Publié le 11 Sep 2024 - 13:26

DÉCLARATION DE POLITIQUE GÉNÉRALE, MONSIEUR LE PRÉSIDENT ENTRE LE MARTEAU DE LA FORFAITURE ET L’ENCLUME DE LA DÉCENCE RÉPUBLICAINE.

 

À l’honorable Amadou Mame DIOP, Président de l’Assemblée Nationale, à tous Les députés et l’Administration de l’Assemblée.

« Les lois sont les rapports nécessaires qui dérivent de la nature des choses » Montesquieu

L’Assemblée nationale et le Gouvernement auront   bien tenu le marathon en deux semaines, au lieu des deux mois traditionnellement consacrés au vote du Budget de l’État. Une prouesse, si on devait évaluer les efforts et déployés par nos députés. Les sénégalais de tous bords, qui constituent le Peuple seul détenteur de la Souveraineté, assistent aujourd’hui médusés, impuissants à ce triste spectacle de « guerre institutionnelle entre le camp présidentiel et celui de l’opposition parlementaire majoritaire. Un vieux vétéran de la politique d’avant Indépendance, en proie au dépit et à la peur   nous fit cet aveu : « À voir les signes avant - coureurs, cette crise, il faudrait bien le reconnaître est de loin plus grave et dangereuse même que celle que nous avions vécue en 1962 et qui opposait le Président du Conseil d’alors Mamadou DIA et le Président de la République du Sénégal Léopold S Senghor. La différence est que cette confrontation concernait à l’époque deux camps appartenant   à un même parti. Le contexte n’était pas aussi le même du fait de l’immaturité d’une bonne partie de la classe politique aujourd’hui, ainsi que le degré de faiblesse de la conscience citoyenne, républicaine et civique.  Il faudrait ajouter   les déclarations incendiaires de ce monsieur, proche collaborateur du Président de la République, coutumier des faits. Elles ont semé le tollé et la colère. Ce dernier s’en serait pris de manière irrespectueuse à nos confréries, bafouant l’honneur de nos illustres Guides religieux. Plus grave, il n’aurait même pas épargné dans ses diatribes le défunt Roi Hassan II, « Commandeur des Croyants », descendant direct du Prophète Mohammed PSL et son fils l’actuel roi du Maroc.

Poser de tels actes à l’endroit d’un peuple frère en toute impunité, j’en suis à la fois écœuré et effrayé.  Cet homme n’est même pas conscient du danger qu’il fait encourir aux milliers de sénégalais qui sont bien accueillis dans ce pays. Le silence troublant observé jusqu’ici de la part du Président de la République suscite encore des questions. »  Il est vrai qu’à un certain moment l’inimité entre les deux camps a connu une forte montée avec le « boycott du vote de la Loi d’orientation budgétaire présentée par le Ministre des Finances lors de la Plénière, suite au refus du Premier ministre de venir faire sa déclaration de politique générale non à l’Assemblée mais devant « un jury populaire ? ». Comme justification ce dernier invoquait un Règlement Intérieur inapplicable, un « faux même » selon l’expression consacrée par des partisans et « experts autoproclamés ». Il s’y ajoute le rejet par les députés de la majorité parlementaire du projet de loi portant dissolution du Conseil Économique et Social et le Haut Conseil des Collectivités Territoriales, la sortie du Premier Ministre annonçant la dissolution prochaine de l’Assemblée nationale avant l’heure, la poursuite des dirigeants de l’ancien régime et le dépôt de la motion de censure par les députés de la Majorité. On espérait avoir une accalmie avec les projets de loi déposés du Président de la République et sa décision d’envoyer son Premier ministre à l’Assemblée Nationale pour y faire sa Déclaration de Politique Générale.

Mais il y’a eu un nouveau rebondissement avec le décret présidentiel en date du 4 septembre mettant fin aux fonctions des Présidents des deux Institutions consultatives, ainsi que le changement de la date de programmation de la Déclaration de Politique Générale, désormais arrêtée à la date du 13 septembre 2024. L’Assemblée qui avait   initialement proposé la date   du 11 septembre   avait finalement accédé à la demande du Président de la République. L’acceptation de ses nouvelles propositions par le groupe parlementaire majoritaire et, au premier chef le Président de l’Assemblée Nationale n’est nullement un signe de faiblesse. Elle participe  au contraire d’un esprit de dépassement pour un apaisement de l’espace  politique tendu et du front social assez éprouvé. Elle ne devrait être interprétée comme une soumission inspirée par la peur. Au contraire, au regard de la Constitution, du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale, de la doctrine et même de la Jurisprudence du Conseil Constitutionnel en France, la priorité du Gouvernement en matière d’examen de projet de loi n’est pas opposable à la procédure de motion de censure, (Doit Parlementaire, Pierre Avril, Gicquel). Elle est pour l’Assemblée ce qu’est le pouvoir de dissolution  pour le Président de la République. Il en est de même pour l’argument   « du respect du délai de huit jours au moins »agité par le camp présidentiel.  Comme le préavis légal du locataire notifié par son bailleur s’agissant du délai de congé, l’Assemblée est seule souveraine pour faire son choix sur la date opportune durant le délai de huit jours.  

