Publié le 5 May 2023 - 12:04
DIALOGUE NATIONAL, ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE

Vers l’implosion du duo Khalifa-Sonko au sein de YAW

 

L’ancien maire de Dakar, Khalifa Sall, qui a révélé ses intentions de répondre à la main tendue du président Macky Sall pour un dialogue politique, semble être en porte-à-faux avec son principal allié Ousmane Sonko. Une situation qui risque d'entraîner des fictions au sein de YAW et de la plateforme des forces vives de la Nation F24 qui ont largement marqué leur opposition à toute forme de rapprochement avec le pouvoir.

 

Va-t-on vers un divorce entre Ousmane Sonko et Khalifa Sall ?  Les piliers de la coalition de l’opposition Yewwi Askan Wi (YAW) ne semblent plus filer le grand amour depuis quelques semaines. Les ambitions présidentielles de tout un chacun paraissent avoir mis un coup froid entre les deux ‘’bêtes politiques’’. Les deux cultivent une certaine complicité qui transparaît à chaque rassemblement ou rencontre de Yewwi Askan Wi. Le 3 septembre 2021, date du lancement de la coalition YAW, les deux leaders assis côte à côte ne cessaient d’échanger et de se côtoyer face à la nuée de journalistes.

Cette lune de miel s’est poursuivie lors des investitures pour les élections locales et législatives. Les deux formations Taxawu Sénégal et Pastef/Les patriotes se sont taillé la part du lion lors de ces investitures.

Mais l’appel au dialogue du chef de l’État Macky Sall semble avoir refroidi des relations qui s’étaient déjà crispées entre les deux individus. Les manœuvres de Khalifa Sall dans la confection de la liste départementale de YAW pour les Locales de Dakar et l’absence de Khalifa Sall lors de divers rassemblements en soutien de Sonko dans l’affaire Mame Mbaye Niang ne furent pas trop appréciées en haut lieu du côté de Keur Maodo. Le coup de grâce, la poignée de main chaleureuse avec Macky Sall, vient démontrer un peu plus sa disposition à renouer le fil du dialogue avec le camp présidentiel.

Le patron de Benno Bokk Yaakaar qui, lors d’une interview le 22 février 2023 a laissé entendre que l’amnistie de Khalifa Sall pourrait être discutée lors de ce dialogue, a semblé défricher le terrain pour un rapprochement. 

2024, dernière chance de Khalifa Sall

Ce choix de Khalifa Sall contraste avec les positions de Pastef qui, à travers son leader, a refusé tout dialogue avec le chef de l’État. L’ancien inspecteur des impôts et domaines ne semble pas vouloir cautionner une tribune qui validerait une troisième candidature de Macky Sall et dénonce la vague d’arrestations contre les cadres de son parti.

Dans la même dynamique, le mouvement F24 a aussi indiqué son opposition à l’ouverture du dialogue politique avec le président Sall. Ils ont appelé à un rassemblement le 12 mai à la place de la Nation, afin d’exiger l’application de leur plateforme qui se résume en quatre points : non à une candidature du président Macky Sall, la libération des détenus qualifiés de ‘’politiques’’, des élections inclusives et transparentes, et la modification du Code électoral qui exclut des candidats condamnés en justice.

Pour beaucoup de spécialistes, l’enthousiasme de l’ex-responsable socialiste pour le dialogue répond à une logique purement électorale. 

Khalifa Sall, qui sera âgé de 68 ans en 2024, joue sa dernière chance d’accéder à la magistrature suprême. Le responsable politique de Grand-Yoff, qui vit dans l’espoir d’incarner une troisième voie, compte bien tirer les marrons du feu dans le duel épique entre Sonko et Macky Sall. Pour cela, il est bien décidé à monter sur le train de la Présidentielle vaille que vaille.

L’ancien premier magistrat de la ville de Dakar compte aussi sur le soutien des sympathisants socialistes pour s’offrir une base électorale. Sa tournée nationale, entamée le 14 janvier et qui l’a conduit dans divers départements comme Rufisque, Diourbel et Tambacounda, vise à consolider cet électorat. Sans oublier que son périple à l’étranger, notamment en Europe et aux États-Unis, avait aussi pour but de fédérer autour de sa candidature. La prochaine Présidentielle se jouera aussi au sein de la diaspora, qui compte plus de 500 000 électeurs (7 % de l’électorat sénégalais). 

Moussa Diaw : “Khalifa a le droit d’avoir des ambitions présidentielles et…’’

Pour sa part, Moussa Diaw, enseignant-chercheur en sciences politiques, estime qu’il se peut qu’il n’y ait pas divorce entre Sonko et Khalifa. Car la charte qui régit la coalition YAW prévoit une candidature plurielle des leaders pour la Présidentielle de 2024. ‘’Khalifa a le droit d’avoir des ambitions présidentielles et sa coalition doit lui reconnaître ce droit de se présenter. Le dialogue politique offre la possibilité de résoudre le problème d’inéligibilité de Khalifa Sall qui a sauté sur l’occasion’’, affirme-t-il.

Selon l’universitaire, cette position de Khalifa Sall n’entame en rien leur combat avec Sonko d’une éventuelle candidature de Macky Sall. ‘’Khalifa Sall a fait le choix d’aller au dialogue et Sonko a décidé de faire le contraire. L’avenir sera là pour les départager. Chacun peut apprécier  cette situation au regard de ses intérêts et des batailles de positionnement politiques”, soutient-il. 

 

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