La famille de Mouhamed Diop promet l’enfer aux ‘’assassins’’ de leur fils

Le collectif Justice pour Seydina Mouhamed est déterminé à obtenir gain de cause. Après avoir déchiré le communiqué de la police d’avant-hier, il a juré de se battre jusqu’au jour où les auteurs de la mort de leur fils seront arrêtés et jugés.
On est loin de l’épilogue dans le meurtre du jeune Seydina Mouhamed Diop qui a trouvé la mort entre les mains des policiers du commissariat de Pikine. Avant-hier, un communiqué du Bureau des relations publiques de la police nationale a donné la version des hommes de tenue.
Hier, la famille de la victime, regroupée au sein du collectif Justice pour Seydina Mouhamed, a fait face à la presse pour répondre audit communiqué. Leur porte-parole Baye Amdy Ngom a déclaré que la police s’illustre encore dans son exercice favori, chaque fois que ses agents ‘’tuent’’ des citoyens sénégalais. Il affirme que le communiqué du jeudi 28 mars 2024 est ‘’truffé de mensonges par omission et pue la manipulation’ à mille lieues’’.
Selon lui, le document de la police ne dit pas que, quand les éléments en tenue civile sont arrivés dans la maison, ils n’ont pas décliné leur identité et qualité, et qu’ils ont arrosé les occupants de la chambre d’injures avant de pulvériser du gaz asphyxiant dans la chambre pour ensuite en refermer la porte. Ce n’est qu’au bout de quelques minutes, souligne Baye Amdy Ngom, qu’ils ont rouvert la chambre pour se saisir des occupants qui avaient presque perdu connaissance.
Un récit glaçant
Après les avoir embarqués, au lieu de les conduire directement au commissariat de police de Pikine, raconte M. Ngom, ils les ont conduits dans un lieu désert du Technopole. Il était 20 h passées. ‘’C’est là-bas qu’ils ont été massacrés avec des gourdins et des pavés conçus pour le pavage des rues et trottoirs. C’est vers 1 h, soit 4 à 5 heures plus tard, qu’ils les ont ramenés à Bountou Pikine à bord du même véhicule. C’est là où des membres de la famille, qui étaient à leur recherche depuis 19 h, ont pu les voir dans le véhicule de la police en piteux état. Vers 2 h, ils ont été transportés au centre de santé Baye Talla Diop (Ex-Dominique) pour des soins. De là, vu la gravité de l’état dans lequel la torture policière les a mis, ils ont été trimballés du centre de santé Baye Talla Diop à l’hôpital Dalal Jamm, ensuite à l’hôpital Idrissa Pouye et enfin à l’hôpital Principal où le frère Seydina Mouhamed Diop a rendu l’âme dans des douleurs atroces’’, raconte-t-il.
D’ailleurs, dit-il, le certificat de genre de mort définit les causes de la mort de Seydina Mouhamed Diop par ‘’de nombreuses complications métaboliques et hémodynamiques d’un polytraumatisme avec fractures déplacées des arcs postérieurs de la 4e et de la 9e côte, contusions pulmonaires et régions fessières avec infiltration hémorragique importante, traumatisme du coude gauche’’.
Le certificat aux fins d’inhumation transmis par le commissaire de police chargé du commissariat d’arrondissement de Pikine, reprend textuellement les causes du décès mentionnées par le certificat de genre de mort. Et que l’avis de décès, d’après lui, mentionne une ‘’mort violente’’, précise-t-il.
Pire, ajoute M. Ngom, le communiqué déclare que c’est la police, en accord avec le parquet compétent, qui a requis un médecin légiste pour les besoins de l’autopsie. Pourtant, c’est la famille qui a payé la facture de 100 000 F CFA pour l’autopsie.
‘’Au regard des faits énumérés, nous dénonçons vigoureusement ce communiqué irresponsable et manipulateur de la Direction des relations publiques de la police qui vient ajouter à la douleur de la famille et des Pikinois. Nous appelons tous les Pikinois, les droits-de-l’hommistes, la société civile, à une mobilisation intransigeante afin que les auteurs de cet assassinat de Seydina Mouhamed Diop soient identifiés avec diligence et sanctionnés selon le droit’’, fulmine le porte-parole du collectif Justice pour Seydina Mouhamed Diop.
Iba Diop, le frère de la victime, confie avoir reçu des menaces d’un numéro inconnu
A ce récit, s’ajoutent les confidences du frère de la victime du nom d’Iba Diop. Il annonce qu’il a déjà été auditionné par la Division des investigations criminelles (Dic). Les autres membres de la famille, dit-il, le seront dans les prochaines heures. ‘’Je viens de la Dic où j'ai été auditionné. L'enquête suit son cours. Ils (les policiers) voulaient assassiner nos frères, car ils ont mis un gaz dans une chambre avant de les enfermer. C'est du n'importe quoi. Il faut que cela cesse. Ils ont failli tuer les frères. Il faut que justice se fasse. Ils voulaient juger Modou, l'autre qui a été arrêté. Vous imaginez cette précipitation. Le procureur a demandé le renvoi de ce dossier. Un des amis de Mouhamed a été arrêté au tribunal avant d'être libéré. Je voulais vous dire aussi que je reçois des menaces. C'est un numéro inconnu. J'ai tout mis dans le dossier avec les numéros et les contenus’’.
Le frère de la victime demande au nouveau régime de se saisir de ce dossier pour qu'il puisse être traité avec célérité. ‘’Ils nous ont promis de lutter contre l'injustice. Donc, nous les attendons sur ce point’’, lance-t-il.
Présent à la rencontre, Daouda Guèye du Frapp a confié qu’ils vont tout faire pour identifier les auteurs de cette ignominie. ‘’Rien n'est exclu, entre sit-in, rassemblements et autres. Cette diplomatie ne calme pas ces jeunes. Les auteurs ont été reconnus, donc que la justice se fasse. Cette fois-ci, cela ne passera pas. Les auteurs seront identifiés et condamnés, sinon les jeunes ne seront pas calmes. Les assassins seront identifiés et condamnés. Seul cela va calmer les jeunes qui ont le cœur lourd. Cette colère, rien qu'une enquête diligentée pourrait la calmer. On n’acceptera pas que la chose soit escamotée et qu'on tente de négocier’’, prévient M. Guèye.
AMADOU FALL