Publié le 24 Jun 2018 - 15:52
PROFIL DZINGUENE SANDRINE (ARTISTE-CHANTEUSE)

La Camerounaise à l’allure sénégalaise

 

Très joviale, Sanzy Viany, de son vrai nom Dzinguene Sandrine, est une artiste camerounaise dans la trentaine. Au Sénégal depuis une semaine pour faire sa promotion, elle se confie à ‘’EnQuête’’ sur son riche parcours, son background et ses rapports avec le Sénégal, son pays de cœur.

 

Elle n’a jamais imaginé faire une carrière musicale sans pour autant faire sa promotion au ‘’pays de la Teranga’’. Son objectif : faire découvrir aux Sénégalais la culture camerounaise. En fait, la vie de Sanzy Viany est étroitement liée au Sénégal. Le père de son fils est, en effet, un Sénégalais, nous apprend-elle avec beaucoup de bonheur. Pour une première, la musicienne est à Dakar pour participer à des rencontres artistiques. Elle compte ainsi profiter de l’occasion pour faire découvrir son talent et son troisième album aux mélomanes sénégalais. Elle témoigne : ‘’J’ai décidé de venir au Sénégal parce que, dans mon 3e album, je souhaite apporter des couleurs et de la saveur du Sénégal. J’ai fait un enfant avec un Sénégalais. Je veux donc que mon fils voie que sa maman s’intéresse à la culture de son père. J’ai aussi envie de voir ce que le métissage entre la musique de l’Afrique de l’Ouest et celle de l’Afrique centrale peut donner. C’est là une façon de renforcer également la collaboration Sud-Sud qui est très rare dans le domaine musical.’’ 

Et ce n’est pas tout. L’artiste avait également senti le besoin de s’ouvrir. Elle se dit partagée entre le désir de vendre sa culture et celle de découvrir la musique des autres. ‘’Je ne suis pas un artiste fermé. J’aime m’ouvrir au monde, mais je vais vers les autres pour proposer ce qu’il y a de bien chez moi dont je suis fière. Aussi, ma musique traditionnelle n’est pas loin du mbalakh. Il y a quelques similitudes, car c’est très rythmé. Il y a du tam-tam, du balafon, de la guitare solo’’, s’enthousiasme-t-elle.

La jeune artiste utilise sa langue maternelle, l’éton, et le bikutsi, qui est son rythme traditionnel, pour écrire et composer sa musique qu’elle mélange  savoureusement avec du jazz, du gospel, du slow ou toute influence que son cœur lui inspire. Elle explique : ‘’Je suis de la grande famille des Fambati Boulou qu’on retrouve en Guinée-Equatoriale et au Gabon. Du moment où je suis une artiste hybride, je fais un mélange entre le rythme traditionnel et tout ce que je peux sentir. J’espère que mon séjour au Sénégal va m’inspirer une jolie chanson qui serait une symbiose entre le bikutsi et le mbalakh’’.

La musique sénégalaise, Sanzy la porte dans son cœur depuis toute petite. Youssou Ndour, Baba Maal, Daara J Family, Viviane Chedid sont pour elle les grands noms de la musique sénégalaise. ‘’A distance, on a l’impression que c’est une musique monotone, parce que les gens chantent de la même manière. On a l’impression d’entendre les mêmes trémolos. Mais lorsqu’on a l’oreille musicale, on se rend compte que les mélodies sont différentes’’, analyse l’artiste, séduite.

‘’L’artiste sénégalais est plus encouragé et célébré que les nôtres’’

Finaliste du prix international Découverte Rfi 2015,  Sanzy est d’un père pasteur et d'une mère chantre. La belle dame aux formes généreuses a commencé à chanter à l’âge de 9 ans. Mais elle monte sur scène pour la première fois à 15 ans, aux côtés de Sultan Oshimihn, chanteur de reggae camerounais. Ce qui ne l’a pas empêchée de continuer ses études comme convenu avec sa maman. Après lui avoir accordé sa bénédiction, sa génitrice la prévient en ces termes : ‘’Je te laisse chanter tant que la musique que tu fais est décente et transforme des vies. Si tu chantes une musique qui expose des nudités et qui ne vend pas la valeur profonde de l’Afrique ou du Cameroun, tu ne chanteras plus.’’

Outre cette condition, la maman avait également conditionné son autorisation à ses performances à l’école. ‘’Il faut de bonnes notes’’, l’avait-elle prévenue. Du coup, entre l’école secondaire et l’université, Sanzy avait le droit de faire de la musique. Mais elle devait, en même temps, décrocher des diplômes. ‘’Dès que j’ai eu ma Maitrise en droit des affaires, j’ai dit à maman que j’ai tenu ma promesse. A partir de cette date, j’ai pu me concentrer et sortir mon premier album en 2007. Il est intitulé ‘Akouma’’, s’est-elle rappelé.

Très ambitieuse, Sanzy a fait, en 2010, une tournée de 90 étapes à travers l’Afrique et l’Europe, dans le cadre du projet hollandais  ‘’Daugthers of Africa‘’. Dans la foulée, l’artiste a fait des rencontres artistiques avec quelques grandes figures de la musique africaine comme  Manu Dibango, Bebe Manga, Queen Eteme, Henry Dikongue du Cameroun, Amy Koita du Mali, Ismaël Lo du Sénégal et Monique Seka de la Côte d’Ivoire. Elle a également participé au  festival Talents rares de Paris. Un moment bien choisi pour célébrer ses 10 ans de carrière au Cameroun.

Parlant de la musique de son pays, elle explique qu’elle est plus portée par ses jeunes étalons. En plus, dit-elle, c’est la musique urbaine qui a une plus grande visibilité que la musique traditionnelle ou celle de recherche. Elle ajoute : ‘’On peut dire que notre musique évolue bien, même si le statut réel de l’artiste laisse à désirer. L’artiste sénégalais est plus encouragé et célébré que les nôtres. C’est déjà une grosse bataille pour nous de recevoir nos droits d’auteur. Toutefois, le ministère de la Culture accompagne certains artistes.’’

Sa prestation live à la 5e édition internationale des Trophées francophones du cinéma au Cameroun avait clôturé en beauté l’année 2017. Elle a sorti un nouvel opus de 13 titres baptisé ‘’Ossu’’ qui signifie ‘’En avant‘’ en langue éton. Actuellement, l’artiste prépare son 3e album qui sera bientôt disponible sur le marché.  

HABIBATOU WAGNE

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