Publié le 19 Sep 2019 - 23:34
PORTRAIT GL JEAN-BAPTISTE TINE

L’homme du Président

 

Aimé, respecté, loyal et compétent, Jean-Baptiste Tine a été nommé, avant-hier, Haut commandant de la Gendarmerie nationale et directeur de la Justice militaire. ‘’EnQuête’’ revient sur l’itinéraire plus qu’élogieux du premier général nommé par le président de la République Macky Sall à son accession à la magistrature suprême.

 

Enfin, la consécration ! Depuis le départ à la retraite du général de corps d’armée Abdoulaye Fall de la tête du Haut commandement de la Gendarmerie nationale, il ne se passe plus une succession sans que son nom ne soit cité parmi les prétendants. Et comme dans ce milieu très restreint l’on ne se fait jamais aucun cadeau, le nouveau haut commandant de la Gendarmerie nationale a dû avaler plusieurs couleuvres avant son accession à la station la plus élevée de la maréchaussée. Un chemin long et périlleux que le natif de Thiès a su traverser avec beaucoup d’endurance.

Il s’appelle Jean-Baptiste Tine. Il a l’honneur d’être le premier général nommé, chez les pandores, par le président de la République, Macky Sall, quelques mois seulement après son accession à la magistrature suprême. C’était le 1er janvier 2013, après une carrière remplie de gloire.

Entré en service le 1er septembre 1981, le général aura gravi tous les échelons avant de toucher le Graal. Sous-lieutenant dès le 1er octobre 1984, lieutenant en 1986, capitaine en 1991, chef d’escadron à partir de 1997, il a été nommé lieutenant-colonel en 2003, puis colonel en 2006.

Par la suite, il a fallu attendre sept longues années avant de le voir au sommet de la hiérarchie militaire, en tant que général de brigade. Il rejoignait ainsi les généraux de brigade Ousmane A. Dièye, Meïssa Niang et Cheikh Sène qu’il vient de succéder après 38 ans de service.

Dans la maréchaussée, on ne tarit pas d’éloges à son égard. Ce haut gradé qui, par égard pour le général Cheikh Sène encore en fonction, trouvait prématuré de parler du nouveau, a fini par lâcher : ‘’Je demeure persuadé que cette nomination est un choix divin dont le général Tine, de par son humanisme, sa sociabilité, son humilité, sa foi inébranlable en Dieu, est le seul artisan.’’ A en croire son témoignage, le nouveau directeur de la Justice militaire a de qui tenir. Car, souligne-t-il, du sang de gendarme coule dans ses veines. Occasion, selon l’officier à la retraite, de rendre hommage à la maman qui, en l’absence du père, a su remplir le rôle d’éducateur avec brio. ‘’C’est très dur, souligne-t-il, pour un gendarme, d’éduquer ses enfants. Ce sont les épouses qui se sacrifient pour accomplir cette mission. Sa nomination est un message fort à toutes les épouses et aux enfants de gendarmes’’.

Né le 4 septembre 1961 à Thiès, Jean-Baptiste Tiathié Tine est sorti de la prestigieuse Académie royale militaire de Meknès au Maroc. Egalement diplômé de l’Ecole des officiers de la Gendarmerie nationale de Melun en France, il est connu pour son engagement, ses compétences ainsi que sa grande loyauté. Durant ses plus de 30 ans de service, l’homme a presque flirté avec tous les segments de la Gendarmerie nationale. Aussi bien dans les unités mobiles que dans les compagnies territoriales, il a su monnayer avec beaucoup de tact son talent et ses capacités managériales.

Selon nos interlocuteurs, le breveté de l’école de guerre est un chef aimé et respecté par la jeune garde de la maréchaussée, grâce à ses qualités humaines. ‘’Il est très proche des hommes, particulièrement des jeunes gendarmes qui le respectent et l’admirent’’, informe un témoin.

Entre 1986 et maintenant, le successeur de Moussa Sène aura occupé plusieurs fonctions. Ce qui lui permet d’avoir une vision assez complète de cette autre mamelle de la sécurité intérieure du Sénégal. Commandant de la compagnie de Saint-Louis entre août 1994 et août 1995, commandant de la compagnie de Ziguinchor entre septembre 1995 et mars 1996, le général Tine avait, de 1989 jusqu’en 1994, dirigé l’escadron blindé de la Légion de gendarmerie d’intervention. A la Lgi, le spécialiste des unités blindées et du rétablissement de l’ordre est revenu en 2003 pour un bref séjour qui n’aura duré que du 15 août 2003 au 30 novembre de la même année.