La   lettre du Président de la République dument signée, adressée au Président de l’Assemblée nationale de rapporter la loi de règlement, de faire programmer le vote de deux projets de lois le lundi 09 Septembre et la Déclaration de Politique Générale le 13 Septembre devrait à priori avoir un écho favorable. Malheureusement, les sorties sidérantes, intempestives avec autorité dont  les sénégalais sont habitués comme les dernières du genre « Avant le 12 septembre, ces députés auront des préoccupations autres que cette DPG, avec le déclenchement des poursuites contre ces détourneurs, prévaricateurs du précédent régime » sèment le doute. Comble de coïncidence troublante, ses promesses se sont bien réalisées avec le décret présidentiel ayant mis fin aux fonctions des Présidents du CESE, du HCTT et le report de la DPG au 13 septembre. Ce rapprochement très amical, fusionnel entre le Président et son Premier ministre devenu un refrain « l’un c’est l’autre et vice versa », a été confirmé à la grande stupéfaction des sénégalais par le Chef de l’État lors de sa fameuse conférence de presse où interpellé sur la question il lança : « Plus que lorgner que le fauteuil présidentiel, je l’invite à le regarder sans sourciller. » Pour notre part, comme beaucoup nous nous inscrivons en faux contre ce tableau   fabriqué par des laudateurs, des partisans fanatiques, fascinés, subjugués, illuminés.

En vérité, chez beaucoup d’observateurs objectifs et lucides, tout sépare le Président de son premier ministre : les caractères, comportements, la conduite, le laconisme, sa courtoisie, son effacement, sa discrétion, sa pudeur, son calme, sa sérénité, son impassibilité, son esprit patricien de dépassement, sans rancune, ni haine, sa tenue et sa retenue. Sous ce rapport, force est de constater que le Président de la République se rapproche plus du Président de l’Assemblée Nationale à bien des égards. Hélas sa noblesse de cœur et d’esprit le confine à « une clause de redevabilité » envers celui qui avait fait son choix sur lui comme candidat lors des présidentielles. Ce sentiment humain  constitue hélas son talon d’Achille. Le Président devra s’affranchir de ce boulet entretenu par des partisans envoûtés tels des zombies . Le Président a été bien élu par une majorité confortable des sénégalais au premier tour et par la volonté de Dieu le Tout Puissant. Il a prêté serment  conformément à l’article 37 de la Constitution : « Devant Dieu et devant la Nation sénégalaise  , je jure de remplir fidèlement la charge de Président de la République du Sénégal, d’observer comme de faire observer scrupuleusement les dispositions de la Constitution et des lois , de consacrer toutes mes forces à défendre les institutions  constitutionnelles, l’intégrité du territoire  et l’indépendance nationale , de ne ménager aucun effort pour la réalisation  de l’unité africaine. ». Monsieur Bassirou Diomaye FAYE est bel et bien le Président de tous les sénégalais, une fonction qu’il ne saurait aliéner, hypothéquer encore moins partager. Il   ne saurait être par conséquent l’otage de qui que ce soit sous  peine de crime de Haute Trahison ! Comme le consacre la Constitution : « Le Président de la République est le Gardien de la Constitution.  

Il incarne l’Unité Nationale. Il est le garant du fonctionnement régulier des institutions, de l’indépendance nationale et de l’intégrité du territoire. À ce titre il vient de poser  un acte grave de manquement en mettant fin aux fonctions des présidents du CSE et du HCCT sans prendre aussitôt un décret pour pouvoir à la vacance de ces postes. Le Président  détermine la politique de la Nation. Il préside le Conseil des Ministres. » Il est aussi le responsable  de la Défense nationale et de l’intégrité du territoire. Il est le Chef Suprême des Armées. Et quoi d’autre ? Par conséquent , les obligations liées à ses nouvelles charges transcendent tout sentiment d’ordre affectif de tout ordre les liens fraternels biologiques, « de case », dignes des contes et légendes qui ont marqué notre enfance. Le Palais de la République ne devra être en aucun cas être transformé en salle de cinéma ou de théâtre où l’on va jouer les contes et légendes magnifiant l’amitié à outrance illustrés par  notre   poète et romancier national Birago Diop dans son œuvre L’os de Mor Lam avec ce rappel  « Plus forte que les liens fraternels, plus tyrannique que l’affection filiale, la fraternité de frères de case entraîne des règles et des devoirs que l’on ne saurait transgresser  sans déchoir aux yeux des autres . »),  et d’autres contrées comme l’amitié de Roland et Olivier  dans l’œuvre  de la    Chanson de geste de Roland ), «  les  Deux Amis du Monomotapa » de  Jean  de la Fontaine. Au contraire le tandem entre l’ancien Président Abdou DIOUF et son regretté Premier ministre, son plus qu’ami feu Habib THIAM devrait lui servir de  cas de jurisprudence constante de faire prévaloir le devoir sacerdotal et les obligations qu’impose la lourde charge présidentielle sur la parenté et l’amitié.

Il appartient au Président de le rappeler jusqu’aux plus proches dans son entourage. S’agissant de la Déclaration de Politique Générale par son Premier ministre le vendredi 13 septembre, en principe aucun   sénégalais ne devrait aujourd’hui douter de son engagement. Ce qui n’est pas le cas malheureusement chez bon nombre de compatriotes. Ces derniers n’ont eu de cesse de déplorer l’intrusion, l’empiètement et le débordement sans gêne, inconcevables et inqualifiables comme ceux de « Moussa » le personnage pique assiette du conte de Mor Lam dans son champ de compétence et d’action. Ce qui ne sera pas sans conséquences préjudiciables pour son honneur, le respect de la parole.  Monsieur le Président de la République aura tout intérêt alors à honorer son engagement constitutionnel sous serment, scellé par sa signature et son sceau. Enfin Il lui plaira  de faire sienne cette invite d’un grand penseur, Rabelais : « Fais ce que tu voudras, parce que gens libres, bien nés, bien instruits, conversant en compagnie honnête, ont par nature un instinct et un aiguillon, qui toujours les pousse à accomplir des faits vertueux et les éloigne du vice, aiguillon qu’ils nommaient honneur. »

Maître Djibril War, ancien député, 

Coordonnateur du Regroupement National

pour le Sursaut Citoyen et Républicain

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