Publié le 10 Dec 2018 - 21:32
6e EDITION DES TROPHEES FRANCOPHONES DU CINEMA

‘’Félicité’’ poursuit sa razzia 

 

 74 films ont été présentés à la 6e édition des Trophées francophones du cinéma. Véronique Tshanda Beya Mputu, l’actrice principale de ‘’Félicité’’ d’Alain Gomis, a remporté le prix de la Meilleure interprétation féminine. Huit autres prix aussi ont été décernés, samedi, à Saint-Louis qui recevait la manifestation.

 

Après Yaoundé au Cameroun, l’année dernière, la ville de Saint-Louis a reçu, cette année, les Trophées francophones du cinéma. La traditionnelle cérémonie de remise des prix s’est tenue ce samedi. Le film ‘’Félicité’’ du réalisateur franco-sénégalais Alain Gomis poursuit sa razzia. L’actrice principale de ce long métrage sorti en 2017, Véronique Tshanda Beya Mputu, a été distinguée Meilleure actrice de cette 6e édition des Trophées francophones. Aux anges, la lauréate a joué la carte de la modestie. ‘’Certes, je suis contente et excitée, mais le plus important, pour moi, était de participer. C’est le 7e prix que je gagne avec ‘Félicité’. Cela ne veut pas dire que je suis la meilleure. Il y a d’autres qui sont dans l’ombre, qui sont de loin meilleurs. Ça fait plaisir de gagner, mais l’idéal, c’est de toucher les gens, leur faire plaisir à travers le jeu. C’est un grand prix comme tous les autres. Mais ça fait plaisir, car c’est dans un autre cadre’’, déclare l’actrice. Qui, pour un premier rôle dans le cinéma, a de quoi être fière.

Toutefois, elle garde la tête sur les épaules. ‘’Rien n’a changé. Je suis restée moi-même. Après les tournages, je retourne dans mon business. Je continue mes activités et je m’apprête à lancer un projet de vente en ligne, dans le secteur où j’évolue et dans lequel tout le monde me connait, la vente d’habits. J’avoue qu’avec ce film, j’ai eu plus de connaissances, mais je reste comme j’étais’’, poursuit-elle.

Après ce premier essai réussi, elle ne compte pas en rester là. Selon ses confidences, d’autres réalisateurs lui proposent des rôles. Mais ceux-ci ne sont pas à la hauteur de ‘’Félicité’’. ‘’Vous savez, avec ce film, la barre était très élevée. Donc, on ne peut plus se permettre de tout faire. Je ne peux plus me permettre de faire n’importe quoi, avec n’importe quel scénario. Je tiens à ma personnalité. Je ne vais jamais aller à l’encontre de ça. J’ai eu beaucoup de projets, mais, le moment venu, je viendrais vous en parler. On a un projet de film avec des réalisateurs franco-marocains et il doit être tourné ici à Saint-Louis’’, révèle-t-elle.

Véronique Mputu : ‘’Les moyens nous font défaut. C’est une évidence’’

Aux Trophées francophones du cinéma, se côtoient différents films du monde. Ils sont d’Afrique, d’Amérique, d’Europe, etc. Selon Véro Beya, les films occidentaux sont différents de ceux d’Afrique. Mais cela ne signifie nullement que l’Afrique n’a pas de belles histoires. C’est le manque de moyens qui pose problème. ‘’Tous les films qui sont faits en Afrique le sont avec un financement extérieur. Ça, tout le monde le sait. Après, ceux qui donnent l’argent nous imposent des choses. On ne peut pas dire que les réalisateurs occidentaux ont plus de talent ou de créativité que ceux de notre continent. Nous avons de très belles histoires à raconter, beaucoup de choses à faire découvrir au monde. Les moyens nous font défaut. C’est une évidence’’, insiste Véronique Tshanda Beya Mputu.

Samedi, le Trophée francophone de l’interprétation masculine a été attribué à Ahmed Magdy pour son rôle dans ‘’Ali, la Chèvre et Ibrahim’’. Celui du second rôle féminin 2018 est allé à Diamand Abou Abboud qui a été magnifique dans ‘’L’insulte’’. Arieh Worthalter a eu droit au prix de la deuxième Meilleure interprétation masculine, grâce à ‘’Le Razzia’’. Le réalisateur Robin Campilo a eu droit au trophée de la Meilleure réalisation, pour son film ‘’120 battements par minute’’.

Les prix du scénario, du court métrage, du long métrage documentaire et du long métrage de fiction ont été remis, respectivement à Ziad Doueiri et Joëlle Touma pour le film ‘’L’insulte’’, au réalisateur Mehdi Barsaoui, auteur de ‘’On est bien comme ça’’, à Dieudo Hamadi pour ‘’Maman colonelle’’ et à Philippe Van Leux ‘’Une famille syrienne’’.

