Publié le 18 Jul 2012 - 19:32
AFFAIRE DANGOTE

Les héritiers de Serigne Saliou obtiennent gain de cause

 

La justice sénégalaise a tranché en faveur des héritiers de feu Serigne Saliou dans le procès qui les opposait à la première fortune d'Afrique, en l'occurrence, Aliko Dangote. Le géant nigérian voulait implanter sa cimenterie sur les terres du défunt khalife. La cour d'Appel a ordonné son expulsion et le paiement de 800 millions de dommages.

 

 

En tranchant en faveur de la famille de l'ancien khalife général des mourides feu Serigne Saliou, dans le procès en appel qui l'opposait au milliardaire nigérian Aliko Dangote, la Cour d'Appel de Dakar vient de mettre fin à un long feuilleton judiciaire qui a longtemps tenu en haleine la famille mouride. Hier, le tribunal a ordonné l'expulsion de Dangote des terres de Pout et au paiement de 800 millions de dommages qui constituent une astreinte de 1 million par jour faite depuis 2010. Selon, Me Cheikh Fall, l'un des avocats de la famille, la cour d'Appel n'a fait que ''dire le droit'' en permettant que le domaine qui appartenait à Serigne Saliou de son vivant, revienne à ses héritiers, à sa mort.

 

Dans un premier temps le tribunal avait indiqué que le terrain relevait du ''domaine forestier de l'État'' et ne pouvait en aucun cas être transmis après décès, ''alors que c'est faux'', martèle l'avocat. ''La loi dit que tous les biens issus de la succession qui appartenaient au défunt de son vivant sont transmissibles aux héritiers. D'autant plus que sur le terrain, les héritiers avaient déjà fait des aménagements'', dira-t-il. Même si l'autre partie a la possibilité de se pourvoir en cassation, Me Fall indique que ''le pourvoi n'est pas suspensif''. ''Cela ne peut pas nous empêcher d'exécuter la décision'', dit-il. Les héritiers n'attendent que d'entrer en possession de l'arrêt de la cour d'Appel pour exécuter la décision.

 

Et pourtant, que de surprises et de fureur dans ce feuilleton judiciaire à rebondissements. En effet, dès le 30 juin 2010, les héritiers de feu Serigne Saliou servent à Dangote une assignation en expulsion devant le Tribunal de Thiès. Car, sept mois après le rappel à Dieu de Serigne Saliou, survenu le 28 décembre 2007, une lettre datée de juillet 2008 octroie une portion de 124 hectares à la société Dangote, sur les 942 hectares que le défunt khalife a légué à ses héritiers, dans cette forêt de Pout. L’audience est fixée au 15 juillet 2010. La cimenterie est condamnée, le 26 août 2010 par une ordonnance en référé, à l’arrêt immédiat des travaux entamés sur les 124 hectares qu’elle occupe dans l'emprise de feu Serigne Saliou Mbacké.

 

Cependant, en juin 2011, les héritiers sont déboutés par le Tribunal régional de Thiès de toutes leurs demandes. Le Tribunal se fonde sur l'article 19 du Code du domaine de l’État pour légaliser l'empiétement sur les terres attribuées à feu Serigne Saliou Mbacké. Sous l'éclairage de cette article, il s'avère que le défunt khalife aurait dû procéder à l'immatriculation des 942 hectares de la forêt de Pout qui lui avaient été attribuées par les autorités étatiques. Ce qui n'a pas été fait. Considérant que le terrain concerné n'est pas tombé dans le domaine privé, les héritiers ne pouvaient donc avoir ''qu'un simple droit d'usage, précaire et révocable à tout moment'', avance-t-on.

 

À partir de ce moment, la famille de feu Serigne Saliou prépare soigneusement un recours en appel, en s'appuyant sur le rapport d’expertise du chef de service de cadastre de Thiès, daté du 11 mars 2011. Le document conclue que Dangote a fait un empiétement, une occupation irrégulière constitutif d’une faute, d’après l’article 119 du Code des obligations civiles et commerciales (Cocc).

Toutefois, jugeant que le terrain en question relève du domaine public, le tribunal déclare que seul l’État peut expulser l’entreprise de Dangote de l’espace qu’elle occupe sur le site.

 

Gaston COLY

 

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