Publié le 4 Aug 2023 - 19:42
INCENDIE CRIMINEL A YARAKH

Les rescapés reviennent sur l’horreur !

 

Malgré l’enfer vécu, les blessés avec qui nous avons discuté ont été contraints de prendre en charge eux-mêmes leurs traitements. Depuis lundi, jusqu’au moment où ces entretiens ont eu lieu, ils n’ont vu aucun responsable ni aucune autorité.

 

C’est une attaque qui a suscité l’émoi dans tout le pays. Depuis, on en parle un peu partout. Où sont les blessés ? Où sont les morts ? Où sont leurs familles ? Les questions n’ont eu de cesse de se multiplier. Hier, une partie du voile a été levée. L’identité des blessés a été livrée lors de la 3e rencontre du Gouvernement face à la presse. Il s’agit de Boubacar Baldé, 35 ans, résidant à Diamagueune, Farma Tall, 73 ans (Yarakh), Soukari Camara, 11 ans (Yarakh), Khady Sarr, 41 ans, (Colobane) et enfin de Modou Gueye, 60 ans, Keur Massar.

Joint par téléphone pour essayer de prendre son témoignage, ce dernier, sur un ton amer, plein de dépit, peste dès qu’on lui décline notre qualité de journaliste : ‘’Laissez-moi en paix ; je suis fatigué ; je ne veux pas vous parler…’’. Puis, il raccroche au nez sans autres formalités. Inutile d’insister.

Khady Sarr, elle, a préféré rentrer dans son village natal à Toubatoul, pour y retrouver la quiétude, passer tranquillement sa convalescence à côté des membres de sa famille. Mariée et mère de trois enfants, elle confie : ‘’En fait, je réside à Colobane, juste pour les besoins de mon travail, mais j’habite à Toubatoul. Avec mes blessures, je suis rentrée pour m’occuper d’abord de ma santé.’’ Revenant sur l’état de ses blessures, elle déclare : ‘’Il y a eu plus de peur que de mal. J’ai eu des brulures au niveau du bras gauche et de la jambe gauche, mais ça va mieux Dieu merci. Il y a juste la jambe qui fait encore mal.’’

Le jour du drame, Khahdy était partie à Thiairoye pour rendre visite à une connaissance. Au retour, elle a pris la ligne 65 vers les coups de 15 heures pour rentrer chez elle à Colobane. Elle était loin de se douter de ce qui l’attendait sur le chemin à hauteur de Yarakh. Elle revient sur le cauchemar : ‘’Tout est allé très vite. Après avoir immobilisé le bus, deux individus masqués se sont positionnés à hauteur de la porte de devant. J’étais debout à côté du chauffeur. Après quelques brefs échanges avec le chauffeur, ils ont jeté le pétard (cocktail Molotov) à l’intérieur. C’était une panique généralisée. Chacun essayant de se sauver. On criait, on tapait sur les portes pour être secourus par les autres ; ceux qui le pouvaient passaient par les fenêtres. Finalement, on a vu la porte s’ouvrir et on a accouru dehors. On a souffert, parce qu’il y avait beaucoup de fumée à l’intérieur et il faisait excessivement chaud.’’

La jeune dame s’est ainsi sauvée de justesse. Une fois dehors, elle était sous le choc, plus préoccupée par son sort que par le reste. Sur le débat autour des personnes décédées, elle déclare : ‘’Franchement, je n’ai pas vu les corps ; je ne me suis rendue compte de rien, une fois sortie ; j’ai juste essayé de me mettre à l’abri. Mais, j’en ai entendu parler.’’

L’Etat traine pour aller au chevet des victimes, obligées de payer pour leurs soins médicaux

Malgré le traumatisme vécu, les victimes avec lesquelles nous nous sommes entretenus n’ont eu droit à aucun suivi particulier. A l’hôpital, ils ont tous été contraints d’acheter les médicaments à eux prescrits avec leurs propres moyens. Doublement victime (il est le père de la fille de 11 ans S. Camara et fils de la sexagénaire (Farma Sow), Papis revient sur cette journée fatidique. ‘’J’étais à mon lieu de travail quand on m’a appelé avec le numéro de ma mère pour me dire que leur véhicule a pris feu. Il y avait à l’intérieur ma mère et ma fille. J’y suis allé immédiatement, comme mon lieu de travail n’est pas loin. Ils ont été par la suite acheminés à l’hôpital, le corps médical s’est bien occupé d’eux, mais j’ai payé toutes les ordonnances. Permettez-moi juste de remercier le directeur de l’hôpital qui a donné des instructions pour que les médicaments disponibles dans la pharmacie de l’hôpital ne me soient pas vendus. A part ça, j’ai tout payé moi-même. Nous n’avons encore vu aucun responsable. Le directeur d’AFTU m’a toutefois appelé pour dire qu’ils vont passer.’’

