Publié le 17 Sep 2015 - 00:43
MEURTRES DES SENEGALAIS A L’ETRANGER

Quand l’assistance juridique fait défaut

 

Combien de Sénégalais ont été tués à l’étranger ces dernières années ? Mystère ! Car jusqu’à présent, aucun chiffre officiel n’est disponible sur le sujet. En tout cas,  la série macabre se poursuit au sein de la communauté sénégalaise établie à l’étranger. Et avant-hier encore, un jeune Sénégalais, du nom de Lamine Senghor, a été poignardé à mort à Paris la capitale française. Deux jours auparavant, c’est le jeune Cheikh Oumar Foutiyou Diba  qui a vu son rêve d’eldorado stoppé par la barbarie de jeunes Brésiliens.

Trois assaillants ont mis le feu à son matelas samedi alors qu’il dormait dans les rues de Santa Maria, dans l’Etat méridional de Rio Grande del Sur, une ville habitée principalement par des immigrés. Suffisant pour susciter l’indignation de la présidente du pays de la Samba : “Je regrette profondément l’incident dans lequel le Sénégalais Cheikh Diba a été brûlé pendant le sommeil sur le trottoir à Santa Maria (RS)”, a déclaré Dilma Rousseff, via son compte twitter officiel de Présidente du Brésil, informant que le crime sera étudié par la police fédérale et le coupable ‘’sévèrement puni’’.  

Mais ce crime est le dernier (pour le moment) sur la longue liste de nos compatriotes assassinés à l’étranger au cours de ces dernières années. De l’Italie aux USA, en passant par l’Espagne, la Grèce, la Mauritanie, le Maroc, la Côte d-Ivoire, le Gabon…, il ne se passe plus un mois sans que la presse ne fasse état du meurtre d’un de nos compatriotes. Se posent alors avec acuité les causes voire mobiles de tels crimes. Certes, il y a longtemps que l’émigration n’est plus ce qu’elle était. La crise économique qui sévit dans le monde a engendré la montée de la xénophobie dans bien de pays d’accueil. Désormais l’étranger est vu comme un usurpateur d’emploi ; un ‘’utilisateur éhonté’’ des services sociaux et de santé, un pollueur...

Il faut donc se rendre à l’évidence. Avec les effets conjugués de la crise socio-économique, le ciel n’est plus clément ailleurs. Que ce soit en Europe, aux Usa ou en Afrique, les exemples de jeunes Sénégalais qui se cassent la figure sont légion. Mais quand les meurtres s’y mêlent, la pilule devient plus dure à avaler. Il appartient dès lors à l’Etat de veiller sur ses compatriotes  établis à l’étranger. Car on ne le dira jamais assez : l’apport des travailleurs immigrés dans l’économie nationale est incommensurable. Si dans  certaines  contrées du Sénégal l’on ne meurt pas encore de la famine, c’est en grande partie dû aux envois financiers de ces derniers. L’Etat a donc un devoir de protection et surtout d’assistance sur ses immigrés.

Aujourd’hui, beaucoup de dossiers relatifs à des cas de  meurtres dont sont victimes des compatriotes  sont en souffrance. Qu’il suffise de citer les assassinats de Mor Diop et Modou Samb en Italie, Ismaïla Faye et Charles Ndour au Maroc, Magatte Fall à Almeria, Abdoulaye Mbengue à Palma de Mallorca, Aliou Ba à Vicar del mar,  Mamadou Guèye et Mor Sylla à Barcelone (Espagne). Dans tous ces cas, on n’a pas senti l’assistance juridique de l’Etat. Conséquence : la plupart de ces dossiers dorment dans les tiroirs. Alors qu’il incombait à nos autorités consulaires et diplomatiques de peser de tout leur poids pour que les auteurs de ces assassinats soient jugés et condamnés et les familles des victimes dédommagées.

Il urge donc aujourd’hui de revoir notre politique migratoire surtout dans son volet juridique. Car, en dépit de la crise économique en occident ou ailleurs en Afrique, ils sont nombreux les jeunes Sénégalais à persister et à croire que le bonheur qui leur échappe est de l’autre côté de nos frontières. D’ailleurs, est-ce un crime que de vouloir aller là ou pointe l’espoir  quand le rêve n’est plus permis même chez soi ?

Ibrahima Khalil Wade

 

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