Publié le 5 Mar 2014 - 11:07
CRIMEE

Comment annexer un pays en 4 leçons

 

L'escalade des événements en Crimée n’est pas sans rappeler la guerre froide. Les enjeux ne sont plus les mêmes, la menace d’une pulvérisation nucléaire de la planète n’est plus d’actualité, néanmoins, des mécanismes refont surface. Du Coup de Prague jusqu’à la crise géorgienne, des Soviétiques aux Russes, le Kremlin a en la matière un scénario sous le coude très bien rodé. C’est une recette que l’on se transmet de président en président, en Russie mais pas seulement. Pour bien annexer un territoire, il faut donc :

1 - Des passeports.

C’est la base. Le territoire annexé doit abriter des concitoyens coupés de la mère patrie. En l’occurrence en Crimée, ce n’est pas ce qui manque. Les Russes, pas seulement russophones mais Russes avec passeport russe, sont en Crimée plus de 60%, auxquels s’ajoutent tous ceux à qui Moscou distribue en ce moment des passeports gratuits ! Ils sont Russes, se sentent Russes et ils le disent : "Poutine est notre Président, ce qui se passe à Kiev ne nous concerne pas". Ils ont pour eux l’Histoire qui rappelle que depuis le XVIIIe siècle, Sébastopol est Russe et ce n’est qu’en 1954 que la Crimée est rattachée à l’Ukraine. On vivait de l’autre côté du mur URSS, où les frontières et l’indépendance des républiques socialistes vis-à-vis de Moscou n’avaient pas beaucoup de sens.

2 - Un appel à l’aide.

Pour déclencher une action, le mieux, c’est d’être appelé à l’aide, de manière à ne pas passer pour un envahisseur, mais pour un sauveur. Des manifestants se réunissent pour dire "non" à cette Ukraine qui change. Ils désignent un ennemi inquiétant, les "fascistes" de Kiev. Ils disent avoir peur. La présence du parti d’extrême droite Sloboda, minoritaire parmi les manifestants de Maidan, permettant des amalgames pratiques.

En Crimée, le parlement est tenu par des commandos russes, le drapeau russe flotte sur le bâtiment et les députés votent les pouvoir à un nouveau gouverneur pro-russe. Sergi Aksionov demande illico à la Russie d’intervenir pour restaurer le calme. Mais le mieux reste encore d’avoir un président déchu mais toujours en vie, qui demande l’intervention. Ianoukovicth depuis Rostov sur le Don est même allé titiller Poutine et disant que connaissant son caractère, il était étonné "de la retenue" du président russe. Le résultat n’a pas traîné. 2000 hommes envoyés par avions et hélicoptères dans la soirée.

3 - Des soldats qui font peur.

Ils sont d’abord venus de la base de la flotte de la mer Noire, stationnée en Crimée, à Sébastopol, et qui normalement ne sortent pas de leur périmètre. Commando-marine russe dont l’efficacité n’est plus à prouver, aidé par des forces spéciales. Pour que tout le monde se mélange, ils enlèvent les écussons de leur unité. Mais ensuite, les renforts sont arrivés de Russie directement par avion et par hélicoptère. Ils ont franchi la frontière.

Techniquement, cela s’appelle une invasion mais elle sera présentée par Moscou et les autorités de Crimée comme une aide. Une aide pour les uns, une menace dissuasive pour les autres. Obama a-t-il envie de relever le gant et de demander à l‘OTAN de se mobiliser ? Il préfère l’OSCE. On ne joue pas au bras de fer impunément avec Poutine. Nous revoilà à un niveau de crispation qui nous renvoie à la guerre froide. (yahoo.com)

4 - Un habillage légal.

Si rien ne bouge, si les soldats russes tiennent le pavé sans être inquiétés, l’état de fait sera installé. D’autant que l’amiral Berezovski qui commande la flotte ukrainienne de Crimée a tourné casaque, se mettant sous l’autorité du gouvernement local pro-russe. Il ne restera qu’à trouver un habillage légal. Il est déjà prévu ! Le 30 mars, la Crimée votera par referendum sur son autodétermination, pour dire si oui ou non elle veut prendre son autonomie vis-à-vis de l’Ukraine. La réponse est déjà connue. Ce sera oui. La Russie sera l’un des rares pays du monde à reconnaître cette décision et le tour sera joué.

 

 

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