Publié le 27 Aug 2025 - 10:14
OFFENSE AU PRÉSIDENT TURC  

Le journaliste Doudou Coulibaly condamné pour ses propos sur Recep Tayyip Erdogan

 

Le journaliste Doudou Coulibaly a comparu hier, devant le tribunal des flagrants délits de Dakar. Il était poursuivi pour les chefs d’offense au président turc Recep Tayyip Erdogan et d’offense au Premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, considéré dans l’acte d’accusation comme exerçant une partie des prérogatives du Chef de l’État.

 

Tout est parti d’une émission télévisée au cours de laquelle Doudou Coulibaly, commentant un communiqué annonçant la visite officielle du Premier ministre Sonko en Turquie, a lâché : ‘’C’est le chef des bandits qui invite un bandit.’’

À la barre, le journaliste a reconnu la maladresse de ses propos, mais a contesté toute intention d’offenser. ‘’C’était dans l’oralité, je l’ai lâché comme ça, d’un seul coup. Si c’était en presse écrite, j’aurais eu plus de recul’’, a-t-il expliqué. Et d’ajouter qu’il aurait pu employer une métaphore différente, comme « un lion qui invite un lion ». Interrogé par le juge sur le terme ‘’bandit’’, Coulibaly a tenté de nuancer : ‘’Pour moi, un bandit n’est pas quelqu’un qui nuit à la société, mais plutôt un stratège qui sait se tirer d'affaire.

Je n’aurais jamais traité un président ou un Premier ministre de bandit. Ce n’était pas prémédité.’’ Le parquet a également retenu contre lui une phrase prononcée en wolof, laissant entendre que le président Erdogan aurait ‘’tué un opposant’’. Sur ce point, Coulibaly s’est défendu en parlant d’une mauvaise traduction : ‘’Je voulais dire que le président est accusé. Mon wolof m’a trahi’’, a-t-il déclaré, insistant sur le fait qu’il n’avait cité ni le nom du président turc ni celui du Premier ministre sénégalais. Devant ses avocats, le prévenu a regretté la tournure de ses propos.

Pour le procureur, il ne fait aucun doute que le journaliste a dépassé les limites. Ses déclarations ont été qualifiées d’’’irresponsables et irrespectueuses’’, constituant une double offense : d’abord envers le chef du gouvernement sénégalais, ensuite envers le président turc. Le représentant du ministère public a requis six mois de prison, dont trois fermes, ainsi qu’une amende de 500 000 F CFA.

Les avocats de Coulibaly, parmi lesquels Maitres Iba Mar Diop, El Hadj Diouf, Abdou Dialy Kane, Aboubacry Barro et Bamba Mbaye, se sont relayés pour démonter l’accusation. Me Barro a dénoncé une justice à deux vitesses : ‘’Quelqu’un a dit publiquement que nous avons un président légitime et un président légal. Pourquoi n’a-t-il pas été inquiété ?’’ Maitre Kane a, de son côté, soulevé un argument juridique. Selon lui, le délit d’offense à une personne exerçant les prérogatives du président de la République n’existerait pas dans le Code pénal. Il a également mis en avant l’état de santé fragile de son client, appelant le tribunal à faire preuve de bienveillance. Ses confrères, Mes Diouf et Mbaye, ont plaidé la relaxe pure et simple, estimant que les propos, bien que malheureux, ne justifient pas une condamnation pénale.

Après délibéré, le tribunal a choisi une voie médiane. Doudou Coulibaly a été relaxé de l’accusation d’offense au Premier ministre sénégalais, mais déclaré coupable d’offense à un chef d’État étranger.

Verdict : trois mois de prison avec sursis.

MAGUETTE NDAO

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