Publié le 11 May 2020 - 13:42

Vous comptez vraiment sur une télévision pour sauver l’année !

 

Décidément, dans ce pays, il faut s’attendre chaque jour à une nouvelle incongruité.

Monsieur le ministre de l’Education nationale, vous plaisantez !

Vous écrivez : « dans le monde où nous vivons, il n’est plus obligatoire d’être présent physiquement entre quatre murs pour étudier ».

(…)

« Les élèves se connectent et ont directement accès à toutes les ressources pédagogiques nécessaires pour étudier. Ceci surtout pour les élèves de CEM2, Troisième et Terminale ».

Comment des élèves peuvent-ils se connecter là où parfois même leurs enseignants n’ont pas accès au réseau ou même à l’électricité?

Vous optez pour la télévision, dites-vous, pour ceux qui n’ont pas l’internet.

Ah bon ?

Comment allez-vous procéder sans les regroupements déconseillés, voire interdits et les longs déplacements des apprenants vers les lieux dédiés au visionnage des enseignements?

Allez-vous donner un téléviseur et de l’électricité à chaque famille d’apprenants ?

Oui, vous pouvez avoir raison, mais certainement vous avez fait votre étude en ayant comme référence une catégorie bien connue de Sénégalais qui n’auront aucune difficulté à suivre « votre télévision ».

Sérieusement, vous comptez sur une télévision ou sur l’internet pour assurer la continuité des cours et sauver l’année scolaire ?

Soit, une année blanche, personne n’en veut. Mais, proposez-nous une solution applicable partout ou une série de solutions conçues en fonction des différentes localités du pays.

Vous n’imaginez surtout pas non plus tenter une année invalide partielle pour ceux qui n’ont pas accès à votre système semi- bourgeois que vous proposez pour éviter d’être accusé de faire du deux poids, deux mesures.

De crainte d’être accusé de stigmatisation (ce qui est en vogue de nos jours), vous n’allez sans doute pas explorer cette piste. Alors, c’est plus confortable de trouver la même chose pour tous ; l’essentiel étant que les évaluations et examens se fassent. Chacun y trouvera son compte, quitte à sacrifier la qualité, surtout au niveau de ceux qui ne remplissent pas les conditions pour suivre correctement vos cours téléguidés.

Bien évidemment, comme vous l’avez souligné, la logistique et les moyens ne se posent pas à votre niveau.

Mais, avez-vous pensé aux endroits les plus reculés du pays qui n’ont pas accès à l’électricité ?

Ah, j’oublie, récemment votre gouvernement a augmenté le prix de l’électricité pour, paraît-il, permettre au monde rural d’avoir du courant.

Certainement, c’est ce programme qui a fait des effets de façon magique !

Savez-vous ou avez-vous oublié les conditions dans lesquelles les gens évoluent dans les familles sénégalaises en général ?

Comment les apprenants pourront-ils se concentrer pendant vos cours télévisés dans des salons communautaires où se retrouvent tous les membres de la famille élargie qui pour discuter à haute voix, qui pour regarder des épisodes de telenovelas ou des séries du genre « Maîtresse d’un homme marié » …?

Vous pensez que pendant la diffusion de vos cours, tout le monde va déguerpir et se taire pour laisser les élèves se concentrer ?

Fort heureusement, nous avons encore des écoles entre quatre murs !

Au moins, malgré le voisinage anormal de certains établissements avec des marchés, des loumas, des gares, des ateliers de toutes sortes et d’autres endroits polluant à tout point de vue, les quatre murs peuvent atténuer les bruits parasites.

Monsieur le ministre, si vous tenez à sauver l’année scolaire, creusez encore, et certainement, vous trouverez une solution conforme à nos réalités et non pas seulement aux conditions d’une classe de privilégiés.

Amadou Sow

FASTEF/UCAD

 

Section: 
ET SI ON PARLAIT D’INSERTION DES JEUNES A LA PLACE D’EMPLOI DES JEUNES
Tourisme, culture et artisanat : Une articulation stratégique pour le développement
ÉGALITÉ EN DANGER : L’alerte d’Onu Femmes
DU CAPITAL A LA CONNAISSANCE : Transformer la fuite en source, le Brain Drain en Brain Gain
Un cri de cœur pour les clubs sénégalais : Sauvons notre football local  
Matériel agricole au Sénégal : Entre modernisation promise et réalité du terrain
La souveraineté en partage : La diaspora sénégalaise au cœur du financement national
Un champ est une école vivante : Ode à l’intelligence de la terre et à la pédagogie du vivant
Le PRES en partage : Le pacte de Monza entre Sonko et la diaspora
SERIE : LE MONDE TEL QUEL ! : L’ONU à 80 ans : Une occasion cruciale de renouveau
La tentation du parti-État : Un glissement révélateur
DE LA CONSOMMATION À L’INVESTISSEMENT : FAIRE DE LA DIASPORA LE MOTEUR DE LA CROISSANCE SÉNÉGALAISE
Ousmane Sonko en Italie : Quand la diaspora devient un pilier du projet national 
GESTION DES RISQUES : REFERENTIEL NOUVEAU POUR LE CONTROLE INTERNE DANS LES ENTITES PARAPUBLIQUES
Marchés agricoles : Entre autosuffisance et spéculation, l’ARM face à ses défis
PASTEF : Entre négligence de sa jeunesse et l’oubli de certains militants
Santé au Sénégal : Un droit bafoué, une urgence ignorée
Les Chroniques de la participation citoyenne : Pour une administration de mérite et de compétence, loin de la kleptocratie
UNE ETAPE CRUCIALE VERS UNE REDEVABILITE PLEINE ET ENTIERE
La CHINE, le Sud émerge avec le vent d’Est