Publié le 1 Dec 2020 - 20:36
AFFAIRE DES ORYX

Abdou Karim Sall ’’ clôt’’ le débat

 

Le ministère de l’Environnement et du Développement durable bénéficie pour l’année 2021, d’un budget de près de 44 milliards de francs contre 25 milliards en 2020. Toutefois, à l’occasion du vote de ce budget, les députés ont exigé des réponses quant au transfert des oryx, la multiplication des feux de brousse. Ils ont insisté sur la nécessité d’équiper davantage les agents des Eaux et forêts.

 

Sans surprise, l’hémicycle a profité de la plénière d’hier pour demander au ministre Abdou Karim Sall les tenants et aboutissants de l’affaire des gazelles oryx. Au mois de juillet 2020, le transfert de six d’entre-elles dans une réserve privée a occasionné la mort de deux sujets. L’honorable Mamadou Lamine Diallo fait savoir : ‘’Je doute fort de votre conscience environnementale, parce que les gazelles oryx n’appartiennent plus à l’Etat, depuis la Constitution de 2016. C’est une ressource qui appartient au peuple’’. Son collègue Serigne Mbacké Seck soutient qu’Abdou Karim Sall a perdu la confiance des Sénégalais, car ne sachant faire la différence entre ce qui lui appartient et ce qui appartient au peuple sénégalais. Sur les 585 gazelles oryx que compte le Sénégal, 150 sont actuellement dans les réserves privées de Bandia et de Fatala. Neuf sites au total ont été réquisitionnés (Guembeul, Katané, Parc zoologique de Hann, un site de gestion communautaire et cinq réserves privées).

‘’Je suis très à l’aise sur cette question pour la simple raison qu’il n’y a rien d’irrégulier, rien d’illégal, engageant ma responsabilité. Le ministre en charge de l’Environnement que je suis ne peut pas souhaiter la mort d’une souris, à plus forte raison d’une antilope. Cependant, il est fort regrettable de constater des pertes à l’occasion de la translocation, même si l’Union internationale de la conservation reconnaît que le risque zéro n’existe pas dans de telles opérations. Le Sénégal possède le plus grand effectif d’oryx en milieu naturel au monde. Grâce au Sénégal, la Mauritanie est en train de reconstituer sa population d’oryx. Pour les espèces éteintes à l’état sauvage, la reconstitution des effectifs passe forcément par des élevages en milieu contrôlé. C’est cette politique que le ministère applique’’, explique le ministre de l’Environnement. Qui fait savoir que les Sénégalais peuvent, s’ils le désirent, élever des gazelles oryx.

Tout part d’une procédure d’éligibilité en termes d’espace. ‘’Tout Sénégalais, renchérit-il, qui est capable de nous aider et de nous accompagner dans cette dynamique est le bienvenu et nous sommes dans les dispositions d’étudier sa demande, en vue de mettre à sa disposition ces antilopes’’.

Il ajoute que les éclaircissements de l’Union international de la conservation de la nature (UICN) clôt un débat ‘’qui a été soulevé avec autant d’émotions’’. Dans ce document écrit répondant aux questions du Forum civil, on précise que ‘’s’il était question de translocation internationale, le pays devrait appliquer les conventions internationales auxquelles il a adhéré, mais ce n’est pas le cas, puisqu’il est question ici de translocation à l’intérieur du territoire national. Concernant la destination des animaux à l’intérieur du territoire national, chaque pays est souverain, conformément à son cadre légal’’. Abdou Karim Sall se demande d’ailleurs pourquoi ‘’curieusement’’ le Forum civil n’a pas rendu public cette réponse de l’UICN.

Ainsi, c’est face à des contraintes managériales, écologiques et sociales quant à la gestion des 585 sujets qu’est intervenu ce transfert. L’UICN considère de ce fait que ‘’le Sénégal a été victime de son succès’’, car au départ il n’en comptait que huit.

