Publié le 15 Oct 2012 - 19:28
CAN 2013-CLUB, JOUEURS, JOURNALISTES, TECHNICIENS, PUBLIC, ETAT

Nous sommes tous responsables !

Sous le regard médusé des Lions et des Éléphants, les supporters sénégalais déchirent le drapeau national.

 

 

Il est temps de se regarder en face et de se dire des vérités. Au Sénégal, on contourne toujours les problèmes pour ne pas les poser.

Une anecdote pour commencer. Feu Yékini, l’ancien buteur de l’équipe nationale du Nigeria, avait prononcé ceci après la défaite du Sénégal en match d’ouverture de la CAN 92 : «Je n’ai jamais vu des supporters applaudir une équipe visiteuse qui venait de battre le pays organisateur». C’était unique en Afrique, maintenant nous sommes comme tous les autres. Ça fait tout juste 20 ans et où ? Au Stade qui porte le nom de LSS … Quel dommage ! Depuis lors, que de frustrations et d’amateurismes pour arriver à ce résultat imputable à tout un chacun.

Nous sommes tous responsables : le public, les dirigeants, les joueurs, les techniciens, les journalistes sportifs et l’Etat. Nous avons fait croire à ce peuple que nous pouvons gagner la Coupe d’Afrique en sautant des étapes, sans organisation, sans clubs forts, mais en profitant d’une disposition de la FIFA permettant aux binationaux de revêtir le maillot national ou avec une génération spontanée comme en 2002. Oui ! Nous avons failli y arriver mais ce serait trop facile. La victoire est toujours au bout de l’effort.

Les Clubs. Nous avons toujours des clubs amateurs. Aucun club Sénégalais n’est structuré professionnellement. Je dis bien aucun. S’il y en a un, qu’on nous le signale ! Mais on proclame sur tous les toits que nous faisons du professionnalisme au Sénégal, alors qu’aucun club n’a les moyens de payer régulièrement ses joueurs et avec la complicité de la «Ligue Professionnelle» de Football et de la Fédération.

Nous voulons développer notre football en passant par les «navétanes», qui durent maintenant plus que les vacances scolaires et se terminent bien après l’ouverture des classes. Les «navétanes» étaient un prolongement naturel des compétitions UASSU où on retrouvait les élèves qui jouaient dans leurs villes d’origine et retournaient à leurs chères études après les vacances.

Maintenant, on nous donne comme références, des clubs issus des «navétanes», alors que dans les pays de Football, les clubs portent des noms de grande ville : Paris, Marseille, Lille et Lyon en France ; Milan, Rome, Turin ou Naples en Italie ; Madrid et Barcelone en Espagne ; Arsenal, Chelsea à Londres ou Manchester en Angleterre et j’en passe. Même la Fédération de Football s’est «nawétanisée».

Les joueurs. Oui, les joueurs avec leurs dirigeants qui taillent ou retaillent l’âge des joueurs locaux. Combien de joueurs ont réellement moins de 23 ans dans notre équipe olympique ? Combien de joueurs ont moins de 18 ans dans celle qui a été éliminée par le Bénin la semaine dernière ? On peut se poser la même question à toutes les catégories. Que fait la Fédération ?

Les journalistes. Je me permets de vous critiquer vous les journalistes sportifs sénégalais qui font croire au public sénégalais que nous avons les meilleurs joueurs d’Afrique avec les binationaux et que nous sommes capables de remonter facilement 2 buts à cette équipe ivoirienne, double finaliste de la CAN avec les mêmes joueurs qui, pour la plupart, sont formés en Côte d’ivoire et se retrouvent facilement en sélection.

Faire croire à ce public très jeune que nous avons les meilleurs buteurs d’Europe dans notre équipe nationale «capables de faire basculer un match comme Zlatan». Et pourtant, l’histoire récente de la Coupe du monde 2002 nous a montré que nous avons battu la France de Trézéguet (meilleur buteur d’Italie), Henry (meilleur buteur d’Angleterre) et Djibril Cissé (meilleur buteur de France). Cette équipe de France est rentrée sans marquer le moindre but en 2002. La toute dernière CAN 2012, nous nous sommes plantés en revenant de BATA avec zéro point et pourtant, Demba Ba, Papiss Cissé, Mamadou Niang, Moussa Sow, Issiar Dia étaient tous présents à cette CAN. Les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Les techniciens du Football. En commençant par notre entraîneur Joseph Koto, qui n’est pas «mort» avec ses idées, mais avec celles des autres, car il s’est permis de mettre le même dispositif qui a été reproché à son prédécesseur Amara Traoré, à savoir un 4-4-2 avec 4 avants-centres. Comme prévu, une équipe sans liens ! Et il est passé à côté de la plaque. Demba Ba et Papiss Cissé marquent rarement ensemble, y ajouter un 3ème avant centre, Moussa Sow, ne fait qu’augmenter la confusion et dégarnir notre milieu de terrain.

Tous les techniciens «unis» dans la DTN (Direction technique nationale) regardent faire et se frottent les mains, en pensant récupérer la place à la prochaine déroute. Quel Dommage !

Le public Sénégalais. Soyons réalistes et regardons les choses en face. Un vrai supporter se paie son billet pour aller regarder son équipe. Ce n’est pas comme le militant à qui on paie le manger, le transport et le tee-shirt pour aller à un meeting. Les supporters sont utilisés comme des militants de parti politique. Un supporter se prépare pour les grandes occasions avec ses propres moyens, pas avec l’aide de son Ministre, de son Député ou de son Fan’s Club de joueur pour aller au Stade.

L’Etat ? On ne peut pas gagner des titres sans investir dans le football ; nous n’avons gagné aucun titre Africain depuis 1960. Et nous pensons toujours gagner chaque fois qu’on participe. N’est pas le Danemark qui veut (NDLR : Le Danemark, vainqueur de l'Euro de football en 1992 à la surprise générale, n'avait dû sa participation à la compétition qu'à l'exclusion de la Yougoslavie). L’Etat distribue des voitures 4x4 aux mouvements «navétanes» avec comme finalité la récupération des foules de supporters comme base politique. Le revers de la médaille, nous l’avons eu samedi et ce n’est qu’un début si on ne s’arrête pas. C’est grave !

L’Etat doit accompagner les clubs dans la reconstruction de notre football. En quoi faisant ? 1. Mettre en place des clubs forts, de haut niveau, structurés et supervisés. 2. Mettre en place un championnat National couvrant tout le territoire. 3. Accompagner les clubs lors de leurs campagnes Africaines et pendant au moins 5 ans avec comme objectifs au moins une finale de Coupe d’Afrique. 4. Avoir des infrastructures de qualité pour les entraînements en collaboration avec les collectivités locales. 5. Élaborer un autre cahier des charges pour un championnat Professionnel digne de ce nom.

Regardons ce que font les autres, parce que nous ne sommes pas les meilleurs dans ce domaine. Aucun de nos clubs actuels n’a un budget permettant de participer à une coupe Africaine. Rares sont ceux qui respectent le cahier des charges du Professionnalisme à la sauce sénégalaise. Allons voir ce que font les autres, comme le font les autres pour notre administration et notre démocratie naissante qui est une référence en Afrique.

Il est temps de s’arrêter pour repartir sur de nouvelles bases et de bonnes bases. Profitons de la sanction exemplaire qui va s’abattre sur le Sénégal, pour essayer de rebâtir notre football. Les compétences existent et sont sur place ou dans les instances internationales.

Sportivement.

Mbar FALL

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