A propos des trophées du cinéma francophone

Véritables ‘’Oscars’’ des cinématographies de la Francophonie, les Trophées francophones du cinéma célèbrent, chaque année, la richesse et la diversité du cinéma des pays de la Francophonie. Cette manifestation annuelle et itinérante, selon ses organisateurs, a pour objectif principal d’encourager la diversité et la liberté de création cinématographique au sein des pays de la Francophonie, d’attirer l’attention des publics sur ces cinémas et d’y stimuler le dynamisme de leur filière audiovisuelle.

Selon le réalisateur mauritanien et président de l’Association des trophées francophones de cinéma (Atfc), Abderrahmane Sissako, ‘’ce qui nous unit, c’est le langage cinématographie, un cinéma porteur de valeurs et qui a du sens. Cette 6e édition fait le constat de la production du moment. Il y a une thématique qui parle des valeurs et la qualité est au rendez-vous. C’est une chose à laquelle nous tenons. Notre rôle est de rendre visible les films et ceux qui les composent. Il sera question de mettre la lumière sur eux’’, explique M. Sissako.  

Embouchant la même trompette, la vice-présidente de l’Atfc a expliqué qu’avec ce festival, leur association met en avant et valorise le cinéma du monde francophone. Ainsi, les pays concernés ont chacun le droit de présenter 3 longs métrages pour la compétition et autant de documentaires et un court-métrage. ‘’Ces films, pour nous, constituent une collection et la vitrine du cinéma francophone. L’envie est de pouvoir le faire découvrir par le maximum de personnes. Cette année, le film d’Alain Gomis a permis d’attirer plus d’attention. Chaque année, le pays qui l’organise est qualifié d’office. Il y avait 74 films au départ. C’était la première fois qu’on en a autant’’, a-t-elle dit.

Pour tout ce qu’il a fait pour le cinéma africain, le réalisateur sénégalais Moussa Touré a été honoré, lors de la soirée. ‘’Je suis honoré cinématographiquement. Quand on parle de francophonie, c’est parce qu’on a gobé le français (sic). Je voyais ma mère suivre des films français, alors qu’elle ne comprenait pas la langue. J’ai passé toute ma jeunesse à faire des films et du cinéma. Venir dans un endroit où mes parents sont nés est comme un retour aux sources’’, a dit l’auteur de ‘’La pirogue’’.

REACTIONS

SHERIF EL BANDARAY (REPRESENTANT PRIX MASCULIN INTERPRETATION)

‘’Heureux que ce film soit diffusé partout dans le monde’’

‘’Le film parle d’Ali et d’Ibrahim qui viennent de deux quartiers populaires. Le premier est amoureux d’une chèvre, alors que le second entend des voix dans sa tête. Les deux vont faire un voyage en Egypte pour trouver des solutions à leurs problèmes. Il s’agit de deux personnes qui ne sont pas acceptées par la population. Elles sont rejetées, car on ne les accepte pas. Je suis très content de ce trophée. Je suis heureux aussi, parce que ce film est diffusé un peu partout dans le monde, en dehors des pays arabes. C’est une joie immense pour moi.’’

HELENE DALIS (MONTEUR DE ‘’MAMAN COLONELLE’’)

‘’Ce film raconte les violences sexuelles’’

‘’Ce film raconte l’histoire d’un colonel de police qui travaille à l’est du Congo, au niveau de la brigade de lutte contre les violences sexuelles et la protection de l’enfance. Pour nous, ce prix est une fierté, une reconnaissance vis-à-vis du travail accompli. Le fait qu’il puisse être vu dans le monde et dans les festivals est une bonne chose. Il a fait plusieurs festivals et à gagner des prix aussi. Nous en sommes vraiment fiers.’’

 

MOUSSA TOURE (CINEASTE ET MEMBRE DU JURY)

‘’On a eu vraiment de bons films, mais…’’

‘’On a eu vraiment de bons films. Il y a d’abord une première sélection et, nous, nous sommes intervenus dans la deuxième. Tous les films étaient magnifiques. Il était difficile de faire un tri, mais il fallait choisir. Et le choix s’est porté sur les meilleurs. J’avais des frissons, car tous se valaient. A notre niveau, il y avait de bons films. Ce n’est pas le nombre de films, mais les nominations. Ce qui nous aide à départager les beaux films, c’est la qualité.

Tout le niveau était là, mais il y avait vraiment des films de haute qualité. Dans une sélection comme ça, en sus des bons films, il y a des auteurs qui vont faire la différence. On peut avoir deux bons films avec de bons comédiens, mais l’un a plus de hauteur que l’autre. Quand on parle de francophonie, on oublie souvent les Arabes qui ont un bon niveau. La Francophonie ne se limite pas uniquement à la France. On a dépassé ce stade. Il y a des films et des documentaires qui sortent et qui parlent d’Africains et qui sont très bons.’’

CHEIKH THIAM

 

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