Une menace pour la santé de la reproduction

Docteur Mathurin Bonzi
La santé de la reproduction est menacée en Afrique par les différents conflits et crises qui sont cycliques. Les acteurs de la Santé, en assemblée générale hier, à Dakar, veulent apporter une riposte rapide et efficace contre le phénomène.
Les conflits et les crises sont récurrents en Afrique. Ils occasionnent des pertes énormes pour le continent. Selon des chiffres du Directeur de Save the Children Sénégal, Docteur Mathurin Bonzi, à la fin de l’année 2013, environ 51,2 millions de personnes étaient déplacées en raison de conflits, persécutions, violences généralisées et violations des droits de l’Homme. Le nombre le plus élevé depuis la seconde guerre mondiale, dit-il. Et encore, 22 millions de personnes étaient déplacées en raison de catastrophes naturelles. 75 à 80% de ces personnes affectées par les crises sont les femmes, les enfants et les jeunes (âgés de 10 à 24 ans). ‘’Plus de la moitié des décès maternels et d’enfants de moins de cinq ans ont lieu dans des contextes affectés par un conflit armé ou une catastrophe naturelle. Malgré tous ces facteurs, il continue de persister des gaps dans la réponse humanitaire’’, a informé le Dr Bonzi.
Pour mieux lutter contre ce phénomène, une assemblée annuelle sur la santé de la reproduction lors des crises est organisée depuis hier au Sénégal par le groupe de Travail Inter-Agences (IAWG). Le Directeur de la Santé de la reproduction et de la survie de l’enfant Docteur Bocar Mamadou Daff signale, à cet effet, que le taux de prévalence en matière de contraception est assez bas et les besoins en santé de la reproduction restent élevés dans le continent. Cette situation, dit-il, s’explique par ces conflits qui entraînent, le plus souvent, des déplacements de populations dans plusieurs pays de la région. ‘’De plus en plus, nous subissons de plein fouet les conséquences du changement climatique, les pluies diluviennes dans certains pays alors que d’autres font face à une sécheresse sévère. Toutes ces crises concourent à l’aggravation de la situation de la santé de la reproduction de la région’’, a expliqué Dr Daff.
Dispositif d’urgence
Pour le Directeur, quand ces situations surviennent, avec les déplacements qui se font, les femmes sont souvent victimes de beaucoup d’agressions telles que les viols et les violences. C’est pourquoi il demande à ce que cette couche fragile de la population soit protégée grâce à la mise en place d’un dispositif d’urgence notamment des contraceptifs ou des kits pour les prendre en charge dans l’accouchement, les consultations prénatales et les césariennes. ‘’Nous avons remarqué cette année que ces situations de conflit augmentent de plus en plus. C’est pourquoi c’est important, dans nos stratégies, qu’on tienne en compte cette approche qui, le plus souvent, ne se manifeste pas au grand jour’’, a-t-il précisé.
Concernant le Sénégal, il n’est pas en crise, a rassuré le Docteur Daff. Par contre, conseille-t-il, il doit se préparer. Même si les inondations ont disparu de Dakar et dans certaines villes, elles peuvent toujours survenir. Des catastrophes naturelles ne sont pas aussi à exclure. Ainsi, il demande à ce que les acteurs de la Santé soient préparés en termes d’organisation, de disponibilité de produit, de services à offrir, d’identification des viols potentiels, de sécurisation des personnes.
Au cours de cette assemblée, les acteurs vont réfléchir sur les questions de financement en cherchant à combler l'écart entre les pays touchés et non touchés par un conflit. Il s’agira surtout, selon les initiateurs de la rencontre, d’assurer un financement équitable et soutenir des programmes humanitaires fluides, innovants, qui favorisent la cohésion plutôt que des interventions à court terme.
VIVIANE DIATTA