Les cheminots servent des ‘’rails’’ de doléances à Add

Les travailleurs de Dakar-Bamako ferroviaire (Dbf) ont profité, hier, de la visite de leur ministre de tutelle, Abdoulaye Daouda Diallo (Add), pour exhiber un chapelet de doléances. Ils réclament, entre autres, la relance des activités de l’entreprise et souhaitent que le déficit financier, de l’ordre de 200 millions de francs Cfa, soit comblé.
Le ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, Abdoulaye Daouda Diallo, a été accueilli, hier à Thiès, par des cheminots déterminés et qui n’ont qu’un seul souci : la relance des activités de leur entreprise. Outre les lenteurs notées dans la mise en œuvre du statut juridique de l’entreprise et la liquidation de tous les contentieux causés par l’ex-régie des chemins de fer en instance au niveau de l’agent judiciaire de l’État, Mame Mbaye Tounkara et Cie demandent au gouvernement d’accélérer le processus de régularisation des agents licenciés et le versement de leurs allocations sociales.
‘’Nous réclamons un accès régulier aux infrastructures hospitalières, la régularisation de certains de nos camarades (contrats à durée déterminée) injustement licenciés par le concessionnaire Abass Jaber, le reversement des arriérés de cotisation à l’Institution de prévoyance retraite du Sénégal (Ipres) et à la Caisse de sécurité sociale, la dette de la coopérative d’habitat de Transrail qui s’élève actuellement à 80 millions de francs Cfa (…)’’, fulmine Mame Mbaye Tounkara. Ce dernier révèle tout de même que ‘’malgré ce tableau à la fois triste et sombre, les cheminots sénégalais n’ont jamais baissé les bras’’. De l’avis du syndicaliste, ses camarades et lui se sont toujours mobilisés autour de l’essentiel. ‘’Ils ont préservé la survie d’une entreprise qui fait la fierté de milliers de Sénégalais. Sa résistance n’était pas à la hauteur de celle de Lat Dior Ngoné Latyr Diop, mais elle a été inspirée de l’esprit ‘ceedo’ du Cayor, du Baol et du Sine-Saloum. Le réseau ferroviaire constitue un enjeu compétitif pour un Sénégal émergent. En 1985, le président Diouf avait déclaré : ‘Si le chemin de fer n’existait pas, je le créerais.’ Nous voulons que l’outil ferroviaire soit redynamisé’’, poursuit M. Tounkara.
‘’Nous ne voulons plus de la politique politicienne’’
Cependant, le secrétaire général du Syndicat unique des travailleurs du rail (Sutrail) ose espérer que leur entreprise pourrait retrouver ‘’la lumière, après plusieurs années d’incertitude’’, et surtout avec la signature des accords entre le Sénégal et la Turquie pour un financement de 700 milliards de francs Cfa. Ce montant est destiné aux travaux et à l’acquisition de 6 nouvelles locomotives de 100 wagons.
‘’Nous sommes convaincus que d’autres mesures suivront. Toutefois, il faut noter, dans l’immédiat, que la reprise de l’activité ferroviaire reste notre urgence. Nous attendons la réponse de l’État à nos inquiétudes. Les cheminots sont debout comme un seul homme, avec l’appui de l’État, pour relever le défi de la relance du chemin de fer Dakar - Bamako ferroviaire’’, soutient-il.
Autre syndicaliste, autre exigence. Cette fois, c’est au tour de Mame Demba Diakhaté de crier au secours devant la délégation de leur ministre de tutelle et ses collègues cheminots. Le secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs du rail (Satrail) pense que l’heure n’est ‘’plus aux discours politiques. Il réclame tout simplement un partenariat gagnant-gagnant. ‘’A l’heure où nous parlons, nous avons un gap de 200 millions de francs Cfa. Notre entreprise était au bord du gouffre. Maintenant, nous ne voulons plus de la politique politicienne. Nous voulons une collaboration gagnante-gagnante. Mais, en attendant, je demande à l’État de mettre des sous et encore des sous dans cette entreprise’’, lance Mame Demba Diakhaté.
Les retraités n’ont pas été en reste dans cette quête perpétuelle de fonds. L’ancien secrétaire général de Satrail, Madiodio Diagne, prie, quant à lui, le ministre Abdoulaye Daouda Diallo de leur payer leurs pensions de retraite. ‘’Monsieur le Ministre, payez-nous notre argent. Payez-nous !’’, insiste-t-il. Avant de nuancer : ’’Celui qui nous aide, nous allons, en retour, l’aider. Mais celui qui nous laisse tomber, nous faisons la même chose’’, renchérit le retraité.
Add rassure
Le ministre Abdoulaye Daouda Diallo n’a pas été insensible aux préoccupations des cheminots. S’exprimant au terme de la visite de chantiers, l’ancien ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique indique que les salaires vont être sécurisés et que l’État est déterminé à remettre ‘’les rails sur place’’. Dans le même ordre d’idées, une batterie de mesures a été annoncée pour relancer les activités de Dbf.
‘’Il y a quelque temps, sur instruction du chef de l’État, j’avais donné des directives à mes collaborateurs, notamment au niveau de Dakar-Bamako ferroviaire (partie sénégalaise) pour qu’ils reprennent les activités et qu’ils mettent tout en œuvre pour que cela puisse être possible’’, déclare Abdoulaye Daouda Diallo. Avant de poursuivre : ‘’Aujourd’hui, ma visite s’inscrit tout simplement dans le cadre d’un constat de mise en œuvre de ces instructions.
Ce matin, le chef de l’État l’a rappelé à la suite de la levée des couleurs, pour dire qu’il a l’ambition résolue de remettre encore le train sur les rails. Aujourd’hui, nous sommes définitivement résolus à remettre le rail sur place. Un certain nombre d’instructions et de décisions ont été prises, notamment dans le cadre de la réhabilitation de l’activité ferroviaire’’, révèle-t-il, tout en soutenant qu’en plus des deux locomotives en réhabilitation, ‘’les parties les plus atteintes au niveau de ces rails’’ vont être réhabilitées en vue d’avoir une certaine vitesse de circulation.
Le ministre des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement précise, par ailleurs, que la situation de Dakar-Bamako ferroviaire va être maîtrisée au plus tard dans les trois ou quatre mois à venir, c’est-à-dire au terme de la réhabilitation de ‘’grandes machines et wagons’’. C’est à partir de cet instant, dit-il, que l’activité ferroviaire va reprendre ses forces. Dans ce cas précis, l’État du Sénégal mettra Dbf sur ‘’orbite et cela nécessite un financement complémentaire de 700 millions de francs Cfa’’.
GAUSTIN DIATTA (THIES)