Publié le 1 Mar 2024 - 13:30
ENQUÊTE DE LA CHAINE ALJAZEERA ET DE LA FONDATION PORCAUSA SUR LA RÉPRESSION POLICIÈRE AU SÉNÉGAL

Des unités d’élite au cœur du maintien de l’ordre

 

L’information est devenue virale sur la toile, quelques heures après sa publication par le site qatari aljazeera.com. Un titre interrogatif qui indexe les autorités sénégalaises et de l’Union européenne : Comment une force de sécurité financée par l'UE a aidé le Sénégal à écraser les manifestations en faveur de la démocratie ?

 

C’est un détournement d’objectif, d’après cette enquête documentée par Aljazeera et la fondation porCausa. Cette recherche des confrères relève que le gouvernement sénégalais a déployé une unité spéciale de lutte contre le terrorisme, le Groupe d'action rapide de surveillance et d'intervention (Gar-Si), créée, équipée et formée grâce à un financement de l'Union européenne, pour réprimer violemment les récentes manifestations démocratiques.

C’est à partir d’une vidéo exploitée et des documents confidentiels que cette affaire a éclaté. Le duo a obtenu des preuves visuelles, des contrats du gouvernement espagnol, un rapport d'évaluation confidentiel et des témoignages de multiples sources suggérant que cette unité spéciale, financée par l'UE, a été utilisée pour faire du maintien de l’ordre.

Dans une vidéo, on voit des agents de sécurité dans le même type de véhicules blindés que ceux achetés par l'UE pour le Gar-Si Sénégal tirer des gaz lacrymogènes sur une caravane de protestation organisée par Sonko en mai dernier, alors que ce dernier effectuait sa ‘’marche patriotique sur Dakar’’. La chaine qatarie Al Jazeera a vérifié que l'incident s'est produit dans le village de Mampatim, dans le sud du Sénégal, à environ 50 km de Kolda, dans la région de Casamance.

Là où le bât blesse, c’est que ces éléments devraient jouer un rôle central dans la prévention de possibles infiltrations terroristes au Sénégal depuis le Mali et la Mauritanie, mais en aucun cas il était prévu qu’ils interviennent dans la gestion de crises politiques contre des civils.

Selon la même source, les unités d'élite financées par l'UE devaient plutôt être basées dans les zones frontalières du Sénégal avec le Mali pour lutter contre la criminalité transfrontalière.

C’est la Fondation internationale et ibéro-américaine pour l'administration et les politiques publiques (Fiiapp), une agence de développement appartenant au ministère espagnol des Affaires étrangères, qui a mis en œuvre ce projet sécuritaire.

Ce n’est pas la première fois que de telles accusations sont portées à l’encontre du gouvernement sénégalais. Beaucoup d’observateurs ont déploré une militarisation du maintien de l’ordre, avec comme principale conséquence une exacerbation de la violence extrême.

Ainsi, la mobilisation des forces d’élite du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) et de la Brigade d’intervention polyvalente (Bip) est devenue monnaie courante, lors de manifestations de l’opposition.

Beaucoup d’observateurs (journalistes et acteurs politiques) ont dénoncé l’usage des grenades assourdissantes utilisées par les forces de l'ordre au cours des dernières manifestations en début février 2024. Ces munitions peuvent même mutiler les civils ou créer d’autres dégâts, à en croire les défenseurs des Droits de l’homme. La France était le dernier pays de l’Union européenne à utiliser ces grenades au cours des événements des Gilets jaunes, alors qu’elle continue de les fournir au Sénégal et à d’autres pays, dans le cadre du maintien de l’ordre.

Lors des événements du 16 février 2023, Ousmane Sonko a été exfiltré de son véhicule puis déposé chez lui par les forces de l’ordre (FDS). Des photos d’étrangers (Israéliens) ont inondé les réseaux sociaux. Cette police a des méthodes très dures et ne se soucie pas de la vie d’aucun manifestant présent devant elle.

Selon des sources proches des forces de l’ordre jointes par ‘’EnQuête’’, il y a bien une présence d’Israéliens et de corps étrangers dans les rangs des FDS. Ils sont recrutés par le palais pour former nos FDS en maintien de l’ordre. Ils sont arrivés après les événements de mars 2021.

Une information vite démentie par le ministre porte-parole du gouvernement, Abdou Karim Fofana, qui parle de manipulation.

Le rôle de l'Union européenne dans le soutien financier à la force de sécurité au Sénégal soulève des questions inquiétantes sur les valeurs démocratiques que l'UE prétend défendre. Alors que les manifestations en faveur de la démocratie sont réprimées et que les voix dissidentes sont étouffées. La loi d'amnistie proposée par le gouvernement pourrait empêcher de mettre la lumière sur cette affaire.

AMADOU CAMARA GUEYE

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