Des responsables de Pastef Kaolack et Kaffrine prédisent l’échec du pouvoir

Depuis l'accession du président Bassirou Diomaye Faye à la magistrature suprême, la colère enfle chez les partisans du Pastef au pouvoir, qui dénoncent l'omission de responsables et militants de première heure dans les nominations. Après un an d'exercice du pouvoir, l'alerte a été lancée par Pastef Kaolack et Kaffrine sur un échec inévitable de la politique du régime qui a préféré gouverner avec des adversaires politiques maintenus à des postes stratégiques.
De la frustration : c’est le sentiment qui semble le mieux partagé au sein du parti au pouvoir à Kaolack et Kaffrine. La cause est désormais un secret de polichinelle.
En effet, dès l'accession au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye, les partisans du Pastef avaient marmonné le fait que des postes clés soient gérés par l'opposition. Une attitude compréhensible pour certains, puisque les nouvelles autorités venaient juste de remporter la Présidentielle.
Cependant, un an après l’accession à la magistrature suprême, ce qui se murmurait dans les couloirs, éclate au grand jour. Dans les régions de Kaolack et de Kaffrine, où le score de la Présidentielle de 2024 a été sans précédent, les militants et responsables du Pastef haussent le ton et alertent sur ‘’le danger qui guette les tenants du pouvoir qui ont opté pour la cohabitation avec des adversaires politiques de la première heure’’.
La lassitude a atteint un degré tel, que le camp du pouvoir, notamment ceux qui se sont investis corps et âme pour le triomphe le Pastef ne cachent plus leur colère et ne filent pas de gants pour dire au président de la République et à son Premier ministre qu'il est temps de changer de fusil d’épaule avant que l'irréparable ne se produise. Surtout à l'approche des élections locales. Mamadou Lamine Mbow, coordonnateur départemental de la coalition DiomayePrésident de Nioro du Rip ouvre le bal.
Connu pour son engagement aux côtés des responsables et militants de la zone, il se dit déçu et inquiet. Son inquiétude est qu’"à l’approche des prochaines élections locales, la base est toujours conquise par l'opposition en termes d'occupation de postes stratégiques à Kaolack et dans d'autres instances. Ce qui va certainement impacter les résultats du scrutin en faveur du camp adverse".
Le coordonnateur du Pastef/Keur Madiabel dit craindre que l'engagement des populations auprès du président et de son chef du gouvernement s’effrite.
Des élections perdues d’avance
D'après lui, "les populations se cotisaient pour battre campagne et animer la coalition, et surtout le parti au niveau de la base depuis la naissance du Pastef. Celles-ci ne voulaient que du changement et n'attendaient, comme des millions de Sénégalais ayant cru au projet ‘pastéfien’, rien des autorités’’. Seulement, dit-il, il faut que les dirigeants comprennent que les militants auront du mal à encore mettre la main à la poche pour une quelconque victoire ou animation du Pastef sans leur l'appui.
Selon M. Mbow, la volonté est toujours là, mais au regard des nominations au détriment des responsables et militants de la première heure, le moral des troupes est brisé. Ce qui est grave à son avis, surtout après un an de règne, que des postes clés aussi bien au niveau local que national restent aux mains d’opposants au moment où ceux qui se sont engagés aux côtés du Pastef sont laissés à leur triste sort.
Mamadou Lamine Mbow dit se perdre, "car l'opposition va profiter de sa position au niveau des instances de décision pour saboter le travail des nouvelles autorités".
Il indique que son souhait est que l'histoire retienne que lui et tant d’autres militants ont participé à la construction du pays. Hélas, M. Mbow regrette que cette opportunité soit en train de leur filer entre les doigts, si le palais n'intervient pas.
Pour nous convaincre, il a rappelé les propos d'Ousmane Sonko, pour qui "ceux qui sont dans l'opposition jusqu'à la Présidentielle y restent après la prise du pouvoir". Un principe qui devrait être appliqué, si l’on veut assurer le développement socioéconomique de notre cher pays en ce sens que les ‘’ennemis du régime pourront tout mettre en œuvre pour empêcher sa réussite au moment où les Sénégalais lambda et ceux qui appartiennent au Pastef n'attendent que d’être placés à des postes pour travailler afin d’aider le pouvoir à respecter ses engagements vis-à-vis des populations’’.
Les maires de Dya et de Dabaly, farouches opposants au régime, toujours en poste
En donnant des exemples, certains responsables du Pastef interpellés ont pointé deux noms. Il s’agit de Samba Sall, maire de Dabaly, nommé sous Macky Sall président du Conseil de surveillance de l’Agence nationale de l’état civil (Anec), et de Tamsir Guèye, l’édile de Dya, directeur de l'Administration générale et de l'équipement (Dage) au ministère du Travail. Ces deux grosses pointures de l'opposition dans le Saloum, rappellent nos interlocuteurs, ont tout fait pour empêcher l'élection du président Diomaye Faye. Le premier nommé a même été l’initiateur du mouvement Macky Encore, appuyant la thèse du troisième mandat de l’ancien président.
D’autres réactions semblent confirmer ce qui est dit plus haut, comme celle de Mansour Cissé, proche collaborateur du député Samba Dang, coordonnateur départemental du parti à Mbirkilane. Selon lui, lors de la visite du président de la République à Kaolack, celui-ci avait soutenu qu’il ne peut pas couper des têtes au niveau local, car n’ayant pas de temps avec son calendrier très chargé et que ni lui ni son Premier ministre Ousmane Sonko ne sauront démettre des opposants à leur poste, faute de temps.
Dès lors, le chef de l'État avait demandé, dit-il, aux responsables de la base de lister les membres de l'opposition occupant des postes au niveau local et de les lui faire parvenir avec des profils adéquats aux postes pour les remplacer. Seulement, "il n’y a personne pour réceptionner le travail demandé par le président qui n’a désigné personne. Ce qui fait que les responsables locaux à qui des propositions ont été faites refusaient de les transmettre, prétextant que personne n’a été désigné par le chef de l’État pour réceptionner et suivre ce dossier", a expliqué M. Cissé de Mbirkilane. De plus, Mansour Cissé a déploré l’irresponsabilité des leaders départementaux du parti au pouvoir dont certains, après leur nomination, ne se soucient plus des militants qui sont laissés en rade.
C’est pourquoi, dit-il, les partisans du Pastef ne savent plus à qui s'adresser. Une situation grave à ses yeux, surtout que les élections locales se profilent à l'horizon. ‘’Il faut que cette situation change et que les bases soient renforcées financièrement et par des nominations, sinon c’est parti pour un recul de performance du Pastef", a-t-il martelé.
Il a également condamné le fait que les coordonnateurs départementaux de Kaolack n’aient pas mouillé le maillot pour accompagner les militants à la base.
Alioune Badara Diallo Kane