Publié le 15 Jun 2019 - 16:03
PROSTITUTION ET DIFFUSION D’IMAGES CONTRAIRES AUX BONNES MŒURS

 Ibrahima Paye, Babou Ba, Saliou Mbaye et Sémou Ndao se vendaient via Internet

 

Hier, devant le tribunal des flagrants délits, ont comparu El Hadj Ibrahima Paye, Babou Ba, Saliou Mbaye et Sémou Ndao accusés de prostitution sans carnet sanitaire et de diffusion d’images contraires aux bonnes mœurs.

 

Des hommes, prostitués de profession. Ça ne court pas les rues, au Sénégal. Mais ça existe au ‘’Pays de la Téranga’’. El Hadj Ibrahima Paye, Babou Ba, Saliou Mbaye et Sémou Ndao en font peut-être partie. Attrait à la barre du tribunal des flagrants délits de Dakar, ils devront répondre des chefs d’inculpation de prostitution sans carnet sanitaire et de diffusion d’images contraires aux bonnes mœurs. Ils ont été piégés par une policière qui s’est fait passer pour une cliente intéressée. Ils sont tous tombés dans le panneau. Elle les a appelés à tour de rôle et leur a proposé à chacun une somme d’argent, en échange de massage et/ou de rapports sexuels. Le point de rendez-vous était un hôtel sis à Dieuppeul où les agents de la police les attendaient pour les appréhender.

Devant le juge, ils ont sans ambages conté leur mésaventure. Premier à prendre parole, Babou Ba, étudiant et résidant à la Gueule tapée, raconte, devant le juge, comment il s’est laissé entrainer dans cette affaire rocambolesque de prostitution. “Un jour, pendant que je faisais des recherches sur Google, j’ai vu la page publicitaire du site nexna.com s’afficher sur mon écran et, par curiosité, j’y suis entré. J’ai vu plusieurs profils et j’y ai créé un compte en 2018, mais je ne recevais que des appels d’hommes. Par la suite, en 2019, j’ai ouvert un autre compte avec pour slogan ‘’Wo ma gaw yaw mi beug lou nexx” avec des photos que j’avais téléchargées et j’ai reçu mon premier appel d’une femme qui a sollicité mes services. Elle m’a demandé si je pouvais venir la rejoindre à Dieuppeul. Mais puisque je n’avais pas d’argent sur moi, je le lui ai fait savoir. Elle m’a demandé le prix et a insisté, et je lui ai dit que 20 mille F Cfa suffirait. Alors, on s’est mis d’accord. Dès que je suis arrivé, elle m’a dit que c’était la police et je me suis fait arrêter. Si j’avais su que c’était interdit, je ne l’aurai jamais fait”, raconte-t-il.

Saliou Mbaye, lui, est mécanicien. Il est domicilié aux Parcelles-Assainies. Parmi les membres de la bande, il s’est fait lui aussi alpaguer par la police. Devant le juge, il laisse entendre que c’est ‘’pendant qu’il était tranquillement chez lui, qu’une femme l’a appelé pour lui proposer des rapports sexuels moyennant une somme d’argent. ‘’Je n’en croyais pas mes oreilles’’, s’exclame-t-il d’emblée. Avant de poursuivre le récit de sa mésaventure : ‘’Je me suis posé mille et une questions sans avoir aucune réponse. J’ai appelé mon ami Sémou pour lui en parler. Ce dernier aussi était bouche-bée et m’a certifié que ce n’était pas possible. Mais je lui ai dit que j’allais lui prouver le contraire.’’ Pendant ce temps, ajoute-t-il, ‘’la dame n’arrêtait pas de m’appeler et je lui ai dit que j’avais un problème avec mon téléphone et que si elle n’arrivait pas à me joindre, elle pourrait le faire avec le numéro de mon ami. Pour le reste, je ne suis pas au courant jusqu’à ce qu’on me convoque à la police pour m’arrêter’’, soutient-il.

