Publié le 22 Jul 2013 - 17:25
YANKHOBA DIATTARA, REWMI

“Pourquoi Idrissa Seck ne peut pas perdre Thiès”

 

La bataille politique qui se mène à Thiès à quelques mois des élections locales s'est transposée à la Mairie de la cité du Rail. Accusé de vouloir dilapider les ressources foncières à la ville, préparer les élections locales, le premier adjoint au maire de la ville de Thiès Yankhoba Diattara n’a pas fait dans la langue de bois. Il explique que la gestion du foncier par les collectivités locales, surtout les communes, est une gestion partagée avec les services de l’Etat. Yankhoba Diattara en profite pour recadrer ses détracteurs et pense que toute cette frénésie a des dessous politiques.

Le conseil municipal a malgré tout tenu sa dernière délibération. Peut-on savoir ce qui a été décidé lors de cette rencontre entre élus... ?

Le conseil municipal de la ville de Thiès s’est réuni en session ordinaire le 13 juillet passé sur décision du bureau municipal avec comme ordre du jour 5 points. Le premier point était relatif au vote d’un projet de délibération portant acceptation du fonds de concours qui s’élève à 10 millions. Le projet de délibération portait sur le fonds de dotation de la décentralisation qui s’élevait à 100 millions et qui sont destinés à la Santé, à l’Education, à la Jeunesse, au Sport et autres. Et le troisième point de l’ordre du jour était relatif à un virement de crédit qui portait sur 58 millions. C’est pour renforcer certaines rubriques du budget, surtout pour ce qui est lié aux salaires du personnel ainsi que les recrutements suite au départ à la retraite l’année prochaine de 29 agents. Il y avait également un quatrième point qui était lié à l’acceptation par le conseil municipal de la décision du gouvernement d’élargir les limites communales de la ville de Thiès. Et enfin le cinquième point portait sur l’autorisation du maire de la ville de Thiès de verser la contrepartie de la ville de Thiès dans le projet de réhabilitation et de construction des postes de santé financé par l’association des maires francophones (AMF) à hauteur de 125 millions. La ville de Thiès devrait contribuer à hauteur de 25 millions. Et il fallait avoir le quitus du conseil municipal pour que le maire puisse prendre la décision de reverser une contrepartie. C’était en résumé les 5 points de l’ordre du jour du conseil qui a été proposé par le bureau municipal en sa séance du 24 juin 2013 pour une délibération du conseil en session ordinaire le 13 juillet dernier.

Lors de la rencontre, vous avez été accueilli bruyamment par certains conseillers municipaux. Pourquoi autant d’agitations sur votre gestion ?

Simplement parce qu’il y a des prétendants au poste de maire qui, au lieu d’attendre les élections pour mener une campagne saine et responsable, préfèrent faire dans la violence. Ils veulent, malheureusement, par la violence, s’attaquer à nous. Mais c’est peine perdue parce que par la violence, on peut répondre par la violence. On a décidé par des actes responsables, républicains et citoyens gérer la mairie. Nous savons que c'est parce qu'ils sont très minoritaires, qu'ils utilisent la violence. Le conseil municipal de la ville de Thiès compte à peu près 76 conseillers mais ceux qui s’agitent ne sont que 6. Ce ne sont pas 6 conseillers qui pourront nous empêcher de faire ce que nous avons à faire. Ils ne peuvent pas empêcher la tenue du conseil municipal. Ils ne peuvent pas s’opposer à nos décisions. Et ils ne peuvent pas s’opposer à ce que nous faisons sur le plan politique... Cela est clair à notre niveau...

Ils vous accusent surtout de vouloir dilapider les ressources foncières de la ville de Thiès à la veille des élections locales.

Mais Attendez ! Ce qu’ils ne savent pas, c’est que la gestion du foncier par les collectivités locales, surtout les communes, est une gestion partagée avec les services de l’Etat. Aucun maire, je dis bien, aucun maire, n’a la possibilité de faire ce qu’il veut avec le foncier. Ce n’est pas possible. Le foncier est géré de manière collégiale surtout au niveau des communes. Au niveau des communautés rurales, peut-être, le président de la communauté rurale (Pcr) a une plus grande marge de manoeuvre, plus de possibilités que le maire. La responsabilité dans la gestion foncière est encadrée. On a mis aux basques du maire tous les chefs de services techniques déconcentrés de l’Etat. Ils sont membres de droit et même les délégués de quartiers lotis sont dedans. Si un maire ne respecte pas les règles, il le fait à ses risques et périls. C’est pourquoi quand les gens tiennent ce genre de discours, je rigole parce que ce n’est pas la vérité.

