Publié le 20 Nov 2012 - 00:05
MOHAMED MOUSTAPHA SÈYE, DIRECTEUR DE DROITS HUMAINS(1ère Partie)

''Il y a une volonté manifeste des teneurs du barreau de ne pas ouvrir les portes de la profession''

 

Le directeur des Droits humains dénonce le bâtonnat accusé de ne pas ouvrir ses portes à de nouveaux avocats. Dans cet entretien accordé à EnQuête, jeudi denier, Mohamed Moustapha Sèye, de retour de Genève où il était allé présenter le rapport du Sénégal sur la torture, revient sur les observations et recommandations du Comité contre la torture des Nation-Unies.

 

 

 

Vous revenez de Genève où vous étiez allé présenter le rapport du Sénégal sur la lutte contre la torture. Voudriez-vous nous en faire l’économie ?

 

Le ministre de la Justice, à travers la direction des Droits humains, a présenté devant le Comité contre la torture des Nations-Unies le troisième rapport périodique du Sénégal rendant compte des dispositifs et l’application des conventions contre la torture. Le premier a été présenté en 1990, le deuxième en 1996. Depuis lors, il y a beaucoup de retards dans la présentation de ces rapports.

 

Qu’est-ce qui expliquent ces retards ?

 

Ces retards sont d’ordre administratif. Le Sénégal a ratifié la quasi-totalité des instruments internationaux. Parmi ces instruments, il y en a neuf (9) qui font obligation aux État de présenter des rapports périodiques. Il y a la Charte africaine des droits de l’Homme, la Convention des droits de l’enfant, la Convention contre les discriminations raciales, etc. qui sont présentées chaque deux (2) ans. Donc, c’est un système de contrôle institué pat les Nations-Unies pour faire l’évaluation des conventions ratifiées par les États. Le Sénégal connaît effectivement des retards dans ce domaine parce que, quand vous vous intéressez aux textes, il y a la Direction des affaires juridiques et consulaires qui dépend du Ministère des Affaires étrangères. Cette direction n’a pas de moyen matériel. Ensuite, elle n’a pas les compétences juridiques. Quand vous parlez de l’application des textes, c’est le Ministère de la Justice qui en a la charge. Nous assistons au système diversifié : il y a le Ministère de la Femme qui présente un rapport sur les discriminations contre les femmes ; ce même ministère va présenter un rapport sur les enfants. Tout cela n’est pas clair. L’autre chose, c’est l’instabilité institutionnelle quand le président Wade avait créé le Haut commissariat des droits de l’Homme et la promotion de la paix. Les textes qui créaient cette institution disaient qu’il appartient au Commissaire de présenter les rapports du Sénégal. En tout état de cause, il n'y a pas un seul secteur qui ne soit pas concerné pas les droits de l’Homme. On doit travailler en synergie.

 

Quelle solution avez-vous apportée à cette dispersion ?

 

Lorsqu’il est arrivé au pouvoir, le Président Macky Sall a créé cette direction [des Droits humains] pour mieux rationaliser les choses. Cette direction a pris le relais du Haut commissariat. En rattachant cette direction au Ministère de la Justice, c’est un management très logique.

 

Quelle appréciation le Comité contre la torture de Nations-Unies a-t-elle faite sur le rapport du Sénégal ?

 

Il y a eu des observations et des recommandations qui nous été faites.

 

Lesquelles ?

 

Nous étions partis avec quelques appréhensions. Vous avez suivi un peu tout ce qui s’est passé pendant la campagne électorale [de la présidentielle 2012], les violences qui ont eu lieu. Le Sénégal était donc très attendu sur les mesures qu’il devait prendre, les enquêtes qu’il devait mener pour donner suite à tout cela. Dieu merci, le Sénégal n’a pas été très gêné. Parce qu’après l’élection de Macky Sall, il y a eu des arrestations et l'ouverture d'enquêtes sur les pertes en vies humaines enregistrées lors des opérations de maintien de l’ordre. Documents à l’appui, nous avons réaffirmé notre volonté de lutter contre l’impunité.

 

Les organisations de défense des droits de l’Homme dénoncent la lenteur dans le traitement des dossiers relatifs aux violences électorales...

 

Tous les dossiers relatifs à ces événements ont été transmis aux différents procureurs. Il s’agit de Dakar, de Podor, de Kolda, etc. Il n’y a pas une volonté de restriction au niveau de la Justice. On reproche à la justice d’être lente, mais personne ne voudrait une justice expéditive. Actuellement, il y a combien de membres de forces de l’ordre, des policiers et gendarmes qui sont sous mandat de dépôt. La volonté politique est là. Il ne s’agit pas de faire une chasse aux sorcières, les enquêtes ne sont pas dirigées contre les forces de l’ordre. Il faut plus nous encourager plutôt que de dire que la justice est lente. Le deuxième point concerne le procès Hissène Habré. Le Sénégal s’est engagé à organiser le procès de l’ancien chef d’État tchadien pour des raisons que vous savez tous. Ce qui permet de poursuivre Hissène Habré, c’est la convention contre la torture. Depuis 2007, on a pu intégrer toutes les dispositions des conventions et nous permettre d’être en phase. Maintenant, il y a une observation de taille...

 

Laquelle ?

 

A Genève, tout le monde s’est étonné du nombre insuffisant d’avocats. Il n’y a que 364 avocats au Sénégal sur une population de 12 millions. Les 331 sont des titulaires, les 33 sont stagiaires. Alors qu'il y a 450 ou 500 magistrats. Cela a été vraiment le point noir de cette rencontre et je n’oublierai jamais les sarcasmes des experts. Ils nous disaient : ''Est-ce que vous avez des ressources humaines ? Est-ce que vous avez des problèmes d’ordre académique au point que dans votre pays, il n'y ait que 300 avocats sur 12 millions d’habitants ?'' Nous avons été la risée...

 

A suivre....

 

Par Daouda GBAYA

 

 

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