Publié le 15 Dec 2021 - 23:37
HAUSSE DES FACTURES D’EAU A MBOUR

Les clients fulminent, Sen’Eau se défend

 

A Mbour, les abonnés de la Sen’Eau ne sont pas contents. Ils constatent, pour le déplorer, une hausse généralisée et souvent vertigineuse des factures d’eau, ces derniers mois. L’entreprise se défend et déclare ne pas recevoir de réclamations, plus que d’habitude.

 

Le passage de la Société nationale des eaux du Sénégal (SDE) à Sen’Eau n’est pas sans conséquences sur les factures des consommateurs à Mbour, si l’on en croit les réactions des clients rencontrés dans certains quartiers de la ville.

En effet, selon ces derniers, depuis que la Sen’Eau a hérité de la distribution du liquide précieux, ils ont senti une hausse plus ou moins considérable des factures d’eau. Une situation déplorée par ces abonnés qui ne savent plus à quel saint se vouer. Dans ce cadre, Lamine Mané explique que sa facture connait une hausse vertigineuse, depuis quelques mois.

Rencontré sur la route de l’hôpital, Lacoste et jean assortis de couleur bleue dominante, en cette matinée du mois de décembre, casquette bien vissée sur la tête, il déclare : ‘’Je pense que cette problématique intéresse tout chef de famille, vu les situations compliquées que nous vivons actuellement dans un contexte économique très difficile. La remarque que j’ai faite est que, depuis deux à trois mois, ma facture ne cesse de grimper. Et personne ne comprend ce qui se passe.’’

De surcroît, ajoute l’habitant de Grand-Mbour rencontré non loin de l’agence qui gère la distribution de l’eau, ‘’ce qui me fait le plus mal, c’est qu’il n’y a aucune explication qui nous est servie pour justifier cette hausse vertigineuse. Ils ont une technique qu’eux seuls maitrisent. Ça aussi, c’est un autre problème’’.

 ‘’Avant cette période, poursuit-il, je payais des factures de moins de 10 000 F CFA, au grand maximum 11 000 F. Mais maintenant, mes factures vont jusqu’à friser les 16 ou 17 000 F. Une différence de 4 à 5 000 qu’on ne justifie pas. Pour un chef de famille, c’est très difficile’’. Monsieur Mané estime qu’il est temps de déplorer cette situation qui dure depuis déjà des mois, sinon elle risque d’empirer. ‘’Presque tout le monde a fait cette remarque. J’ai des collègues qui souffrent de la même situation de hausse et personne ne peut te donner une explication convaincante. Finalement, on ne comprend plus’’, se désole-t-il.

Même constat pour cet autre client rencontré un peu plus tard dans la journée. Retrouvé dans un autre quartier de la capitale de la Petite Côte, cet usager marche sous un soleil d’une chaleur tellement ardente qu’il en oublie qu’il est au mois de décembre. Il est 14 h à Darou Salam, quartier situé au central de la ville. Les rues sont quasi vides, en cette heure de repas. Badara Ciss, dans une tenue africaine en wax, marche, plongé dans ses pensées. Tenant à la main droite un téléphone portable et une enveloppe pliée en deux à la main gauche, il laisse entendre que l’eau est devenue un sujet de préoccupation pour lui. Le quinquagénaire déclare : ‘’Je ne parle pas des longues coupures. Il y a plus grave que cela : ce sont les factures très salées que cette société nous sert. Je constate que mon compteur tourne plus vite maintenant. Avant, je payais 23 000 F, mais maintenant, je paye 79 000 F. Les factures sont là, vous pouvez les regarder (il montre l’enveloppe qu’il tient dans sa main). Qu’est-ce qui explique cela ? Franchement, ça ne marche pas du tout.’’

En outre, poursuit-il, ‘’je n’ai pas senti une amélioration dans la qualité de l’eau que la Sen’Eau distribue. L’eau n’est pas de bonne qualité. Elle est mauvaise. Elle a une odeur parfois d’eau de Javel ; parfois, c’est une eau saumâtre. Prenez de l’eau du robinet, mettez à l’air libre pendant 30 minutes, vous verrez au fond du récipient des débris. Ceci est très dangereux pour notre santé’’.

Alfa Sall, Directeur régional de Sen’Eau : ‘’Il n’y a pas de hausse dans la facturation’’

Interpellé sur la question, le directeur régional de Sen’Eau bat en brèche toutes ces récriminations. Alfa Sall : ‘’Il n’y a pas de hausse dans la facturation des clients. Ce que je peux dire sur cette question, c’est qu’il n’y a pas de modification de tarifs et la facture est établie sur la base d’un relevé d’index qui figure sur le dos de la facture du client. Le client peut vérifier lui-même et le calculer au besoin.’’

