Publié le 10 Jun 2025 - 23:54
FATOU, 18 ANS DE SERVICE… ET ZÉRO RECONNAISSANCE

Plaidoyer pour une vraie protection des travailleurs au Sénégal

 

‘’Monsieur, je n’ai même pas eu droit à un mot. Ils m’ont  dit que mon contrat s’arrêtait là, que je pouvais rentrer. Dix-huit ans de service et rien’’. 

Ces mots, poignants, sont ceux de Fatou, 53 ans, femme de ménage dans une entreprise de la place. Pas de lettre de préavis. Pas de certificat de travail. Pas d’indemnités. Juste un renvoi brutal, après presque deux décennies de service. 

Fatou, c’est le visage d’une réalité encore trop fréquente au Sénégal : celle de milliers de salariés précaires, souvent invisibles, peu ou pas protégés, parfois même dans des entreprises structurées. Pourtant, le droit du travail existe, clair et précis. Il encadre, protège et sanctionne.

Une protection légale solide… mais trop souvent ignorée

Le Code du travail sénégalais, en son article L.1, dispose que ‘’le présent code régit les relations entre les employeurs et les travailleurs’’. L’esprit de cette loi est de garantir la dignité, la sécurité et la stabilité du salarié. Pourtant, de nombreuses dispositions sont encore bafouées :

          L’absence de contrat écrit (article L.36)

          Les licenciements sans motif ni procédure (articles L.42 à L.51)

          Le non-paiement des droits à congés (articles L.147 à L.149)

          L’absence de bulletin de paie (article L.143)

          La non-déclaration à la Caisse de sécurité sociale (article 2 de la loi n°75-50 du 3 avril 1975)

Ces infractions, en plus d’être illégales, participent à fragiliser socialement et économiquement des milliers de familles.

Le SMIG : un repère souvent foulé aux pieds

Le décret n°2022-2299 du 28 décembre 2022 fixe le salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) à 64 223 F CFA brut pour 173,33 heures de travail par mois, soit 40 heures par semaine. Ce seuil, censé assurer un minimum vital, est encore contourné dans de nombreux secteurs.

Certaines pratiques restent courantes :

          Paiement en dessous du SMIG

          Heures supplémentaires non rémunérées (article L.138)

          Retenues arbitraires sur les salaires

          Absence de couverture sociale malgré la législation en vigueur

L’absence de contrôle, un facteur aggravant

Les inspections du travail, prévues aux articles L.270 à L.274, sont encore trop rares. Quant aux contrôles de la Caisse de sécurité sociale (articles 7 à 11 du Code de la sécurité sociale), ils peinent à couvrir l’ensemble des entreprises. Sans mécanismes de contrôle renforcés, les violations se multiplient, dans une impunité quasi totale.

Responsabilité collective : RH, juristes, syndicats, employeurs

La protection du travailleur est une responsabilité partagée. Les professionnels RH, les juristes, les représentants syndicaux et les employeurs doivent : informer et former les travailleurs sur leurs droits, refuser de signer ou d’appliquer des procédures illégales, dénoncer les abus, accompagner les victimes dans leurs démarches administratives ou judiciaires.

Fatou ne réclamait pas d’argent, juste du respect

‘’Je veux juste qu’on ne traite plus personne comme ça’’, a-t-elle murmuré. Son histoire est un cri du cœur. Une leçon d’humanité. Une alerte sociale. 

En conclusion : faire vivre le droit, pour toutes les Fatou

Appliquer le Code du travail, ce n’est pas seulement respecter la loi. C’est garantir à chaque travailleur sa dignité. C’est participer à un climat social apaisé. C’est bâtir une économie durable, inclusive, juste. Car derrière chaque poste occupé, il y a une vie. Derrière chaque bulletin de salaire, une famille. Derrière chaque Fatou, une réalité qu’on ne peut plus ignorer.

 

Papa Abdoulaye Ndiaye

Gestionnaire de Paie et RH

ndiayepapaabdoulaye@outlook.com

77 262 21 28

 

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