Pour le moment, sa fille S. Camara va beaucoup mieux. Quant à sa mère Farma Fall, son état est un peu plus grave. ‘’Elle a des brulures graves surtout au niveau du visage. Et puis asthmatique, elle a trop souffert de la fumée qui s’est dégagée après l’attaque. Mais, on rend grâce à Dieu.’’

Joint par téléphone, la jeune fille de 11 ans, élève en classe de CE1, se rappelle les circonstances dans lesquelles elle s’est sauvée avec l’aide de grand-mère. ‘’J’étais avec ma grand-mère. Nous avons pris le bus à Jaxaay vers 14 heures pour rentrer à Yarakh. J’ai vu deux personnes ; ils ont mis le feu et ils ont fui. C’est ma grand-mère qui m’a fait sortir du bus. Après on nous a emmenés à l’hôpital ; nous sommes rentrés dans la nuit’’.

A l’instar de la famille Camara, Khady Sarr aussi a déclaré avoir pris en charge elle-même toutes ses ordonnances. Jusqu’à hier, ils n’ont eu droit à aucune prise en charge.

Le témoignage poignant de Modou Gueye

S’il avait refusé de manière catégorique de s’adresser aux médias, Modou Gueye est finalement revenu à de meilleurs sentiments. Sur la TFM, l’homme est apparu dans un état difficile à observer, avec des brulures graves aussi bien au niveau des mains que du cou. Il fait partie des derniers à sortir du véhicule.

La foi en bandoulière, il témoigne : ‘’Je ne peux jurer que j’étais le dernier dans le bus avec les deux personnes décédées, mais cela m’étonnerait qu’il y ait eu une quatrième personne après nous. Quand le feu nous a encerclés de toutes parts, je me suis dit que puisque je vais mourir de toute façon, autant ne pas mourir dans ce feu. Ce serait pénible pour ma famille de ne pas voir mon corps. Je me suis alors dit : il faut briser les vitres et plonger dehors. Au moins, ma famille aura mon corps pour les sépultures. J’ai alors plongé et je suis tombé sur le goudron, après j’ai rampé pour me mettre à l’abri. Mes vêtements avaient pris feu ; on me les a enlevés et il ne me restait que le sous vêtement.’’

Aujourd’hui encore, Modou Gueye a mal un peu partout, il peine même à respirer correctement, confie-t-il à nos confrères. Pour autant, il ne compte pas porter plainte. Profondément croyant, il renvoie tout au Bon Dieu. ‘’Je ne pense pas porter plainte. Dans ma vie, j’ai toujours prié de ne pas recevoir de plainte, je ne veux pas non plus avoir à en servir à qui que ce soit.’’

INCENDIE CRIMINEL

Les deux personnes décédées sont des sœurs âgées respectivement de 21 et 7 ans

Par ailleurs, les deux corps sans vie qui étaient déposés à l’hôpital Dalal Jamm ont également été identifiés, hier. Elles sont des demi-sœurs demeurant à la Médina. Selon des sources proches de l’enquête, les victimes s’appellent Fatoumata Binta Diallo âgée de 21 ans environ, fille d’Amadou et de Sira Ba et Oumou Coultoumy Diallo âgée de 07 ans, fille d’Amadou et d’Aissata Ba.

Hier à 15 heures, Mamadou Yero Diallo, résidant à la Medina rue 29 angle Blaise Diagne, s'est présenté à la brigade territoriale de Hann, comme étant le petit frère d’Amadou Diallo, émigré établi en Espagne, père des victimes de l'incendie criminel du bus à Hann. ‘’Selon le déclarant, les deux filles ont quitté Kounoune pour rentrer chez elles.

En cours de route, la nommée Fatoumata Bineta Diallo a appelé son amie Aicha Diallo pour dire qu'elle avait quitté Kounoune et qu’elle se trouvait dans le bus Tata (ligne 65) à hauteur de la gare des beaux maraîchers. Elle avait même précisé qu'elle serait à la maison dans les 30 minutes qui suivent. Mais, depuis cet appel, personne n’a plus de ses nouvelles’’, rapporte la source.

Par la suite, la famille a appris qu’un bus en provenance de Kounoune a été incendié à hauteur de Yarakh et que deux personnes auraient perdu la vie dans cette attaque. Ils ont alors effectué le déplacement à l’hôpital de Pikine, mais n’ont pas vu les filles parmi les blessés. C’est ainsi qu’ils ont compris qu’il serait très probable que les deux personnes annoncées mortes soient celles qu’ils recherchent. Pour en avoir la confirmation, ils se sont rendus à la brigade de Hann pour faire une déclaration. Les corps sans vie étaient hier encore à l’hôpital Dalal Jamm de Guédiawaye.

Mor AMAR

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