiques, dix pour les personnalités indépendantes, quatorze pour la société civile, mais ceux des départements et des jeunes posent problème. Les régions de Thiès, Kaolack et Diourbel ont dit que les modes de désignation devraient se faire par le choix des plus actifs, tandis que la majorité préfère une personne par région. Néanmoins, dix postes leur ont été attribués.

 

D’autres jeunes se réclamant du M23 se sont vus attribuer huit postes. Cela s’est fait sans la commission orientation et stratégie du M23 qui a finalement boudé la salle après avoir craché sur quatre postes qui lui ont été proposés. Ces représentants envisagent de créer une autre structure dynamique populaire où les jeunes seront appelés à prendre leurs responsabilités pour désarticuler la démarche.’’ Il nous faut une nouvelle vision, une autre façon de faire’’, estime-ils. Selon eux, le M23 a résolument changé d’orientation. Même si Amath Dansokho pense le contraire en soutenant qu’ils n’ont pas encore fini le combat et a appelé à l’unité, à la force pour enfin ''stabiliser la démocratie, la laïcité et les fondements de la république au Sénégal''.

 

 

 

Aida Diène (stagiaire)

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