Publié le 10 Jul 2018 - 17:54
LES SOCIETES CIVILES SONT–ELLES DEVENUES

Des bourrelets pour les Sociétés Africaines?

 

La question ne manque ni d’intérêt, ni de pertinence au regard de la genèse de l’apparition de ce troisième acteur social et de l’ampleur des ambitions et du rôle que ce dernier prétend devoir jouer dans et pour les Sociétés Africaines. Faut-il le rappeler la volonté et l’initiative de créer la dynamique de  société civile africaine , comme la plupart  des concepts politiques et gadgets  sociaux, est venue de nos anciens Maîtres et objecteurs de conscience, metteurs en scènes et souffleurs  des attitudes et comportements des acteurs  de la scène politique, économique et sociale dans nos pays.

Ainsi  face à l’échec de l’aide publique au Développement (APD) incapable de sortir nos Etats du sous-développement, et plutôt provoquant la faillite des Etats, parallèlement au corset  des Ajustements Structurels imposés à ces Etats, il a été encouragé la création  de structures  en dehors des pouvoirs pouvant représenter et défendre les intérêts des populations  en aidant celles-ci à l’appropriation  et à la mise en œuvre des politiques publiques ou des projets.  C’ est pourquoi elles ont pu bénéficier,  d’accréditation, de crédit et d’offres de financements,  dans  la plupart des Accords et programmes signés avec les Etats (Accords de Cotonou, Lomé I et II, DSRP1 et DSRP2, OMD, ODD, APE,  Etc…), Hélas cette  reconnaissance et  les faveurs  y  étant liées,   ont contribué non seulement à la prolifération de celles-ci, mais surtout  aux dérives  de  vassalisation de certaines ONGs  par des   lobbies de toutes sortes dont les préoccupations  sont souvent attentatoires à la philosophie,  aux mœurs et aux valeurs des Sociétés Africaines et destructrices de cohésion sociale.

Aujourd’hui  l’on observe une mutation génétique fonctionnelle avec  la  Mondialisation  et la naissance d’ une deuxième génération d 0NGs qui est entrain d’essaimer  non plus exclusivement autour des politiques de Développement économique et social, où elles pouvaient apporter de la valeur ajoutée, mais plutôt sur des questions  essentielles sur lesquelles les populations elles –mêmes en possession de pleins pouvoirs de délibération, n’ont besoin de béquilles, telles  les questions  Politiques,   civiles, civiques et de Droits humains ou de défense de Droits  spécifiques.  

Cette mutation a été corroborée  par un glissement sémantique  de ONGs au concept plus générique de OSCs  et de fait par l’apparition d’une diversité d’ Associations de sociétés civiles, d’Associations de Droits Humains, de défense de la Femme, de l’Enfance, de la Nature  etc…. Exceptées certaines  parmi elles qui  luttent contre certaines dérives sociétales,  malheureusement elles sont moins nombreuses , la plupart  de ces Oscs,  sont  des pendentifs  d’organisations, de Réseaux extérieurs ou  des caisses de résonnance  d’officines internationales qui ont entre autres missions le modelage et la dissémination des ingrédients de la pensée unique.  Cette nouvelle orientation à connotation plus politique qu’économique,   constitue  une menace  sérieuse pour la souveraineté des Etats en ce sens que ces OSCs de type nouveau sont enclines à internationaliser  des questions purement domestiques, et dans leur analyse  des situations, elles souffrent d’inaptitude à relativiser  et  à contextualiser.  Aussi   offrent-elles l’image de gardiens de vitrines d’objets  exotériques  dont elles ignorent à la fois l’origine, la valeur et la Fonction.

Ainsi la prééminence du plaidoyer pour l’extérieur sur l’action de proximité transformationnelle, le pêche mignon d’usurpation de fonction en cherchant à se substituer aux autres acteurs et en s’auto labellisant Médiateur,  en s’auto-invitant  dans toutes les  situations  mais surtout dans cette délicate tâche  de médiation qui requiert de l’expertise, de l’expérience, qui ne sont souvent pas présentes,  ces OSCs perdent beau coup de leur identité originelle, entament  leur crédit et aggravent la fracture sociale..   L’ambigüité de leur jeu réside surtout dans cette posture confortable de neutralité portée en bandoulière, qui n’est rien d’autre qu’un aveu de  sacrifice rituel de  l’obligation de vérité pour les populations, à l’autel  de calculs de géopolitique interne.  

Les OSCs doivent comprendre  que dire la vérité ou se positionner par rapport à l’intérêt du pays sur la base de la conformité aux  lois actuelles du pays,  ne signifie nullement pas prendre parti et que toute neutralité consistant à fermer les yeux sur ce que disent les lois, est une posture de compromission, une Société organisée marche sur la base de ses lois et règlements  jusqu’à ce qu’on procède à leur changement. Sinon on ouvre la porte au désordre et au chaos.