Pour se tirer d’affaire, il demande aux enquêteurs de fouiller dans son téléphone et même son ordinateur. Mais c’était sans compter sur la vigilance des enquêteurs. S’ils l’ont arrêté, c’est parce que, dans l’un des comptes, figure son numéro de téléphone. Là encore, le prévenu tente de nier. ‘’Je ne me suis jamais inscrit dans ce site. D’ailleurs, je ne l’ai jamais visité. Certainement, mon numéro de téléphone a été pris par quelqu’un de malintentionné pour l’inscrire dans le site. Je suis père de famille et je ne me permettrais pas de m’adonner à ces choses-là’’, tente-t-il de convaincre.

Tout comme Saliou Mbaye, Sémou Ndao s’est lui aussi fait avoir dans les mêmes circonstances. Mécanicien résidant à Grand-Yoff, il s’est joint à la bande. ‘’C’est mon ami El Hadj Ibrahima Paye qui m’a appelé pour me parler d’une certaine dame qui lui a proposé des rapports sexuels payants et j’étais aussi surpris que lui. Il m’a fait savoir qu’il lui a donné mon numéro pour que je voie de moi-même. Alors la dame m’a appelé pour me faire les mêmes propositions. Par curiosité, et pour la prendre en photo, comme je l’avais promis à Ibrahima, j’y suis allé. A peine suis-je descendu du taxi que la police s’est présentée devant moi et m’a mis les menottes’’, narre-t-il.

De la même manière que son ami, El Hadj Ibrahima Paye a été appâté par les forces de l’ordre, avec toujours la même dame qui appelle pour proposer des rapports sexuels moyennant une somme d’argent.  Membre de la bande, El Hadj Ibrahima Paye dit avoir ouvert un compte sur le site incriminé, mais en pensant que c’était un simple site de rencontres. ‘’J’y ai vu des annonces de massages et je me suis dit pourquoi ne pas me faire un peu d’argent de poche ? Mais je n’y ai pas mis de photo et, depuis ce jour, je ne me suis pas reconnecté’’, déclare-t-il pour se disculper. Avant d’ajouter : ‘’Un jour, alors que j’étais à Ouakam, j’ai eu un coup de fil d’une femme qui m’a sollicité pour un massage. Elle m’a demandé si elle pouvait venir chez moi, parce qu’elle vivait en famille. Je lui ai dit que moi aussi je vivais en famille et que ce ne serait pas possible. Elle m’a proposé de la rejoindre dans un hôtel à Dieuppeul, et j’y suis allé par simple curiosité. Une fois arrivé, elle m’a dit de m’asseoir et de la fermer. A peine une minute passée, la police s’est pointée et j’ai été arrêté.’’

Les doutes du parquet

Dans son réquisitoire, le parquet a dit qu’il n’y a pas assez d’éléments pour inculper les sieurs Saliou Mbaye et Sémou Ndao. Quand à Ibrahima Paye, la représentante du parquet est dubitative et ne peut pas certifier son intention de prostitution. Elle a demandé la relaxe des prévenus, pour le bénéfice du doute.  Et pour Babou, il est clair, selon elle, qu’il s’adonne à ces pratiques de prostitution. La parquetière a demandé qu’il soit déclaré coupable et qu’on lui inflige une peine d’emprisonnement d’un mois ferme.

Le conseil de Saliou Mbaye et de Sémou Ndao s’est réjoui de la position du parquet. ‘’Mes clients ne se prostituent pas, ce sont des pères de famille et quand on n’a pas commis d’infraction, on ne doit pas encourir une peine’’, a-t-il dit. Avant de solliciter la relaxe pure et simple de ses clients. Quant à l’avocat d’Ibrahima Paye et Babou Ba, il a reconnu qu’il y a eu une réelle tentation et une possibilité pour ses clients de céder. Mais il souligne que ces derniers regrettent amèrement et que leur séjour au cachot leur a servi de leçon et fait déjà office de sanction. Il a demandé leur relaxe.

Après avoir statué, le président du tribunal a relaxé Ibrahima Paye, Sémou Ndao et Saliou Mbaye et déclaré Babou Ba coupable de prostitution sans carnet de santé. Il lui a infligé une peine d’un mois avec sursis.

FAMA TALL (STAGIAIRE)

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