Le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, face à la presse hier, a regretté que la solidarité régionale n’ait pas fonctionné, lors de l’élection à la présidence de la Commission de l’Union africaine. Mankeur Ndiaye explique la défaite du Pr Abdoulaye Bathily par le fait que le Sénégal ait refusé de renoncer à ses positions et à ses amitiés traditionnelles pour le poste.

Après l’échec du Pr Abdoulaye Bathily à la tête de la Commission de l’Union africaine, que de regrets du côté des autorités étatiques sénégalaises. Celles-ci regrettent beaucoup que la solidarité régionale n’ait pas fonctionné, lors de cette élection. ‘’La CEDEAO, à plusieurs reprises, a réitéré son soutien à la candidature du Pr Abdoulaye Bathily qu’elle a endossée. C’est pour cela que nous regrettons que la solidarité régionale n’ait pas fonctionné’’, a déclaré hier le ministre des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur, lors d’une conférence de presse qu’il animait au sein de son département. Selon Mankeur Ndiaye, ‘’si la CEDEAO avait voté comme cela a été retenu, le Sénégal se serait placé deuxième avec 15 voix, après le Tchad qui en a eu 16’’. Mieux, il dit même ne pas être sûr que ‘’toutes les dix voix que le Sénégal a eues viennent de la CEDEAO’’.

Cette tournure des évènements, aux yeux du chef de la diplomatie sénégalaise ‘’veut dire que tous ces pays ont d’autres loyautés auxquelles ils ont obéi pour voter pour des candidats non régionaux’’. Il souligne ainsi que ‘’le candidat du Tchad a été élu à l’issue du septième tour de scrutin’’. Et ‘’quand on est élu au septième tour du scrutin, on doit avoir le triomphe modeste’’, persifle le ministre des Affaires étrangères. Il ajoute : ‘’Tous les présidents africains ont reconnu le très haut niveau de notre candidat. Mais à cause de jeux de positionnement et d’intérêts personnels, notre candidat n’a pas été élu’’. Devant cet état de fait, Mankeur Ndiaye appelle à plus de loyauté au sein de la communauté sous régionale. ‘’Nous tenons à ce que les engagements pris au sein des instances régionales soient respectés. Le Sénégal a toujours été fidèle à ses engagements. Nous avons continué à voter pour les autres candidats de la CEDEAO, pour tous les postes de commissaires, parce que c’est cela la fidélité et la loyauté régionales’’, déclare-t-il.

Selon le ministre des Affaires étrangères, le Sénégal, en présentant sa candidature, a refusé de renoncer à ses positions et à ses amitiés traditionnelles. ‘’Certains nous ont dit : ‘’vous êtes trop engagé dans la CPI, est-ce que vous ne pouvez pas faire le bémol’’. On a dit non. Nous ne pouvons pas troquer nos positions diplomatiques contre un poste, fût-il la présidence de la Commission de l’UA. D’autres nous ont dit : ‘’vous êtes trop engagé avec le Maroc’’. Nous avons dit : nous n’allons pas troquer nos amitiés avec le Maroc contre un poste de président d’une commission. Nous restons constants dans nos positions de soutien à la CPI et d’amitié avec le Maroc’’, révèle le chef de la diplomatie sénégalaise. Mankeur Ndiaye de dire que ‘’certains pays ont utilisé cela comme argument pour battre campagne contre le Sénégal’’. Pis, il soutient qu’il y a un pays qui n’a même pas de candidat, mais qui a fait le tour de l’Afrique pour battre campagne contre le Sénégal.

‘’Le Sénégal n’est pas diplomatiquement isolé’’

En sus, le ministre nie tout isolement diplomatique, à travers ce qu’il considère non pas comme un échec mais un insuccès. ‘’Un pays isolé diplomatiquement ne peut pas, en 48h, mobiliser la communauté ouest-africaine, l’Union africaine et la communauté internationale contre Yahya Jammeh’’, fulmine-t-il. Soulignant ainsi que le Sénégal a été le pays le mieux élu au Conseil de sécurité des Nations unies avec 187 voix sur 191 votes. ‘’Le Sénégal est un grand pays de diplomatie, il n’est pas diplomatiquement isolé’’, insiste-t-il.

D’ailleurs, Mankeur Ndiaye rappelle que ce n’est pas la première fois que le Sénégal perd des élections importantes. ‘’En 1990, le Pr Seydou Madani Sy, ancien ministre de la Justice, n’a pas été élu par la Cour internationale de justice. En 2003, nous avons perdu l’élection à la CPI, parce que nous avions présenté la candidature du magistrat Doudou Ndir, alors que le Sénégal faisait partie des pays les plus actifs dans la négociation du statut de Rome.

Le Sénégal a été le premier pays au monde à avoir ratifié le statut de Rome instituant la CPI, ouvrant ainsi la porte à toutes les ratifications qui ont permis l’entrée en vigueur de ce statut’’, se remémore-t-il. Soutenant que le Sénégal, en tant que pays, continuera à avoir des ambitions africaines, parce que c’est la première fois qu’il s’est positionné pour diriger l’Afrique, à travers la commission. ‘’Nous avons des ambitions fortes en tant que petit pays. Nous sommes présents partout à travers le monde comme un pays respecté. Aux Nations unies, nous faisons un excellent travail apprécié par tous.’’ 

ASSANE MBAYE