Publié le 17 Jun 2016 - 20:31
MUTATIONS DE FOYERS DJIHADISTES EN AFRIQUE DE L’OUEST

‘’Boko Haram sur le recul…’’ 

 

Des études sur le Djihadisme en Afrique de l’Ouest faites par les analystes de l’International crisis group (ICG) ont été présentées hier à Dakar. Elles décrivent les mutations de plusieurs foyers djihadistes.

 

Boko Haram a perdu du terrain. Elle est fragilisée. Du moins en 2016, si l’on s’en tient aux propos de l’analyste Vincent Foucher, membre du groupe d’analystes qui a produit des études sur les mutations des foyers djihadistes en Afrique de l’Ouest. En effet, la situation globale montre, selon lui, qu’il y a moins d’attaques, moins de morts, liés aux actions de Boko Haram. Et donc moins de succès. ‘’Boko Haram a perdu une partie de son extension territoriale qui, en 2015, était quand même assez importante.

Et effectivement, on a Boko Haram sur le recul ‘’ confie l’analyste. Cette situation, nous dit-on, s’explique par l’élection du président Buhari au Nigeria qui fut ‘’un tournant’’. ‘’Il a mieux structuré la réponse militaire nigériane à Boko Haram et a amélioré la gouvernance dans l’armée, mais aussi des questions de logistique, d’équipements etc. Une sorte de montée en puissance de l’armée nigériane qui est plus offensive’’, dit-il.

A cela s’ajoute la mobilisation à travers la sous-région, selon des modalités parfois différentes de groupes de miliciens qui participent et collaborent avec l’armée, entre autres aspects qui aident à mettre fin à la rupture entre l’armée et les communautés.  Par ailleurs, la mésentente entre les 4 Etats de la région s’est aussi améliorée. Il y a également, la  force multinationale qui a permis une collaboration entre les Etats concernées, mais aussi l’implication internationale. ‘’Le Président Buhari, avec sa légitimité de démocrate nouveau, a quand même réussi à remobiliser la communauté internationale, notamment les États-Unis qui jouent un rôle plus important qu’avant’’ renseigne Foucher.

‘’Mais Boko Haram n’est pas fini…’’

Cependant, ce mouvement est toujours présent. ‘’Il ne faut pas considérer que Boko Haram est fini. On est face à un mouvement qui a une capacité d’innovation ; qui peut se transformer’’ prévient-il. Puis d’ajouter : ‘’c’est d’abord une secte en rupture avec le reste des communautés aux alentours. Mais s’est greffé dessus un réseau de terroristes spécialisés, souvent des gens formés par Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Il y a donc une capacité à la transformation de l’organisation’’. Ainsi, concernant l’insurrection de Boko Haram au Cameroun, d’après le rapport, ‘’si le gouvernement Camerounais n’adapte pas sa réponse militaire, tout en mettant en œuvre des politiques de développement crédibles, plusieurs facteurs liés au conflit vont faciliter l’ancrage de Boko Haram et favoriser la contrebande et l’insécurité dans le Lac Tchad’’.

Sur ces trois rapports rendus public hier, l’on retient ainsi que la réponse des Etats commence à se faire plus cohérente. Que ces entreprises djihadistes ont une capacité à s’inscrire dans des conflits très locaux, de vieilles histoires entre les communautés. ‘’Une manière pour elles de se retrouver de nouvelles bases et cela pose la question de la capacité des Etats à réguler cette trame de conflits locaux pour réduire les risques’’, informe-t-on. C’est le cas pour le Mali où, Dr Jean-Hervé Jézébel, directeur adjoint du projet Afrique de l’Ouest à l’ICG, explique que le ‘’centre du pays, grand oublié des négociations inter-maliennes d’Alger, voit se développer des formes préoccupantes de violences armées » et notamment, « des noyaux djihadistes certes encore mal structurés mais qui se développent en instrumentalisant les fortes frustrations locales ».

Par ailleurs, les analystes pensent qu’il faut penser de manière plus systématique aux conséquences humanitaires des actions militaires menées. Mais surtout, améliorer la qualité de la réponse sécuritaire.

MENACES DJIHADITES

Ce qui différencie le Sénégal des autres pays

‘’Nous ne travaillons pas sur le Sénégal, mais on voit quand même que les confréries sénégalaises, à la différence des autres confréries en Afrique, ont un rôle socio-économique fort. Elles encadrent les jeunesses, sont capables de s’occuper des jeunes urbains etc. C’est  une sorte de présence socio-économique que les autres n’ont pas. Maintenant, on a signalé un sénégalais en Libye et, donc, on voit bien qu’il n’y a pas de pays qui soit doté d’une immunité envers ces phénomènes de Djihades’’, renseigne l’analyste Vincent Foucher. 

AMINATA FAYE

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