Publié le 4 Dec 2018 - 21:06
SITUATION FRONT SOCIAL

Le dernier rempart contre un second mandat

 

Face à la mollesse de l’opposition, la majorité présidentielle semble être comme sur des roulettes, en direction d’un second mandat. Mais gare à la grogne populaire qui a eu raison de tant de régimes.

 

Passé le faste, avec un week-end d’investiture au Dakar Arena, retour aux dures réalités du front social. Les syndicalistes, à l’opposé des militants et sympathisants, ne sont pas à la fête. Ils sont nombreux à ruer dans les brancards. Et ils ne comptent pas, dans un proche avenir, jeter les armes qu’ils affûtent, au contraire, pour en découdre avec les gouvernants. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que certaines populations, particulièrement celles qui utilisent les établissements sanitaires pour diverses raisons, en souffrent terriblement.

 Le président Sall, à Diamniadio, vante ses multiples efforts sur le plan sanitaire, à travers notamment la Couverture maladie universelle (Cmu). Mais encore faudrait-il que le personnel soit sur place pour satisfaire les besoins en services de santé des populations fatiguées des grèves répétitives menées par And Gueusseum qui en est à son 16e plan d’action.

Ainsi, ces syndicalistes ont-ils décrété la grève les 3, 4 et 5 décembre 2018. Et il en sera de même les 10, 11 et 12 prochains. Pendant ce temps, le ministre de la Santé s’emmure dans un silence presque de cathédrale, à défaut de paraitre pour proférer des menaces. Mballo Dia Thiam rétorque : ‘’Qu’on ne nous pousse pas au boycott des urgences. Ce que nous demandons, c’est l’ouverture de négociations sur le régime indemnitaire. L’Etat avait promis un système plus juste, après la réalisation de l’étude sur la rémunération des agents de la Fonction publique. Cette étude s’est achevée depuis 2015. Par la suite, il avait été conseillé à l’Etat de geler tout octroi d’indemnité et de prime pendant un an. Dernièrement, le gouvernement a accordé des indemnités et primes aux enseignants et aux médecins qui font partie de nous. Pourquoi devrions-nous continuer d’attendre ?’’, peste-t-il, toujours déterminé à aller jusqu’au bout de la lutte, malgré les efforts ‘’importants’’ accomplis par l’Etat.

And Gueusseum ne compte pas s’arrêter à décréter des mots d’ordre. Suite aux menaces du ministre de procéder à des réquisitions pour la vaccination des enfants, les syndicalistes ont décidé tout bonnement de retourner dans la semaine les antigènes à leur disposition. ‘’Nous allons procéder à la restitution de tous les antigènes au niveau des médecins des districts. Si on n’a pas de vaccin, il ne peut forcer les ‘’vaccinateurs’’, comme il le dit trivialement, à vacciner. En plus, qu’il sache que la grève concerne tous les programmes et non pas la vaccination seulement. D’ailleurs, les grévistes annoncent une conférence de presse, aujourd’hui, pour s’adresser au public sur la situation. Car, regrette M. Thiam, ‘’Depuis juillet, on attend l’ouverture des négociations, mais il n’y a rien du tout. C’est le statu quo. On avait promis la rupture dans le système de rémunération, mais rien ne change. On continue, comme l’ancien régime, à déstructurer le système. Ce n’est pas ce qu’on attendait’’.

Pendant que la santé pleure, la justice, elle, bout de rage. Ce qui s’y passe est simplement rocambolesque, si l’on en croit les travailleurs. Les pauvres ! Ils sont tombés des nues. Et pourtant, en quelques jours, l’espoir avait été ressuscité. Heureux qu’ils étaient de constater dans leur bulletin de salaire une hausse de 40 %. De l’espoir qui a vite cédé la place à l’amertume et à la colère. ‘’Ce qui s’est passé est inqualifiable. Nous étions dans un processus où des réformes étaient entreprises (...). Malheureusement, il s’est produit une chose inédite, inacceptable dans une République. Le gouvernement du Sénégal a entamé la mise en œuvre du paiement des 40 % prévus à la fin de ce mois. Tout le monde l’a vu et constaté sur son bulletin. Mais ce montant a été retiré, violant ainsi leur engagement. C’est une chose inexplicable dans une République’’. Pour ce motif invraisemblable, les acteurs de la justice promettent de durcir le ton pour contraindre le gouvernement à respecter les accords (voir page 8). Au-delà de la ‘’désertion’’ des postes, ils ont déposé, au niveau de la préfecture de Dakar, une ‘’déclaration de marche nationale’’ dès le mercredi 12 décembre. Et ils ne comptent pas s’en limiter, si le gouvernement ne satisfait pas leurs doléances.

Dans l’éducation, la situation est certes on ne peut plus favorable. Du moins, on pourrait le croire, parce que le maillon essentiel, à savoir les enseignants, en ont eu leur dose et rangé l’artillerie lourde. Mais dans le supérieur, il y a un  regain de tension, malgré une nette amélioration constatée par le coordonnateur du Saes à l’Ucad. L’organisation mère observe, depuis hier, et pour 48 heures, un mot d’ordre de grève. Elle demande à ses différentes coordinations des assemblées générales-campus dans la même période pour faire l’évaluation.

Alioune Dème déplore la non matérialisation, conformément aux accords, du fonds de solidarité sociale. Il explique : ‘’C’est le seul point à ce jour non satisfait. Les enseignants du supérieur avaient décidé de travailler une heure de plus pour alimenter ce fonds. Les ressources collectées devraient être destinées aux enseignants partis à la retraite avant 2018 et qui ne sont donc pas concernés par la revalorisation des pensions. Cela devait entrer en vigueur depuis juillet, mais ce n’est pas le cas.’’ Le Saes a également fait un sévère réquisitoire contre les Acp (agents comptables particuliers) qui ‘’deviennent hostiles aux ordres des recteurs’’. Pour eux, cela remet en cause l’autonomie des universités. Ce qui est inacceptable. Ils réclament, en plus, la diligence de la question des visas, dont le traitement prend parfois trois à quatre mois, alors que c’est lié aux activités de recherche des professeurs.

En sus de ces points, les contestataires demandent également au gouvernement de résoudre la situation qui prévaut dans les restaurants universitaires, en payant les prestataires avant que l’irréparable ne se produise. ‘’C’est comme si ce qui s’était passé l’année dernière avec Fallou Sène ne leur a pas servi de leçon’’, constate le sieur Dème qui dénonce en même temps le nombre d’étudiants pléthorique (près de 50 000) à la Fac de Lettres combiné au sous-effectif des enseignants (moins de 300) et des secrétaires (50).

Mais contrairement aux autres secteurs, lui précise que ce mot d’ordre est surtout à titre d’avertissement pour amener le gouvernement à réagir avant que les choses ne dégénèrent.

MOR AMAR

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