Pendant longtemps, il a aussi été commandant des écoles de la gendarmerie. A ce titre d’ailleurs, il a marqué plusieurs générations de gendarmes qui lui obéiraient au doigt et à l’œil. Le général au long court a également été à l’origine de grandes réformes de la gendarmerie mobile et de son déploiement sur l’ensemble du territoire national. Il a aussi eu à conduire la réforme de la logistique de la gendarmerie et les manuels pratiques dans ce domaine.

Rigueur, éthique et exemplarité

Dans la maréchaussée, l’homme est connu pour sa rigueur, sa haute définition de l’éthique et de l’exemplarité qu’il ne cesse de partager avec ses troupes. ‘’La discipline, ne cesse-t-il de rappeler à ses hommes devant partir notamment pour des missions internationales, est la force principale des armées. Elle exige de vous d’être conforme avec les règlements nationaux et à ceux de la mission. Elle exige de vous un comportement irréprochable entre vous et les autres camarades étrangers de la même mission, mais aussi et surtout avec les autorités et les populations hôtes’’.

Aux membres du 2e contingent de la gendarmerie nationale déployé dans le cadre de la Mission intégrée multidimensionnelle de stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (Minusca), il ordonnait de ne surtout pas ‘’souiller le drapeau national’’ qui lui est si cher. ‘’Nous ne saurons jamais suffisamment insister sur le fait que vous en êtes chacun un gardien. Vous devez l’honorer, le défendre et le hisser toujours plus haut comme vos devanciers dans ces nombreux théâtres d’opérations où le Sénégal s’est engagé’’, rappelait-il.

Relations particulières avec le Chef de l’Etat

Entre Jean-Baptiste Tine et le président de la République Macky Sall, c’est une longue histoire. En effet, il résulte de certaines confidences que le général entretiendrait des relations particulières avec le chef suprême des armées. Certaines sources signalent même que le général serait l’époux d’une ancienne conseillère de Macky Sall aussi bien à la primature qu’à l’Assemblée nationale.

Homme irréprochable, selon ses proches, M. Tine souffre néanmoins d’une tâche qui le pourchasse comme une ombre. C’était la rocambolesque affaire Joël Manou dans laquelle il avait été cité. Dans cette affaire qui avait défrayé la chronique entre 2014 et 2015, le nouveau haut commandant de la gendarmerie a été victime de sa ‘’proximité’’ avec le prévenu de nationalité camerounaise. Les avocats de la défense estimaient même que leur client faisait juste les frais de cette relation privilégiée avec un des prétendants dans un contexte marqué par la guerre de succession. ‘’Comme il était très proche du général Tine qui était en pole position, et il était écouté par l’autorité, on a pensé que son avis pouvait compter’’, avait soutenu un de ses défenseurs.

Le Camerounais avait, à l’époque, eu le malin plaisir de se présenter comme un conseiller spécial du président de la République. Au cours d’une cérémonie, des éléments des renseignements généraux avaient été surpris d’entendre le président de l’Association des écrivains du Sénégal le présenter comme ès qualité de conseiller du chef de l’Etat. Informée, la hiérarchie policière avait ouvert une enquête et découvert que le sieur n’a jamais été nommé à ce poste. Poursuivi pour plusieurs délits dont l’usurpation de fonction, il fut condamné à 2 ans de prison ferme.

Mais cet épisode, aussi fade soit-il, n’enlève en rien au mérite du général qui aura marqué la maréchaussée. Selon toujours nos informations, la réputation de ce dernier transcende même les frontières nationales. Le toujours haut commandant en second a, en effet, été chef de la composante police de la Mission internationale de soutien au Mali et commandant de contingent en Bosnie-Herzégovine. ‘’Il a participé à la quasi-totalité des travaux des comités d’experts de l’Union africaine et de la Commission économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest chargés de la mise en place de forces africaines en attente’’, renseigne nos sources.

Ces états de services plus qu’élogieux lui ont d’ailleurs valu plusieurs décorations aussi bien au niveau national qu’international. Mais son plus grand atout, c’est certainement la grande confiance dont il jouit auprès du président de la République Macky Sall. ‘’The right man at the right place’’, diront certainement ses nombreux proches.

MOR AMAR

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