L’épineuse question des feux de brousse   

Après un hivernage satisfaisant, les feux de brousse font aujourd’hui des ravages. Un fait qui inquiète plus d’un député. Selon Aida Cissokho, ‘’il faut des mesures fortes pour maîtriser les dégâts qui peuvent en découler’’. Du 16 au 23 novembre, 57 cas de feux de brousse ont été enregistrés pour une superficie globale brûlée de 5 160 hectares dans les régions de Matam, Louga, Saint-Louis, Kaffrine, Thiès, Fatick et Kaolack. A ce jour, le Sénégal a connu 147 cas de feux de brousse sur une superficie brûlée globale de 14 570 hectares contre 19, 899 hectares, à la même période de l’année dernière. ‘’Vous comprendrez aisément la difficulté de la tâche. Nos équipes sont en état d’alerte maximum pour pouvoir contenir ces feux de brousse. Cette pluviométrie excédentaire partout au Sénégal s’est traduit par la formation d’un tapis herbacé beaucoup plus important que les années précédentes. Dans certains endroits du pays, nous avons noté plus de 5000 Kg de matière sèche à l’hectare. Donc très tôt, nous avons mis en alerte nos équipes et prépositionné le matériel de lutte aux endroits les plus sensibles et les plus vulnérables’’, fait savoir le ministre Sall.

Si l’hémicycle s’accorde sur le fait que le reboisement est aujourd’hui plus qu’une nécessité, ses membres déplorent toutefois le manque de suivi. ‘’De l’argent jeté par la fenêtre’’, déplore Aliou Kébé. Les élus proposent une valorisation des forêts en espace touristique. Tout comme l’honorable Aida Cissokho, beaucoup d’élus locaux pensent que le reboisement peut être source d’activité économique en plus d’un bénéfice dans le domaine de l’alimentation. Pour ce faire, il va falloir planter des arbres fruitiers ou ceux dont les plantes entrent dans le cadre de la pharmacopée. Par ailleurs, les députés jugent impératif de renforcer les moyens et les conditions de travail des agents forestiers. Ces derniers qui parfois protègent la forêt au prix de leur vie.

‘’Nous ne pouvons pas avoir des forêts comme la France, tant que nous n’arriverons pas à lutter contre la déforestation. Les agents forestiers ont besoin de moyens, ils sont en petits nombres, mal équipés sur de grandes superficies à protéger. Je félicite la direction, parce qu’elle est en train de faire un grand travail. Trouvons des mécanismes pour que les collectivités locales recrutent des jeunes pour garder les forêts. Nous sommes prêts à travailler avec vous’’, a lancé Ibrahima Baba Sall. Une convention entre les collectivités locales et le département des Eaux et forêts serait salutaire pour la préservation des forêts, propose Mamadou Mame Diop. De l’avis de Cheikh Seck, ‘’ces gens sont démunis, ils doivent avoir un fonds commun’’. Ce corps doit être rendu ‘’plus attractif’’, à en croire les députés, si l’on veut y attirer la jeunesse sénégalaise.

 Selon le ministre, le recrutement de 600 agents est prévu, d’ici 2022, dont 200 ont déjà été recrutés ; 55 en cours et 200 le seront en début 2021. La tutelle prévoit, également, le renforcement des équipements de lutte contre les feux de brousse. Quant à la pollution notée dans la localité de Khondio, Abdou Karim Sall annonce une délocalisation en cours en accord avec les Industries chimiques du Sénégal.

Marigot de Mbao

Le drainage du marigot de Mbao et la gestion de décharge de Mbeubeuss n’ont pas échappé aux recommandations des élus locaux. ‘’Mbeubeuss une poudrière, c’est une bombe à retardement, cela, sans compter la pression faite actuellement sur la grande Niaye qui risque d’exploser’’, analyse l’honorable Cheikh Seck.  

‘’Les sachets plastiques sont toujours vendus dans les boutiques. Quand on vote des lois, il faut les exécuter, c’est à cela que servent les lois’’, martèle, pour sa part, la députée Awa Niang qui regrette de ne voir aucun changement, depuis le vote de la loi sur le plastique. Mais à en croire la tutelle, d’ici six mois, les Sénégalais devraient voir les résultats de l’application de la loi sur le plastique. Abdou Karim Sall envisage de corser son plan d’action. ‘’65 tonnes d’emballages plastiques ont été saisies. Nous comptons multiplier les patrouilles. Dans les semaines à venir, nous ne nous limiterons pas à la saisie des produits prohibés, mais à faire appliquer les sanctions prévues par la loi’’.  

EMMANUELLA MARAME FAYE

 

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