Publié le 17 Jul 2019 - 17:41
IBA DER THIAM & CIE GAGNENT LE PARI

Le Sénégal tient son Histoire générale

 

Ce n’est plus une immense gageure, mais une réalité. Le Comité de pilotage de ‘‘Histoire générale du Sénégal : des origines à nos jours’’, a remis ses cinq premiers volumes imprimés, hier, au chef de l’Etat. Il en reste vingt autres. Mais le bien est déjà fait.

 

L’œuvre paraissait gargantuesque. Le projet irréalisable. L’ambition démesurée. Heureusement, pour la postérité, une éminence grise était aux commandes, appuyée par d’autres esprits tout aussi éclairés que déterminés. Engagés à produire ce pan d’histoire revisité, réécrit, relu, compulsé, disséqué, documenté, analysé, commenté et relaté à travers le prisme des historiens locaux.  Le Sénégal tient les cinq premiers volumes imprimés de l’‘’Histoire générale du Sénégal : des origines à nos jours (Hgs)’’ dont la remise au président de la République a eu lieu hier à la salle des banquets du palais.

Iba Der Thiam, coordonnateur général du Comité de pilotage de l’Histoire générale du Sénégal, a rendu un vibrant hommage au secrétaire général du Parti socialiste (Ps), après une minute de silence bien respectée qui a inauguré la séance. Les collaborateurs ‘‘d’une rare compétence’’ à cet ouvrage, comme Ndèye Sokhna Guèye, le journaliste Moussa Paye, Yoro Fall, Séga Sy, Issa Laye Thiaw, Abdoul Sow, Aminata Diaw Cissé, Hamidou Dia et le Pr. Ibrahima Sow n’ont pas vécu longtemps pour voir les cinq premiers jets de l’’’Histoire générale du Sénégal’’ se concrétiser hier. Le moment était solennel, quand le professeur Iba Der Thiam appela sur le présidium les historiens Buuba Diop et Aboubacry Moussa Lam, ayant codirigés le Volume 3 du Tome I intitulé : ‘‘Sénégal Ancien III.  Période ancienne. Antiquité - Egyptologie. Origines, Héritages matériels et immatériels des civilisations sénégambiennes’’, remettre le ‘‘bébé’’ au président Macky Sall.  Il reste 20 autres volumes à produire et le Pr. Thiam et ses équipes se sont engagés à en publier cinq par an, afin que le travail coïncide avec la fin du mandat de Macky Sall.

Ces œuvres vont couvrir un large spectre temporel de 350 000 ans, tenant en compte toutefois des interconnexions et des interférences avec une partie des pays voisins, une partie du Soudan et même une partie de l’Aof et de l’Aef, sans compter certaines des colonies anglophones adossées à la façade Atlantique. ‘‘L’Histoire générale du Sénégal : des origines à nos jours’’, devrait être traduite dans les langues nationales ainsi qu’en anglais, va disposer d’une version abrégée à l’usage des écoles primaires, collèges et lycées de la République, ainsi que d’une version numérique qui s’inscrira dans les options du gouvernement.

‘‘Notre peuple a une histoire. Une grande et belle histoire qui peut constituer, pour notre présent et pour notre avenir, une source inépuisable de valeurs et de références dans lesquelles les générations actuelles et futures trouveront, dans les moments de défi et de doute, des réponses aux questions qu’elles se posent’’, a avancé le Pr. Thiam.

Macky Sall : ‘‘Il nous faut aussi revisiter le contenu de nos programmes scolaire et universitaire.’’

Dans le sillage de ces cinq premiers volumes, le Pr. Thiam est à pied d’œuvre pour une encyclopédie ainsi qu’un dictionnaire sur le Sénégal dont il a déjà constitué les équipes. Le président de la République, qui a pris l’engagement personnel de lire tous les livres, en tant que féru d’histoire, s’est appesanti sur le côté utilitaire de ce grand projet. ‘‘Ce n’est pas qu’une affaire d’élites. Il faut traduire ces œuvres en langues nationales et les vulgariser dans les médias pour expliquer au peuple son histoire vraie’’, a-t-il avancé.