 IL n’y a ni paix, ni justice, ni progrès social sansle triomphe de  la  vérité qui tire sa source de la loi. Dans ce cadre il est malheureux de constater encore les tendances erratiques dans  la démarche de certaines organisations de la Société civile qui font de la politique sans l’avouer, qui prennent position tout en affichant une neutralité. Celles en charge des Droits humains ne sont pas dn reste  en réduisant les Droits humains au Droit de l’individu qui doit primer sur le Droit de la collectivité ou du groupe  mais pire elles  cherchent à plaquer à la lettre les dispositions des Textes internationaux, normes et conventions  à des situations exceptionnelles et particulières au mépris de l’esprit générique de ces textes.  

Ains , convoquant l’Article 25 de la Déclaration universelle des Droits Humains et du Citoyen, qui stipule que tout citoyen a le droit de vote et d’être candidat à des Elections…, au cours d’un plateau de Télévision, un représentant de la Société civile a vite fait  de conclure que tout le monde peut être candidat à la présidence de la République, (fussent-ils prédateurs des biens publics, criminels ou  autres), ceci parce que les Textes internationaux sont au dessus de notre arsenal juridique. Perception ne pouvait être plus hérétique et simpliste mais  dangereuse et pernicieuse, émanant de quelqu’un sensé défendre l’intérêt général.

L’on a eu envie de lui demander dans quel état au Monde applique-t-on cette perception biscornue ? Pourquoi alors n’y a-t-il pas un seul Etat pour toute l’humanité ? Qu’elle est l’utilité des constitutions nationales ? Sait –il que les dispositions des textes internationaux adressent le statut du spécimen humain opposable au spécimen animal, d’un prototype d’individu, extirpé ou prémuni de toutes contingences politico -sociales, historiques ou géographiques alors  que  dés qu’il est impacté par l’une de ces situations , il n’est plus le citoyen originel, immaculé dont il est ici fait allusion  d’où la source des exceptions, objet d’encadrement jurisprudentiel national, accepté  comme précaution par toutes les institutions internationales qui respectent toutes,  la Souveraineté nationale  assise sur la Constitution et les  Lois d’un pays. Faut-il le souligner même si une loi nationale  est en contradiction avec l’ordre international l’initiative de la changer pour l’adapter,  ne peut relever que de la Souveraineté nationale : l’exemple malheureux de MYANMAR et de certains pays d’Amérique latine sont patents. Ce qui est loin d’être le cas au Sénégal où la dernière Réforme  constitutionnelle sur l’éligibilité de tout citoyen vient de rétablir un ordre universel, en corrigeant un anachronisme qui était délibérément laissé dans la constitution de 2001.

Cela va de soi, on ne peut pas être éligible si on n’est pas  Electeur, moins encore si o ne jouit plus  de ses Droits civils et civiques, c’est universel et même dans une Assemblée ordinaire qui n’est pas membre, n’est pas éligible et ne vote point. IL ne faudrait pas que les pratiques insolites et irrégulières, internes  à un « parti politique» fût-il celui au Pouvoir,  puissent parasiter notre système électoral ou notre Démocratie  qui reste une des plus solides au Monde. La  position de la Société civile ne doit souffrir d’aucuns faux-fuyants et elle doit réfuter et condamner ces attitudes de compromission qui voudraient qu’on laisse qui veut se présenter et que les difficultés soient transférées au peuple ! Dans quel Etat sommes- nous ?     

En conclusion, il faut le constater pour s’en désoler les Sociétés civiles Africaines potentiels remparts  des peuples  et de la Démocratie sont encore dans le mirage, et font dans le clair obscur et  faute de prendre à bras le corps les préoccupations des populations, elles finissent par devenir un bourrelet qui empêche  de progresser.

Les Sociétés Africaines, ont vraiment besoin de Sociétés Civiles  fortes, actives, bien ancrées dans les terroirs et dans les sociétés,  indépendantes  vis-à-vis des pouvoirs, des groupes de pression locaux et des lobbies étrangers, ce qui pose la question fondamentale de leur statut et  de leur financement, qu’il faudrait prendre en compte dans une réflexion globale du Financement de tous les acteurs du Développement à l’instar des partis politiques. Ceci requiert un dispositif de contrôle et d’’évaluation des  activités et de la couverture territoriale. Au delà de l’ancrage et de l’indépendance, il faut mettre l’accent sur le développement des expertises, de la spécialisation et l’évitement des mélanges de genres. En fin il faudra changer le paradigme du faire-faire en faire avec.qui pourrait contribuer au règlement en partie de la question du Financement ; le seul crédo reste, l’éveil des consciences, la mobilisation  pour la défense des intérêts généraux, la justice, l’équité et le progrès social.

Walmaak Ndiaye  commission des cadres Bennoo Book Yaakhaar

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