Publié le 14 Jul 2020 - 16:48
SANTE DE LA REPRODUCTION A KOLDA

4 sur 10 femmes accouchent à domicile

 

Les accouchements à domicile sont loin de connaitre leur fin, dans la région de Kolda. Au premier trimestre de 2020, il est prouvé que sur 10 femmes, seules 6 ont recours aux structures de santé, au moment de la délivrance. Idem pour les consultations prénatales. Et même si elles y vont au début, elles finissent par ne plus y retourner.

 

Dans la région de Kolda, l’Etat du Sénégal et ses partenaires au développement ont fourni beaucoup d’efforts en matière de santé de la reproduction. Malgré cela, les cas d’accouchement à domicile persistent, faute de moyens de transport. Interrogées, beaucoup de femmes du monde rural disent que lors des premières contractions la nuit, elles n’ont pas toujours les moyens pouvant assurer leur transport dans des structures de santé.

C’est ainsi que beaucoup d’entre elles accouchent chez elles. ‘’Pendant l’hivernage, nous femmes des zones rurales sommes obligées, faute de moyens de déplacement, d’accoucher à domicile. Nous savons que cela comporte des risques qui peuvent être mortels. Parce que, parfois, nous perdons beaucoup de sang et cela peut créer d’autres pathologies. Mais nous n’avons pas le choix’’, expliquent-elles.  

Selon la sage-femme Reine Marie Coly Badiane, par ailleurs Coordinatrice régionale de la santé de la reproduction, cela ne les empêche pas de continuer à sensibiliser les populations sur les risques mortels liés aux accouchements à domicile. Malgré tout, leurs efforts sont loin de porter des fruits. ‘’Au premier trimestre 2020, sur 10 femmes, seules 6 ont accouché dans les structures de santé et les 4 autres ont accouché à domicile’’, souligne Mme Badiane.

Un autre spécialiste de la santé, qui préfère garder l’anonymat, affirme que ‘’les drames proviennent de ces accouchements à domicile. Il est arrivé que des femmes meurent d’hémorragie. C’est un drame que nous ne souhaitons plus revivre’’. Seulement, même si les problèmes d’accès aux centres de santé venaient à être résorbés, il leur faudra faire face aux facteurs culturels, poussant les femmes à refuser d’aller accoucher dans les structures sanitaires.

De Sinthiang Oumar à Saré Diatta, en passant par Saré Téning, Saré Walon, Saré Sandiong et Témento, certaines belles-mères prennent presque toutes les décisions en milieu rural. Elles encouragent leurs belles-filles à accoucher à la maison, sous prétexte qu’elles sont fortes et braves. Fatoumata Baldé, mariée il y a cinq ans, est l’une d’entre elles. ‘’Pour ma première grossesse, j’ai accouché à la maison, parce que ma belle-mère m’a encouragée à le faire. Elle me disait qu’à leur époque, elles n’allaient pas dans les structures de santé pour accoucher. Elle me disait que le coût élevé des frais médicaux dans les structures sanitaires font que les femmes n’y vont pas’’, a-t-elle partagé.

Un des chefs de village soutient qu’il y a aussi un autre problème qui est lié au fait que certaines cachent leurs grossesses et ne vont pas voir les sages-femmes dans les hôpitaux, du fait des croyances populaires. Dans certains villages, annoncer sa grossesse peut causer la mort du fœtus, dit-on. 

Mais les faits restent constants. Dans beaucoup de villages, le principal problème que rencontrent les femmes est l’absence de poste de santé. A cela s’ajoutent la pauvreté, le mauvais état des routes et l’enclavement. De vrais ou faux problèmes ? La question se pose, puisque des alternatives sont trouvées à toutes ces problématiques. Ainsi, la carte sanitaire est renforcée ces dernières années, avec la construction de structures de santé de proximité et un personnel qualifié. Dans le même cadre, les accouchements sont gratuits depuis 2005. ‘’Avant, on nous donnait des kits d’accouchements. Mais depuis un certain moment, on n’en reçoit pas. Malgré cela, nous continuons à offrir des soins gratuitement. Souvent, les parents pensent qu’il y a toujours un coût très élevé. Alors que quand on compare ce coût avec celui de la prise en charge, quand il y a complication, on se rend compte de l’énorme différence. Accoucher chez soi peut coûter bien plus cher’’, explique-t-elle.

Des maisons d’accueil non occupées par des femmes enceintes

Concernant le difficile accès aux villes où il y a des structures de santé, il est proposé aux femmes enceintes des maisons d’accueil. Elles ont été construites par l’Etat du Sénégal et ses partenaires, et sont destinées aux femmes à terme. Malheureusement, ces maisons ne sont pas utilisées par les ayants droit. Interrogées, certaines femmes du monde rural soutiennent qu’elles ne savaient pas qu’il y avait des maisons d’accueil construites pour elles. ‘’Nous pensons que les techniciens de la santé doivent nous informer afin que nous puissions utiliser ces logements, en cas de besoin, une fois que nous sommes à terme’’, disent-elles.

Par ailleurs, avant la bataille pour les accouchements, les techniciens de la santé doivent faire face à celle des consultations prénatales dont bon nombre de femmes peinent à respecter. La coordinatrice régionale de la santé et de la reproduction affirme : ‘’Notre problème, dans les consultations, est que les femmes ne viennent pas très tôt dans les structures de santé. Elles viennent tard. Alors que l’idéal serait qu’elles viennent dans les trois premiers mois de la grossesse. Qu’elles fassent 4 consultations prénatales. Mais beaucoup ne reviennent plus, après deux ou trois consultations.’’

NFALY MANSALY

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