Mieux, le chef de l’Etat estime que cet ouvrage collectif d’envergure devrait servir dans l’enseignement général sénégalais. ‘‘En nous appuyant sur cet outil, il nous faut aussi revisiter le contenu de nos programmes scolaire et universitaire du Sénégal. C’est bien qu’on nous apprenne Charlemagne et je ne sais qui d’autre, mais c’est l’occasion d’enseigner notre histoire dans les collèges, à l’école primaire, dans les lycées, puis les universités. C’est l’une des finalités essentielles du projet’’, a-t-il avancé.

Cet ouvrage, qui marque un tournant décisif dans l’histoire des idées au Sénégal, sera récompensé à juste titre par Macky Sall qui promet d’élever tous les membres éminents de Hgs à la plus haute distinction honorifique sénégalaise : la chancellerie de l’Ordre national du lion. Le chef de l’Etat estime que cet ouvrage incarne la continuité du travail immense de l’égyptologue Cheikh Anta Diop et les thèses négationnistes qu’il s’efforçait de combattre. A terme, estime Macky Sall, l’ouvrage va permettre de combattre les préjugés tenaces sur l’Afrique et les Africains, de vaincre le scepticisme et le négationnisme sur l’histoire africaine, et à réconcilier les peuples avec leur passé et préparer leur avenir. ‘‘Nous avons ajouté une pierre précieuse à l’édifice national’’, s’est-il félicité.

Autres projets à venir

Le comité de pilotage ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Il estime qu’il va falloir mettre en œuvre l’une des dimensions majeures de ce programme : la construction d’une base de données historique et documentaire. ‘‘Nous avons à cœur l’autonomie, la rationalisation, la sécurisation et la mutualisation de notre dispositif informatique national. C’est pourquoi nous avons voulu éviter tout double emploi, mais surtout faire en sorte que la base de données, par son architecture et son protocole, intègre aussi bien notre gouvernance numérique’’, avance le Pr. Thiam. Un data mining, processus de collecte et d'analyse de données  pour produire une information ou un scénario sur un aspect couvert par la base de données historiques, qui va déboucher sur une banque de données historiques portée par un système d'information géographique (Sig), qui donnera à l’Hgs un rôle inestimable pour l’avenir du  Sénégal.

Le professeur Thiam, lui, a déjà trouvé un nom bien domestique : Socé pour Système d'organisation des connaissances établies. Hgs prévoit également de lancer une revue trimestrielle ou semestrielle d’histoire et d’analyses politiques, économiques, sociales et culturelles, dont la mission sera de mettre à la disposition du public, des émigrés et de leurs familles, des informations concernant l’histoire de notre pays, celle de notre sous-région, de l’Afrique et du monde.  Un projet pour lequel M. Thiam appelle les éminences grises comme Souleymane Bachir Diagne à venir prendre part.

Bénévolat

Le prix de lancement de chaque volume a été fixé entre 10 000 et 7 000 F Cfa pour le public. Et pour les étudiants et les corps habillés, entre 5 000 et 3 500 F Cfa. Le Pr. Iba Der Thiam a mis un point d’honneur à rejeter toutes les accusations d’enrichissement à travers ce projet académique d’envergure. Des rumeurs ont circulé sur la vénalité de certains membres de ce Hgs.

‘‘Contrairement à ce que certains font circuler par ignorance, nous n’avons pas reçu des milliards pour ce projet. Cela n’est pas conforme à la vérité. D’autres ont prétendu que nous avons acheté un immeuble à titre personnel avec les fonds collectés. Cela aussi est une pure invention. La réécriture de l’’’Histoire générale du Sénégal : des origines à nos jours’’ nous tenait à cœur et nous y avons investi ce que nous avions de meilleur, dans le désintéressement le plus total. Les principaux responsables de ce projet n’ont pas voulu être rémunérés. Ils n’ont exigé aucune motivation financière’’, a-t-il insisté. L’historien a avancé que ‘‘la principale richesse’’ a été la confiance du chef de l’Etat et de différentes autorités au niveau déconcentré ou décentralisé ainsi que les appuis symboliques de groupes industriels ou médiatiques variant de 50 millions à 500 000 F.

D’ailleurs, le président de la République lui-même est venu lui prêter main-forte. ‘’Je tiens à préciser que le Pr. Iba Der Thiam et d’autres principaux contributeurs à ce projet y travaillent à titre bénévole. Sans rémunération aucune, avec comme seule viatique leur engagement citoyen et patriotique. C’est important à préciser’’, a défendu le chef de l’Etat. 

OUSMANE LAYE DIOP

Section: