Publié le 3 Dec 2022 - 22:10
VOTE BUDGET 2023- PME, PMI, SOTEXKA, ICS…

De la survie et de l’essor des entreprises sénégalaises

 

Le ministre du Développement industriel et des Petites et moyennes industries, Moustapha Diop, a fait face aux députés, hier.  Ces derniers ont insisté sur la nécessité de soutenir les entreprises locales et de relancer les entreprises en difficulté. Le ministre a annoncé différentes stratégies pour y parvenir.

 

‘’Même les boutons, on les importe, en Afrique… Si cela continue, l’émergence ne sera que de nom’’, a déclaré, hier, Guy Marius Sagna, rapportant les propos de l’ancien ministre Boun Abdallah Dione, prononcés en 2019. En effet, le député a prôné la protection des champions nationaux, lors du vote du budget du ministère du développement industriel et des petites et moyennes industries. ‘’Il y avait beaucoup d’entreprises au Sénégal, mais, les dirigeants se sont appuyés sur la FMI et la Banque Mondiale qui ont imposé à nos pays d’ouvrir leurs frontières. Le FMI et la Banque mondiale n’ont jamais aidé un pays à se développer. Tous les gens doués d’esprit savent qu’il y a une division internationale du travail qui fait qu’on reste dépendant de leurs produits. Sans souveraineté, il n’y a point de développement. On a besoin d’un plan Sénégal indépendant’’, a ajouté Guy Marius Sagna.

Ainsi, les députés se sont beaucoup intéressés à l'accompagnement prévu pour les entreprises en situation de cessation de paiement, en liquidation de biens et en redressement judiciaire. Ils ont aussi plaidé une meilleure localisation des zones franches devant abriter ces parcs industriels, tout en s'interrogeant sur leurs rapports avec les mesures d'exonérations fiscales et la politique incitative y relative.

Dans le cadre des mesures d'incitation fiscale, le ministre Moustapha Diop informe que l'État du Sénégal a aménagé des Zones économiques spéciales (ZES) avec des avantages fiscaux et douaniers pour permettre à nos industries d'être compétitives. Par ailleurs, au-delà de l'importance des ZES, l'État crée, dit-il, des plateformes industrielles tout en luttant contre les déclarations en sous-douane, les contrefaçons, les fraudes et la diminution des facteurs de production, notamment l'électricité avec le coût fixe, qui plombent nos industries.

Mais, selon Mame Diarra Fam, les entreprises sénégalaises peinent à survivre face à la concurrence étrangère. Dans la même veine, le député Ibrahima Diop a posé des questions sur les mécanismes de soutien aux entreprises.

La relance du secteur textile

Abordant la précarité et la relative durée de vie des PMI, Moustapha Diop a rassuré que ses services travaillent à enrayer ces fermetures précoces regrettables. Il annonce une convention de financement des PMI, signée avec le Fonds de Solidarité africain à hauteur de 2 milliards, ainsi que l’apport de l'Agence de Développement et d'Encadrement des Petites et Moyennes Entreprises (ADPME) qui devraient permettre d'assurer la durabilité de ces entreprises. 

Dans le même ordre d’idées, les députés ont interpellé le ministre sur la relance du secteur textile, notamment à Louga et Pikine, tout en se préoccupant de la situation de l'usine Sotexka-Saloum et du Domitexka-Saloum.  Le député Abass Fall l'a par ailleurs interpellé sur la capacité de production des Industries chimiques du Sénégal (ICS), particulièrement l'approvisionnement du marché en engrais en 2021 et 2022. Ils ont aussi été très sensibles à la précarité des travailleurs des ICS de Diamaguene-Sicap-Mbao, tout en souhaitant une contribution économique locale de cette industrie.

Sur la situation des ICS, le ministre a rappelé que sa relance a été assurée, avec l'arrivée d'INDORAMA en août 2014. Depuis, les productions d'acide phosphorique, de phosphates et d'engrais des ICS ont régulièrement augmenté. En ce qui concerne les engrais, il souligne que la capacité de production annuelle des ICS s'élève à 250 000 tonnes. Elles fournissent, depuis très longtemps, l'essentiel des besoins en engrais du Sénégal, malgré les volumes d'engrais NPK importés sur le marché. Poursuivant, il a informé qu'eu égard au contexte international rendant difficile les importations en 2021 et 2022, les ICS étaient la seule usine d'engrais dans la zone UEMOA à même de produire la totalité des besoins d'engrais du Sénégal.

Sur le secteur textile, le ministre a précisé que son département a relancé l'usine Sotexka Louga, après 15 ans d'arrêt. Elle est actuellement exploitée par l'entreprise Pi. Textile qui confectionne des tenues scolaires et de travail, des tee-shirts et des équipements sportifs. Deux mille (2 000) jeunes y travaillent déjà, bien qu'il soit projeté un recrutement, d'ici à la fin du mois de décembre, 5000 jeunes. Quant à la Sotexka Saloum, elle est exploitée par Domitexka Saloum. Celui-ci bénéficiera d'un financement de près de 4 milliards FCFA de KFW, pour une relance définitive de l'usine, en garantissant les transferts de technologie.

Par ailleurs, les députés ont souhaité une mécanisation des activités de tannerie et de production de cuirs. Aussi, se sont-ils préoccupés de la situation des populations de Palmarin et de Fimela, découlant de l'octroi présumé de 5 000 ha à une société indienne aux fins de construction d'une usine de production de sel. Mais, également des mesures fiscales prises contre les Salins du Sine-Saloum, notamment.

Relativement à l'industrie de peaux et de cuirs, Moustapha Diop a mis en exergue le projet ‘’victoires rapides cuirs et peaux’’. En effet, évalué à 82,05 milliards, son étude de faisabilité a abouti à l'adoption de la stratégie nationale de développement de la filière ‘’cuirs et peaux’’. Ce qui va faire du Sénégal le hub africain du cuir. Cependant, le ministre tient à préciser qu'il n'est pas envisageable de procéder à l'interdiction totale des exportations de matières premières. L'État peut néanmoins faire le choix de les réduire considérablement.

D'ailleurs, soutient-il, c'est tout l'intérêt de la politique d'industrialisation du pays devant permettre de transformer localement nos produits, tout en créant de la valeur ajoutée et de l'emploi.

Délocalisation des sociétés implantées dans la zone industrielle de Dakar

En outre, la député Mame Diarra Fam a demandé au ministre Moustapha Diop, de faire l'état des lieux des investissements, en fin 2021-2022 et du ratio de performance ainsi que des emplois créés dans les Zones économiques spéciales (ZES). Sur le tissu industriel sénégalais, le ministre a rappelé que notre parc industriel compte à présent 2 156 industries qui emploient 75 000 personnes. Il a précisé que ce parc est à 92,5% occupé par les PMI. En matière de création de richesses, il renseigne que, bien que ne représentant que 7,5% du parc, les grandes entreprises ont un taux de 90%, créant ainsi 70% des emplois.

La plupart de ces industries sont localisées à Dakar avec un taux de 91%, suivi de Thiès avec 5%, Ziguinchor et Saint-Louis avec 1% chacun. Le ministre ajoute que le secteur agroalimentaire reste prédominant avec 63%, suivi du secteur métallurgique et mécanique avec 10%, du secteur du bois, du papier, de l'imprimerie et du carton avec 9%. Ensuite, vient le secteur de l'énergie avec 6%, celui du textile, peaux et cuirs avec 3%, le reste des industries représentant 2%.

Par ailleurs, le ministre a indiqué que la production industrielle a diminué de 22% en 2022. Relativement à la promotion de l'exportation, ses services ont délivré sept (7) décisions d'agrément à la fin du troisième trimestre 2022 qui ont concerné 23 entreprises, pour un total de 130 produits industriels, indique-t-il. Ce qui a amené le député Ayib Daffé à interpeller le ministre sur le plan de délocalisation des sociétés implantées dans la zone industrielle de Dakar, aujourd'hui, complètement entourée de maisons.

Les parlementaires ont aussi relevé l'occupation encombrante de Petersen, en plein cœur de Dakar, par les importateurs de matériels automobiles et les mécaniciens et ont souhaité leur délocalisation.

Relativement à la délocalisation et à la décentralisation des usines, Moustapha Diop a indiqué que la quasi-totalité des industries de la baie de Hann est délocalisée dans le Domaine industriel de Diamniadio. Pour ce qui est de Petersen, il a informé qu'un site est déjà aménagé avec le concours du ministère en charge de l'Artisanat, afin d'accueillir tous les mécaniciens de Dakar.

Par ailleurs, il a ajouté que l'État a déjà intégré le besoin d'aller vers la décentralisation des industries, en adoptant un programme de développement des PMI sur toute l'étendue du territoire.

BABACAR SY SEYE

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