Publié le 23 Feb 2015 - 11:51
GROUPE CONSULTATIF DE PARIS UN AN APRÈS

La mise en œuvre des réformes, toujours une exigence

 

Un an après le groupe consultatif de Paris, qui a permis au Sénégal de lever des fonds importants pour le financement du Plan Sénégal Émergent, des réformes s’imposent pour sa réussite. C’est l’une des recommandations qui revient chaque fois avec les partenaires techniques tels que le FMI, la Banque mondiale ou les experts. Le PSE, selon d’autres, demande aussi une cohésion sociale forte.

 

23 février 2014, 23 février 2015. Un an que le Sénégal était devant les partenaires financiers de la communauté internationale et du secteur privé mondial pour trouver le financement de son Plan Sénégal Émergent. Aujourd’hui, le Sénégal continue la mobilisation des engagements de financements des bailleurs qui étaient de l’ordre de 3 729 milliards de F CFA. Déjà 26% du montant total ont été mobilisés, avait annoncé le président de la République Macky Sall, lors de la visite officielle  de la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI).

 Le Plan Sénégal Émergent intéresse tout le monde. De larges discussions sur la question ont toujours animé sa mise en œuvre. Ainsi, le colloque international des anciens élèves et auditeurs de l’ENA de France, qui s’est déroulé du 12 au 13 février à Dakar, avec comme thème : ‘’quelles voies pour l’émergence économique du Sénégal ?’’, a largement débattu sur la question réunissant diverses experts.

La question qui se pose maintenant, selon le représentant résident du FMI à Dakar, un des panélistes de ce colloque de l’ASEA, ‘’ce n’est plus quoi faire, mais comment le faire’’? La première réponse à cette question est, selon Loko Boileau, ‘’les réformes ou la mise en œuvre de ces réformes’’. Pourtant, lors de sa visite officielle à Dakar, sa patronne, la directrice générale du FMI, avait déjà appelé les autorités à aborder une ‘’masse critique’’ de réformes pour développer la croissance économique. La question des réformes est le premier défi que le Sénégal doit relever.  ‘’Pour réussir le PSE, il faut une accélération des réformes. Nous encourageons les autorités à continuer la mise en œuvre de ces réformes’’, encourage M. Loko.

‘’Pourquoi la croissance est encore faible ?’’

En outre, ces réformes seront nécessaires pour améliorer l’efficacité des investissements publics, avec notamment une meilleure sélection des projets, un plus grand appui sur des appels d’offres, ainsi qu’une gestion plus rigoureuse dans l’exécution des projets, conseille pour sa part la banque mondiale dans son dernier rapport sur le Sénégal, intitulé ‘’apprendre du passé’’.

 Le Sénégal, d’après toujours Loko Boileau, a tous les atouts ; stabilité politique, situation géographique, ressources humaines de qualité, pour réussir son émergence. Malgré tout, informe-t-il, ‘’l’investissement direct étranger ne représente que 2% du PIB’’ alors que dans des pays similaires, l’IDE représente 6 à 7% du PIB. ‘’Pourquoi l’investissement est encore faible, pourquoi la croissance est encore faible au Sénégal ? C’est l’ensemble de ces questions que le PSE devrait résoudre’’, développe-t-il. Toujours dans son intervention, lors de ce panel qui a passé en revue tous les défis qui peuvent entraver la bonne mise en œuvre du PSE, l’expert du FMI invite l’État du Sénégal à promouvoir l’investissement public contre l’investissement direct étranger. Or, la promotion de l’investissement passe par une résolution définitive de la question de l’énergie. L’électricité au Sénégal est trop chère, c’est deux fois le prix de l’électricité aux USA, renseigne-t-il. En Afrique encore, il n’y a que le Tchad qui a un coût d’électricité supérieur à celui du Sénégal.

Si des réformes sont faites à l’université, pourquoi ne pas faire la même chose avec la Senelec ? se demande l’ancien ministre du Plan, par ailleurs modérateur de cette rencontre. El Hadj Ibrahima Sall de poursuivre que chaque année, on met 150 milliards dans ce secteur en continuant d’avoir des délestages. ‘’C’est un problème de responsabilité collectif. Nous avons peur de prendre les bonnes décisions sur la Senelec parce qu’il y a un syndicat fort. Lorsqu’on veut réformer, il faut prendre des décisions dures même s’il faut aller vers un rapport de forces’’, estime l’ancien ministre sous le régime socialiste.

Le secteur de l’électricité a absorbé 1 450 milliards de F CFA de 2000 à maintenant, ce qui représente 2,5% du PIB, ajoute Loko Boileau. ‘’15 ans après, on n’a toujours pas d’électricité et c’est toujours très cher’’, dit-il. Pourtant, clarifie le représentant du FMI à Dakar, ‘’on ne peut pas réussir le PSE et attirer les investissements directs étrangers si un des éléments les plus demandés, l’électricité, n’est pas disponible pour toutes les couches’’. ‘’Le Sénégal n’est pas seul au monde ; si l’investissement n’est pas profitable, l’investisseur ne vient pas’’, ajoute-t-il. Plus loin, l’autre défi à relever est, d’après M. Loko, l’efficacité des dépenses d’investissements. Depuis 2005-2006, les dépenses d’investissements ont connu une forte augmentation jusqu’à atteindre la barre des 14% du PIB. Malgré cela, la croissance est restée constante. Ces réformes, même si elles sont difficiles à mettre en œuvre, seront menées, avait répondu le chef du gouvernement, Mahammad Boun Abdallah Dionne.

Plus faible taux de croissance dans l’UEMOA

La Banque mondiale, dans son dernier rapport, se veut plus claire. ‘’Le Sénégal a connu le plus haut niveau d’investissements publics dans l’UEMOA, mais paradoxalement, il a affiché l’un des plus faibles taux de croissance du PIB’’, informe la BM dans son dernier rapport. Pour renverser cette tendance, Loko Boileau invite à une large ‘’réflexion sur l’efficacité des dépenses d’investissements et de s’assurer que l’augmentation de ces dépenses dans le cadre du PSE correspond réellement à des dépenses d’investissements’’.

Lors de cette rencontre de l’Association des anciens élèves et auditeurs de l’ENA de France, qui a passé en loupe le Plan Sénégal Émergent, il y avait aussi l’œil du sociologue sur la réussite de ce plan. Le succès du PSE va forcément reposer sur une cohésion sociale forte, a analysé le sociologue Djiby Diakhaté. Ce dernier est d’avis que ‘’la cohésion dans le PSE doit s’articuler autour de trois axes au moins : une cohésion autour du culte du travail, du savoir et du savoir-faire et de la bonne gouvernance ou la vertu de la gouvernance. Un ensemble de paramètres à tenir en compte pour continuer la marche de ce plan, un an après la rencontre de Paris. 

ALIOU NGAMBY NDIAYE

 

 

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