Publié le 20 Jun 2021 - 22:10
GRAND’PLACE AVEC DR CHEIKH DIENG, MANDATAIRE GENERAL DU PDS AUX LOCALES

“Le PDS demeure le recours du peuple sénégalais pour sortir de la galère’’

 

Dr Cheikh Dieng fait de la politique, depuis bientôt 30 ans, mais on tenterait de lui donner cet âge, en le voyant avec sa petite taille, plein d’humour et d’entrain. D’And Jëf/ PADS où il a appris ses premières leçons en politique, il a rejoint le Parti démocratique sénégalais. Depuis 2002, il est aux côtés du Président Abdoulaye Wade qui reste son leader, même si Dr Dieng assume être un Karimiste. Son titre de docteur pourrait facilement faire croire qu’il est soignant, mais il est médecin d’un autre genre. D’une ambition de chirurgien, il passe à médecin de l’humanité, environnementaliste. Très peiné par la déclassification d’une partie de la bande des Filaos, il partage ici toute son amertume, mais surtout, sa peur des conséquences écologiques, économiques, environnementales que cela aura. Ancien enfant de troupe, il a un parcours brillant de l’école primaire au doctorat.

 

Vous êtes le secrétaire nation adjoint chargé des élections. Comment s’organise votre parti, en vue des prochaines locales ?

Depuis la mise en place du secrétariat général national, je suis nommé au poste de secrétaire général national adjoint chargé des élections. Récemment, je suis désigné mandataire général auprès de l’administration, d’une manière générale. Ainsi, je suis chargé des démarches administratives. En tant que mandataire, je dois suivre le processus électoral et veiller à ce le PDS soit à jour, à toutes les phases du processus électoral, par rapport aux termes du Code électoral. J’ai également en charge la mobilisation, l’organisation du Parti pour que nous puissions participer dans les 559 collectivités territoriales et gagner le maximum de ces dernières, pour répondre à la demande des Sénégalais, à leur appel. Le PDS demeure le recours du peuple sénégalais pour sortir de la galère. Les élections locales à venir sont la première étape d’une marche victorieuse vers le retour du PDS, en 2024, à la présidentielle. Pour nous, ces élections locales sont une première étape décisive qui correspond, par ailleurs, à la manifestation du rejet total, par le peuple sénégalais, de la politique initiée par le Président Macky Sall depuis 2012, au regard des nombreux échecs et déceptions que le peuple sénégalais a enregistrés, dans la mise en œuvre des engagements trahis, différés de ce gouvernement.

Les dernières sorties du Président laissent croire le contraire. Ses partisans soutiennent que ces bains de foule que s’offre Macky Sall sont la manifestation de la satisfaction des populations…

Ces sorties politiques du Président Macky Sall, sous le couvert de tournée économique, sont la manifestation de son désarroi. Le Président Macky Sall a été secoué, durement secoué par les évènements de mars dernier. Ils ont ébranlé son régime et qui lui ont montré le rejet de sa personne par le peuple sénégalais qui voulait en découdre avec lui. C’est un peuple qui voulait se débarrasser de son chef par des voies antidémocratiques. Heureusement que l’opposition a été suffisamment mature, pour ne pas tirer les manifestations jusqu’à la chute du régime qui aurait indubitablement marqué une perturbation de l’ordre constitutionnel dans ce pays. L’opposition sénégalaise a été suffisamment mature pour répondre positivement à la requête des chefs religieux, en particulier le Khalife général des Mourides, pour stopper les manifestations qui, inéluctablement, auraient conduit à la chute du régime. Ce qui serait dommage pour l’ordre constitutionnel de notre pays et risquait, par ailleurs, de plonger le pays dans un chaos politique dont l’issue serait incertaine.

C’est après ces secousses, ce désamour entre le Président et son peuple que, dans un sursaut de désarroi, il organise des bains de foule pour se donner encore l’illusion d’une adhésion des populations à sa politique. Ce n’est pas difficile pour un chef de l’Etat de mobiliser des centaines et des milliers de cars à travers tout le pays et de les rassembler en un point précis, à un moment précis, pour s’offrir des bains de foule. J’ai moi-même assisté, à Djidah Thiaroye Kao, devant le siège de Harouna Dia qui est dans ma commune à la location de 6 cars remplis de militants qui provenaient de ma commune en direction du Fouta. Les personnes étaient ‘’louées’’ à 30 mille FCFA pour la tournée.

Qui les a engagés, Harouna Dia ?