Qu’est-ce qui vous oppose réellement au collectif dit des ''Elus locaux pour la bonne gouvernance'' ?

C’est tout simplement qu’il y a une différence d’approche. Leur approche de la gestion municipale est une approche de partage de ressources comme des dividendes. Or, je leur ai dit que ces anciennes pratiques sont révolues avec moi. Moi, je dis oui, s’il y a des opportunités, il faut quand même que tout le monde en profite, mais pas en lésant les Thiessois. C’est principalement ce qui m’oppose à eux. Depuis des années, ils parlent de la gestion foncière mais je leur ai toujours dit que vous ne verrez pas à Thiès la plus petite parcelle qui a été attribuée par Diattara. Vous ne le verrez jamais. Tout est fait dans les règles de l’art. Tout est fait dans le cadre d’une commission composée de gens responsables. Ils m’accusent d’avoir donné des terrains à des parents, mais ils ont été les premiers bénéficiaires de parcelles à Thiès. Ils en avaient bénéficié dans l’ancienne gestion et depuis que je suis là, ils ont été les premiers à bénéficier de terrains parce que simplement j’ai pensé que c’étaient des conseillers qu’il fallait aider. Eh bien j’ai proposé à la commission qui a accepté d’aider un peu les conseillers municipaux de la ville de Thiès. Mais en principe, ils n’en avaient même pas droit. Idrissa Seck a toujours refusé qu’on accorde des terrains aux conseillers mais je l'ai convaincu que ce sont des gens qui sont dans le besoin, qu'il faut les aider en restant dans le cadre de la loi... J’ai vu qu’ils ont publié une liste dans la presse disant telle personne est liée à Diattara... Il y a des gens que je ne connais même pas sur la liste. Ils essayent de voir s’il y a un Faye parce que ma mère est sérère ; ils font le lien en disant que c’est un cousin. Si c’est un Bambara ou un Soninké, comme je suis sarakholé, ils disent que c’est un cousin. C'est de la comédie pure et simple. Ce que je peux dire, c'est que le seul terrain qu’on m’a offert sur la zone industrielle, je l’ai offert à ma femme et je l’ai reconnu...

D’où sort donc l’idée du lotissement que vous auriez fait ? Pas de la cuisse de Jupiter quand même ?

Le lotissement a été initié sur recommandation des populations de Thionakh Peulh et c’est celui qui a été autorisé. Quand les populations de Thionakh sont venues par le biais du délégué, elles m’ont dit : ''Les populations Peulh sont en train de morceler notre réserve, il faut nous aider.'' Je leur ai dit clairement : ''Si vous vous entendez, si vous êtes d’accord pour qu’on fasse le lotissement, vous me le dites.'' Ils ont dit qu’ils ont recensé et qu’ils étaient d’accord. J’ai demandé au Préfet qu’on envoie la commission de recensement. Cette commission est allée sur le terrain avec les délégués de quartiers qui l'ont accompagnée pour faire le recensement. C’est à l’issue de ce recensement que le projet a été initié. Après, on l’a fait passer en commission régionale d’urbanisme. Approuvé. On l’a envoyé au ministère de l’Urbanisme pour approbation. Et c’est le ministère qui a le dernier mot. Maintenant après l’approbation, ce qu’il faut, c’est engager les négociations avec les populations pour qu’il n’y ait pas de malentendus sur le nombre de terrains à donner aux populations. Si tout est bouclé, on peut penser à des attributions. Mais moi, j’ai dit clairement que tant qu’il n’y a pas d’entente avec les populations, je ne convoquerai pas la commission pour attribution. Donc s’il y avait une course vers les attributions, je l’aurais faite ; on m’a autorisé ce lotissement depuis septembre 2012. Mais malgré ça, je ne l'ai pas attribué. (Il montre des documents de preuves à l’appui). Vous avez ici tous les éléments de preuves.

Pensez-vous avoir fait suffisamment de réalisations pour prétendre à un autre mandat ?

