Le chef d’agence de la Sgbs Pikine et ses coprévenus risquent 3 ans ferme

Cherif Sow, chef d’agence de la Société générale de banques au Sénégal (Sgbs) de Pikine, a été attrait à la barre de la chambre correctionnelle, hier, ainsi que le directeur commercial Déthié Ndiaye et Wagane Faye, agent de terrain de la banque, pour un préjudice de 3 milliards. Le parquet a requis une peine de 3 ans ferme à leur encontre, alors que le directeur général de l’agence est en fuite.
C’est à la suite de nombreuses réclamations de clients dénonçant des activités anormales portant sur des prêts qui leur ont été alloués, alors qu’ils n’en ont pas fait la demande, que la Sgbs a investigué et remarqué un taux anormal de crédits alloués, mais restés impayés. L’administration a alors commis un huissier qui a décelé des irrégularités. ‘’Au départ, les soupçons ne se portaient pas sur les trois prévenus. C'est dans ces entrefaites que Mamadou Faye, responsable juridique de la Sgbs, a déposé une plainte contre x à la Division des investigations criminelles (Dic) qui a ouvert une enquête. Cette dernière a révélé que les sieurs Cheikh Sow, Déthié Ndiaye et Wagane Faye étaient mouillés à des degrés différents‘’, a témoigné Mamadou Faye.
Le sieur Faye a ajouté que Cheikh Sow était intervenu sur 398 dossiers frauduleux soit 87 %, Déthié Ndiaye sur plus de 200, soit 67 %, et Wagane Faye sur 28 dossiers, soit 37 %. Ils ont été arrêtés en novembre 2018.
Dans cette affaire, onze agents de la Sgbs, dont le directeur général, ont été entendus. Hier, devant la chambre correctionnelle, l'ex-chef d'agence de la Sgbs de Pikine, Chérif Sow, a nié les faits d’association de malfaiteurs, de faux et d'usage de faux en écritures de banque et d’escroquerie pour lesquels il a comparu.
En effet, depuis l'enquête préliminaire, il conteste être mêlé, de quelque manière que ce soit, à cette affaire de détournement. ‘’Je n’ouvre pas de compte. Je ne monte pas de dossier. Je ne rédige pas de contrat. Je ne valide pas de crédit. Je ne décaisse pas d'argent. On me présente un dossier avec tous les documents nécessaires pour les valider‘’, s’est-il défendu.
Le directeur commercial Déthié Ndiaye, Président de l’Union pour un mouvement progressiste (Ump-Sénégal), chargé de piloter les activités commerciales, a lui plaidé une forte cadence de travail, en cette période. À l'en croire, il avait validé plus de cinquante mille dossiers de crédit et qu’il n’a jamais fait partie du comité de crédit qui se chargeait de valider les crédits. ‘’On m'a présenté, dans mon bureau, un dossier qui présentait la forme et je l'ai validé. Personne ne maitrise mieux que moi mon travail. Je ne vérifie pas l'identité du demandeur de crédit, mais plutôt la forme‘’, a-t-il déclaré. Ajoutant n'avoir jamais fait ce qu'on lui reproche.
Dans le même sens, Wagane Faye, agent chargé de descendre sur le terrain pour vérifier la solvabilité des clients, est également chargé de recouvrement. Il a témoigné n’être au courant de rien et plaidé son innocence. ‘’Cherif Sow est mon supérieur hiérarchique. Mes prérogatives s’arrêtent à aller sur le terrain pour vérifier si les clients sont solvables ainsi que leurs garants et ensuite faire un rapport. Je fais également partie du comité de crédit. Je n’ai jamais octroyé de crédit à des comptes fictifs‘’, s’est-il défendu, avant de dénigrer le rapport de l’expert qui, selon lui, a été vague.
En effet, l’expert désigné a évoqué 7 dossiers supposés frauduleux et 21 supposés fictifs.
Malgré ces dénégations, Mes Pascal Gomis, Mbaye Sall et Moussa Sarr, conseils de la Sgbs, ont trouvé les faits établis et réclamé 9 milliards, à raison de 3 milliards pour chaque prévenu. Ils ont aussi demandé au tribunal de les condamner à telle peine plaira à la représentante du parquet. Qui a requis 3 ans ferme et rejeté la demande de liberté provisoire formulée par la défense.
La défense attaque le rapport d’expertise
Maitre Abdourahmane Sow de la défense a contré les demandes de la partie civile, en faisant remarquer ‘’qu’il n’y a pas de remise. Donc, l’escroquerie ne peut être établie’’. Il a plaidé la nullité du rapport d’expertise. Son collègue, Me Ndèye Fatou Sarr, a déclaré que ledit rapport n’est pas formel, puisqu’il n’a que des suppositions. Maitre Abdoul Daff a, lui, déploré le fait que l’expertise ordonnée par le tribunal soit soldée par la Sgbs. Quant à Me Barro, il a également contesté le rapport d’expertise qui ne vante que les mérites de la Sgbs et essaie d’incriminer ses clients.
Par contre, Me Ousseynou Gaye a pointé du doigt le directeur général de l’agence qui a pris la tangente. En effet, depuis l’enquête préliminaire, il s’est évaporé dans la nature. Selon lui, les prêts sont octroyés à des profils bien définis et que seul le back office est habilité à les valider. Il a également contesté les 9 milliards réclamés par la partie civile, alors qu’à l’enquête préliminaire, elle avait déclaré un préjudice de 10 millions. Maitre Mbaye Sène veut, lui, écarter le faux et usage de faux par faute de preuves et s’interroge sur le fait que sur les 11 individus soupçonnés, seuls les 3 prévenus doivent payer les pots cassés, alors que le Dg, seul briguant sans qui le décaissement n’est pas possible, s’est évaporé dans la nature.
Ils ont, dans l’ensemble, demandé que le tribunal les renvoie des fins de la poursuite sans peine ni dépens. L’affaire est mise en délibéré. Ils seront fixés sur leur sort ce 10 décembre.
FAMA TALL