Publié le 3 Mar 2012 - 10:59
PAPA LOUIS MARCO MENDY ALIAS BOUBA KIRIKOU

''Je ne soutiens pas Macky Sall…''

 

Bouba, tu peux me dire quel est ton parcours ?

 

J’ai commencé d’abord comme percussionniste dans le groupe Dialoré en 1995. Ensuite, je suis devenu le lead vocal du groupe et on a fait un album avec Jololi en 1999. Et c’est dans cette production qu’il y avait la chanson Kirikou.

 

 

Bouba, comment est né le tube ''Kirikou'' ?

 

C’était un dimanche. Un certain Alioune Traoré qui bossait à Saprom (société de production de Youssou Ndour en 1998, qui était au Point E), nous (le groupe Dialoré) a appelé pour nous faire comprendre que Youssou avait besoin de moi. Une fois au studio, j’étais seul avec l'ingénieur de son Philip Brun qui me dit de commencer déjà les refrains. Ce faisant, je lui ai proposé de dire ''Kirikou, c’est mon ami…'' Il a accepté. Quand Youssou est arrivé, il a aimé. C’est lui qui avait fait la musique. Moi, j’étais juste l’interprète, lui, il se chargeait de la direction artistique. C’est ce que je fais d’ailleurs, maintenant, pour beaucoup d’artistes dans ma carrière. Alors, on a commencé à bosser sur les couplets. On a fait le morceau en une heure. Mais, je ne m'attendais pas à autant de succès de la chanson. Il faut peut-être que je te révèle que pour interpréter la chanson Kirikou, c’est Viviane qui a suggéré à Bouba Ndour de demander à Youssou de porter son choix sur ma personne. Elle (Viviane Chedid) était en tournée et il leur fallait quelqu’un pour le faire. Je la connaissais bien avant quand même, nous avons d’excellentes relations. Elle s’est toujours bien comportée avec moi, et chaque fois que j’ai besoin d’elle pour le boulot, elle s’est montrée disponible.

 

 

Qu'as-tu fait par la suite ?

 

J’ai quitté le groupe Dialoré, et j'en ai profité pour apprendre à jouer de la guitare. Chaque fois que j’entendais que quelqu’un donnait des cours, j’allais le voir. C’est alors que Bouba Ndour m'a contacté pour rejoindre le Jolof Band. Mais en même temps, je bossais avec Awadi. Après avoir quitté le Jolof Band, je suis resté avec Awadi. Puis, en 2007, je suis allé m'installer en Europe pour un contrat d'un an dans un cirque africain où toutes les nationalités africaines étaient représentées. J’y étais comme lead vocal et j’interprétais des chansons dans le style zoulou sud africain, et quelques-unes de mes chansons qui ne sont pas sorties. Après, je suis revenu pour préparer mon album titré ''Réalités'', qui vient juste de sortir.

 

 

Parle-moi de cette production.

 

C’est un album de 15 titres, avec le vécu quotidien comme thématique. On s’est basé sur une technique artistique vu que je comprenais beaucoup de choses sur les voix pour le faire. C’est un produit où on met plus en valeur les voix. L’album a été réalisé et produit par le Studio Sankara. De grands musiciens y ont participé, notamment Ousmane Wade du groupe Misaal basé maintenant en France, Donald Tibass, Cheikh Anta Ndiaye, Moustapha Gaye, l’excellent guitariste de Nder, Atoumane Diop, Awadi, non moins grand patron du Studio Sankara, Sun, le groupe suisse, Phat 4, Henry Guillabert de Xalam 2, le claviériste Jean-Pierre Senghor, Baba Hamdy Diawara, Tanguy Akédengué. Il y a eu également les participations de la chanteuse Khady Mbaye, Bakhaw Dabrains, Duggy Tee, Tibass et le reggaeman antillais Tiwony.

 

 

Et ton travail pour la création de mélodies, c’est quoi exactement ?

 

C’est le boulot que je fais pour beaucoup d'artistes en ce moment. Ils m’appellent juste pour leur créer des mélodies ou un refrain. J’étais, par exemple, le directeur artistique du morceau ''Paix en Guinée'', j’avais Awadi, Tiken Jah, Mory Kanté, Sékouba Bambino, etc. Je ne l’ai pas appris, c’est un don de Dieu. C’est aussi grâce à des échanges ; les Sud Africains avec qui j’étais dans le cirque me disaient que je n’étais pas sénégalais car, selon eux, je comprenais trop bien leur façon de poser leurs voix. Maintenant, je compose des musiques aussi pour pas mal d'artistes ou pour des publicitaires.

 

 

Parlons maintenant politique. Que penses-tu du premier tour de l'élection présidentielle ?

 

Si le Conseil constitutionnel avait rejeté la candidature de Wade, on serait déjà sur autre chose. Il n’y aurait pas eu toutes ces violences, les policiers n’allaient pas jeté des grenades lacrymogènes dans la Zawiya Mame El Hadj Malick Sy et il n’y aurait pas eu tous ces morts. Pour moi, c’est cela le premier problème. Maintenant, on est passé à autre chose. Mais ce que je pense, c’est qu'un grand homme doit savoir sortir par la grande porte, à temps.

 

 

Comment vois-tu le second tour ?

 

Le combat continue. Tous les gens qui n'étaient pas d’accord sur la candidature de Wade, vont voter pour Macky, même s'ils ne sont pas avec lui. Le peuple veut le changement et il faut se battre pour cela. Je n’ai pas aimé le discours de Macky Sall quand il a dit qu’il n’allait pas être question de chasse aux sorcières. On veut que justice soit faite, on n’est pas une nation qui enrichit ses dirigeants pendant que d’autres meurent dans les hôpitaux parce qu’ils n’ont pas de quoi se soigner, ou quand les gens n’arrivent plus à manger à leur faim. La vie, c’est des choix, ils (les autorités actuelles) ont fait leur choix. Maintenant, ils n’ont qu’à prendre leurs responsabilités. Que justice soit faite.

 

 

Que conseilles-tu à Macky, s’il est élu ?

 

Ce que je lui conseille, c’est qu’il mette les gens qu’il faut à la place qu’il faut. Je pense que les choses iront mieux. C’est cela le plus gros problème : des gens sérieux dans chaque secteur et qu’on arrête les nominations par liens de parenté ou copinage. On comprend aussi que ce ne sera pas facile pour le futur président parce qu’il y a beaucoup à faire. Que la population aussi fasse ce qu’elle a à faire. Je dis juste qu’un président doit savoir prendre les bonnes décisions, mais que le peuple a son rôle à jouer. C’est cela mon conseil et allons tous voter d’abord pour le changement au second tour.

 

 

En tant qu'artiste, qu'attends-tu du prochain président ?

 

Pour les artistes, avant tout, qu’il applique la loi sur nos droits et qu’il nous aide à avoir des lieux où nous pouvons nous produire.

 

 

Je présume que tu soutiens Macky...

 

Non, je ne soutiens pas Macky Sall.

 

 

Qui soutiens-tu alors entre Wade et Macky au second tour ?

 

Moi, je ne cache pas que je ne suis pas d’accord sur la candidature de Wade. Donc, tu as déjà ta réponse. Et c’est sûr que je vais voter parce que je suis un citoyen. Je vote Macky, non pas parce que c’est mon candidat, mais il y a deux candidats et dans ma tête Wade n'en est pas. Oui, je vote ''Macky'', même si je ne le soutiens pas.

 

PA ASSANE SECK

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