Publié le 14 Feb 2024 - 12:30
SOUPÇONS DE CORRUPTION AU SEIN DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

La justice ‘’enterre’’ la crise institutionnelle

 

La justice a décidé de se saisir du dossier relatif aux soupçons de corruption au sein du Conseil constitutionnel. Un moyen pour certains d’enterrer à petit feu la commission d’enquête parlementaire de la majorité et du PDS à l’origine de la crise institutionnelle qui aura permis de reporter la Présidentielle.

 

Le 29 janvier 2024, le juge constitutionnel Cheikh Ndiaye a déposé une plainte, au parquet de Dakar, pour outrage à magistrat, diffamation, discrédit sur une décision de justice. Le parquet a décidé d’ouvrir une information judiciaire. Cette procédure rend caduque la commission d’enquête parlementaire, si l’on se fie à l’article 48 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale.

Cependant, il aura fallu attendre 15 jours, pour que le procureur se décide d'instruire la plainte du juge Cheikh Ndiaye. Une attente qui interroge. Elle aura, ainsi, permis de baliser le terrain aux députés du PDS et de BBY qui ont eu le temps de mettre en place une commission d’enquête parlementaire et de procéder au vote de la loi sur le report de l’élection présidentielle initialement prévue le 25 février 2024.

Un crime parfait, selon le mandataire du candidat Bassirou Diomaye Faye, Amadou Ba qui, sur sa page Facebook, constate : ‘’Reporter une élection présidentielle sur la base de soupçons de corruption infondés ; créer une commission d’enquête parlementaire au lieu de saisir la justice ; voter une loi de report de l’élection présidentielle sans attendre les investigations de la commission d’enquête et l’enterrer par une saisine de la justice que l’on se refusait au début.’’

Un précédent dangereux dans une démocratie fragile qui semble être déstabilisée par ses propres institutions, pense Ngouda Sall, chargé des élections à Takhawu Sénégal. ‘’N’importe quel député peut accuser d’honnêtes citoyens sans la moindre preuve pour des gains politiques. C’est grave’’, s’insurge-t-il.

Il poursuit : ‘’Ce qui est plus inquiétant, cette affaire risque de ne pas avoir aucune suite. Le règlement intérieur de l’Assemblée nationale protège le député, lors des sessions parlementaires. Aucun député ne peut être poursuivi dans le cas de l’exercice de ses fonctions, c’est-à-dire des paroles tenues en plénière ou en commission.’’

La séparation des pouvoirs mise à mal

C’est pourquoi Montesquieu n’a jamais employé l’expression ‘’séparation des pouvoirs’’, mais plutôt de ‘’pouvoir qui arrête le pouvoir’’. "Pour qu'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir".

Depuis le vote de cette loi sans débat, aucune preuve n'a encore été déposée par le PDS pour étayer ses soupçons que les juges ont été corrompus par le Premier ministre Amadou Ba.

Au-delà de cette bataille juridique, il devait y avoir une volonté de convaincre l’opinion publique pour faire passer cette loi. Des enregistrements audio ou d’autres pièces à conviction pouvaient être utilisés. Mais que nenni ! Pas de conférence de presse, encore moins de communication publique sur des cas supposés de corruption.

Au Sénégal, les partis politiques sont prompts à utiliser la moindre information contre leur adversaire, soit pour le déstabiliser ou se prémunir.

Les députés se sont contentés d’apporter leur preuve à la commission d’enquête, insistant sans cesse que les deux juges étaient corrompus par le Premier ministre pour invalider leur candidat Karim Wade.  

Manœuvres

Cette affaire n’a pas encore livré ses derniers secrets. Ce qui est intangible, c’est que le mobile de ce report est loin d’être une affaire supposée de corruption. Les manœuvres politiciennes ont pris le dessus sur la sacralité des institutions. Les déclarations du journaliste du ‘’Figaro’’ et proche de Macky Sall, Yves Thréard, en disent long sur la volonté du chef de l’État de ne pas organiser d’élections le 25 février 2024. ‘’Il a très peur que le pouvoir tombe entre des mains islamistes…’’

En outre, le titre du journal d’investigation ‘’Afrique Intelligence’’ du 4 février 2024 fortifie cette thèse : ‘’Derrière le report de l’élection présidentielle, la guerre des clans entre Macky Sall et Amadou Ba’’. Le journal, qui plonge dans les coulisses des palais en Afrique, revient de fond en comble sur le scepticisme de Macky Sall quant aux chances d’Amadou Ba de remporter le scrutin.

Ses collaborateurs, Mame Mbaye Niang, Mahmouth Saleh, Abdoul Aziz Mbaye ou l’homme d’affaires Thierno Ba se sont mobilisés pour affaiblir la candidature du Premier ministre, renseigne ‘’Afrique Intelligences’’.

À l’heure actuelle, ces manœuvres politiciennes ou cette commission d’enquête ont déjà fait trois morts, une dizaine de blessés et des centaines d’arrestations. En attendant que le dialogue naît de ce mariage forcé puisse aboutir à équilibrer les différents pouvoirs, les Sénégalais commencent à découvrir ces pièces du puzzle qui semble être une mascarade ‘’politico-judiciaire’’.

Amadou Camara GUEYE

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