L’équipe qui est là a fait un mandat très positif. J’ai vu les gens essayer de récupérer nos chantiers. Imaginez une mairie comme Thiès qui n’a même pas 2 milliards de budget mais qui réussit grâce à ses partenaires à réaliser 2 milliards d’investissements sur les routes. Ce n’est pas donné à n’importe quelle municipalité. Et c’est grâce à la confiance que nous avons de nos partenaires au développement. Ce sont les bailleurs par le biais de l’Agence de développement municipale et la Banque mondiale qui nous ont appuyés à hauteur de 3 milliards de francs Cfa. On a fait plus de 10 km de routes et ces routes sont des références à Thiès. Elles ont trois composantes, la voirie, l’assainissement et l’éclairage public. Nous allons bientôt procéder aux inaugurations. J’ai entendu les gens de l’Apr,Thierno Alassane Sall, parler de leur bout de route de Diakhao qu’ils ont fait et qui ne fait même pas 1 km, faire un tintamarre là-dessus alors que nous, nous avons fait plus de 10 km de route à Thiès. C’est pour dire que sur ce plan, les Thiessois savent. Il faut faire le tour de la ville pour demander ce que les Thiessois pensent de notre gestion. Avec l’appui des bailleurs, on a investi 3,2 milliards. Et sur fonds propres de la mairie, chaque année on a mis à peu près 300 millions. Sur cinq années, cela fait 1,5 milliard Cfa. C’est pour dire qu'au total, sur les 5 ans on aura investi 5 milliards de réalisations à Thiès.

Vous n'allez quand même pas dire qu'il n'y a aucun chat à fouetter après tout ce bruit…

Je vais vous dire, il y a deux choses qui les préoccupent. Ils essayent de cannibaliser le bilan de la mairie qui est très positif. En même temps, politiquement, ils veulent me descendre parce qu’ils savent que sur le plan politique, si on va en compétition, ils vont être laminés. L’un d’entre eux est venu me menacer. C’est un chantage. Il est venu me dire : ''Si tu ne veux pas que la liste sorte, il faut retirer ta candidature du poste de Secrétaire général de la commune d’arrondissement Thiès Ouest.'' Idrissa Seck a demandé qu’on vende les cartes, qu’on organise des élections internes pour définir les probables maires. Mais comme ils savent que je les dépasse de loin sur le plan de montages des secteurs, il m’a clairement proposé de retirer ma candidature. Il a dit partout qu’il est candidat, qu’il est le futur maire ; or il n’a même pas trois secteurs. Je lui ai dit : publie tout ce que tu veux et que tu as et va te faire f... Excusez-moi du terme. Mais je lui ai dit ça et mieux, je lui ai dit : ''Tu ne mérites pas que je te rencontre. J’ai dit à l’ami qui a facilité la rencontre que n'eût été lui, on allait en venir aux mains.''

A qui faites-vous donc allusion ?

Mais c’est Ibrahima Ba. Il m’a dit : ''Tu retires ta candidature ou je publie la liste''. Je lui ai dit : ''Publie ce que tu veux...''

Comment Idrissa Seck apprécie-t-il cette situation ?

Idrissa Seck avait fait une déclaration disant que s’il perdait Thiès, il allait laisser tomber la politique. Mais Idrissa Seck ne perdra jamais Thiès parce que les Thiessois le portent dans leur coeur. Idrissa ne prétend à rien, il est au-dessus de ces contingences. C’est sur nous, les prétendants, qu’on tire. Il ne vise rien d'autre que la Présidence. Mais en même temps, il sait que sa base affective ne le lâchera jamais. Ce n’est pas nos petites querelles-là qui feront perdre Thiès. Jamais ! Les

Thiessois savent faire la différence. Maintenant par rapport à la mairie aujourd’hui, ces gens-là savent que celui qui est considéré comme le mieux placé pour succéder à Idrissa, c’est Diattara. Donc feu sur Diattara ! C’est de la politique, rien d’autre que de la politique.

Serez-vous le candidat de Rewmi lors des élections locales ?

Sourire au coin des lèvres... Ce n’est même pas sûr que je sois conseiller municipal à la prochaine équipe. Je suis en train vraiment de réfléchir. Moi ce qui m’intéresse, c’est l’équipe qui va être mise en place, pour qu'elle soit une équipe de qualité...Nous avons acquis assez d’expérience pour pouvoir faire un bon choix.

Donc le Rewmi n’a toujours pas de candidat

Non. Ce n’est pas en fait que le Rewmi n’a toujours pas de candidat. Ma conviction, c’est que Thiès a besoin d’Idrissa Seck comme maire. Il a déclaré que ça ne l’intéressait plus. Maintenant il a accepté d’être dans le conseil et on y travaille. L’autre aspect, c’est qu’au-delà des individualités, c'est sur des équipes qu’il faut travailler. J’ai toujours pensé qu’au lieu de réfléchir en termes de candidat individuel et personnel, il faut être dans une dynamique de groupe. Et nous y travaillons.

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