Il soutient mordicus qu’il n’y a pas de hausse du tarif et que cela même ‘’n’est pas du ressort de la Sen’Eau, car c’est l’Etat qui fixe le prix de l’eau. Les prix figurent sur le dos des factures et ils dépendent de l’usage, en fait. Il existe différents types d’usage et c’est en fonction de l’usage de l’abonné que les prix sont établis’’.

Alfa Sall de marteler : ‘’Dire qu’une facture est chère est relatif, parce que c’est juste un volume qui est mesuré. D’habitude, ce sont des gens qui avaient des factures faibles, parce qu’ils n’avaient pas assez d’eau, mais, lorsque la pression a augmenté, c’est normal qu’ils payent plus. Mais, en tout état de cause, si on reçoit une facture, on fait des vérifications sur le dos de la facture avec les index et si on n’est pas d’accord avec le montant, on peut toujours venir en agence ou appeler notre service clientèle pour des éclaircissements.’’

Toutefois, malgré ces plaintes des clients sur les montants des factures reçues, M. Sall indique qu’ils ne reçoivent des réclamations que sporadiquement, comme auparavant. C’est souvent un client qui a une fuite chez lui, qu’il n’a pas vu très tôt et a engendré des factures chères ou un client qui n’avait pas très souvent de l’eau et qu’en cette période assez fraiche, la pression qui monte est aussi un élément justificatif. Mais quoi qu’il en soit, une facture doit se lire, puisqu’il y a tous les éléments qu’il faut sur le dos’’, explique le chef de la Sen’Eau à Mbour.

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Les abonnés pointent du doigt les compteurs 

L’eau est devenue chère en milieu urbain. Une situation décriée par les abonnés qui ne s’expliquent pas cette hausse comparée aux factures qu’ils recevaient, lorsque la SDE gérait la commercialisation de l’eau. 

Boucar Aliou Diallo (Diourbel)

Au Sénégal, l'exploitation et la distribution de l'eau potable en zone urbaine et périurbaine est assurée, depuis le 1er janvier 2020, par la société Sen’Eau, filiale sénégalaise du groupe français Suez. Deux années après son installation, les abonnés ne savent plus où donner de la tête, avec la hausse vertigineuse des factures d’eau.

Mama Ndiaye, un abonné, ne décolère pas contre la Sen’Eau. Il confie : ‘’Avec la SDE, ma facture d’eau la plus chère ne dépassait pas 7 000 F. Mais depuis l’avènement de la Sen’Eau, mes factures ont triplé. Je paie maintenant 21 000 F CFA voire 25 000, comme la dernière facture que je viens tout juste de payer. Si ça continue comme ainsi, je serais obligé de rouvrir à nouveau le puits qui est dans ma maison.’’

Le septuagénaire, très remonté contre la société d’exploitation et de commercialisation de l’eau du Sénégal, dit ne pas comprendre cette hausse et pointe un doigt accusateur sur le système de facturation. Rencontré devant la porte de la Direction régionale de Sen’Eau, ce chauffeur de la région médicale ne comprend pas la hausse notée sur sa facture. Il confie : ‘’Le nombre de personnes a diminué. Il n’y a pas de fuite, mais la facture d’eau a presque doublé. Je payais chaque bimestre 12 000 F. Maintenant, je paie 24 000 F CFA. Il faut qu’on m’explique, parce que je ne suis pas du tout convaincu de tout ce qu’ils ont dit. L’étalonnage m’a été proposé, mais là aussi, je ne garde pas espoir.’’

A sa suite, Abdoulaye Faye pointe un doigt accusateur sur les compteurs : ‘’Je mets en doute ces compteurs, parce que j’ai remarqué que même si l’eau ne coule pas, l’index continue de fonctionner. Ce qui est presque un vol que le client ne peut voir.’’

Ces complaintes à l’endroit de la Sen’Eau constituent actuellement ‘’la chose la mieux partagée’’ dans la commune de Diourbel. Outre cette cherté de l’eau, il y a aussi que le liquide contient des taux relativement élevés de fluorure et de chlorure ; ce qui pousse les populations à recourir à l’eau de puits dont la qualité est douteuse ou bien à l’eau des unités de traitement d’osmose inverse commercialisée un peu partout dans la ville. D’où cette boutade de Ndèye Khady Diop : ‘’A Diourbel, nous payons deux factures d’eau. Celle de la Sen’Eau et la facture d’eau de consommation que nous achetons auprès des charretiers ou bien des unités de traitement d’eau.’’

Du côté de la Sen’Eau, impossible d’avoir une réaction, parce que la seule structure habilitée à parler se trouve être ‘’la direction de la communication’’.

IDRISSA AMINATA NIANG (Mbour)

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