Je ne sais pas. En tous les cas, le départ était pris à partir du siège de Harouna Dia dans ma commune. Nous avons conscience des stratagèmes ourdis par le pouvoir pour se donner l’illusion de bains de foule à travers le pays. Mais, cela n’ôte en rien la dureté des conditions de vie des populations. Quand des jeunes sont capables de ‘’louer’’ leur personne à 30 mille FCFA pour aller applaudir le Chef de l’Etat à Matam, cela traduit l’échec du Président Macky Sall quant à sa politique de jeunesse. Cela traduit le désarroi et le désespoir de ces jeunes qui n’ont d’autres alternatives pour survivre que de ‘’louer’’ leur personne à travers des meetings. Ces jeunes qui sont réduits à faire cela vont demain voter pour celui qui les a plongés dans cette galère et cette misère ?

Sur quoi vous basez-vous pour dire que le PDS est le recours qu’attendent les Sénégalais ?

Nous avons encore en mémoire très fraîche la tournée nationale que le PDS a achevée, le mois dernier, qui nous a conduits dans les 45 départements du pays. Nous avons noté les complaintes des militants, des responsables et de gens qui n’ont jamais milité au PDS. Ces derniers ont spontanément répondu à l’appel du Parti, pour signifier les regrets du peuple sénégalais par rapport à la situation de relative abondance que nous vivions à l’époque du Président Abdoulaye Wade, comparée à la misère sociale et économique que le peuple sénégalais vit, aujourd’hui. La misère économique se traduit par une hausse du prix de toutes les denrées de première nécessité, avec une incapacité de l’Etat à agir pour juguler ces  prix. Le prix du riz a augmenté de 25%, celui de l’huile de 30%, celui du savon de 15%. Il en est de même pour le prix des légumes et de la viande.

Aujourd’hui, les Sénégalais ne peuvent simplement pas manger. Pourtant, c’est la première étape dans l’échelle des besoins de Maslow. On ne peut même pas la satisfaire. Cela traduit la misère économique et sociale que vivent les Sénégalais. La politique extravertie, les investissements irréfléchis, le manque du sens des priorités du Président Macky Sall ont plongé aujourd’hui notre pays dans cette crise. Face à cela, les Sénégalais ont la nostalgie du Président Wade. Avec lui, au moins, nous avions de bonnes récoltes, les salaires avaient au moins doublé, les denrées étaient à portée de main, il y avait du travail et l’argent circulait. Aujourd’hui, on ne parle plus de l’argent qui circule, mais on dit qu’il n’y a plus d’argent dans ce pays.

Cette situation d’inflation généralisée est le premier symptôme d’un ajustement structurel dans lequel le FMI et la Banque mondiale nous ont plongés, sans que le Président Macky Sall ait eu le courage de l’assumer devant le peuple sénégalais. L’absence de réactions face à l’inflation généralisée avec le blocage des salaires, des recrutements dans la fonction publique, la hausse vertigineuse de la dette intérieure du pays qui a plombé toutes les entreprises du Sénégal, sont les signes manifestes d’un ajustement structurel. Nous en vivons les contrecoups.

Peut-on vraiment tenir Macky Sall et son gouvernement pour responsable de cette inflation, sachant qu’il y a une crise sanitaire mondiale aux multiples incidences et conséquences ?

On n’a jamais eu une inflation à ce niveau dans ce pays. Nous n’avons jamais eu dans ce pays une crise qui a atteint le niveau de la double crise financière et pétrolière que nous avons traversé, avec le Président Abdoulaye Wade en 2010. Aujourd’hui, cette crise sanitaire, d’ailleurs très mal gérée, aurait dû être un bon prétexte pour que le Président Macky Sall réoriente sa politique vers le soutien à l’entreprise sénégalaise, en particulier les PME et PMI, pour faire redémarrer l’économie. Que le Président Macky Sall soutienne la production et la consommation des produits locaux pour atténuer le poids des importations surtout alimentaires dans la balance commerciale de notre pays. C’aurait été un bon prétexte pour renoncer à des dépenses de prestige comme l’achat clandestin de son Airbus, si tant soit peu il avait conscience des impacts de la crise sur le petit ‘’badola’’ sénégalais. C’est bien parce que le Président Macky Sall n’en a cure qu’il organise ses déplacements politiques qui, jusque-là, ont coûté 2 milliards de FCFA à notre budget.

Sur quoi vous basez-vous pour dire que ces tournées ont coûté deux milliards au contribuable sénégalais ?

Nous avons une bonne expérience de ces types de mobilisation. Nous savons combien cela coûte, parce que le PDS l’a fait, quand il était au pouvoir. Le PDS est un grand parti qui a organisé de grandes manifestations. Nous sommes donc en mesure de dire combien cela coûte. Nous sommes des politiques autant que le Président Macky Sall. Je puis vous assurer que le déplacement entre Fatick, Kaffrine, etc. a coûté un milliard FCFA. Celui du nord a coûté plus d’un milliard FCFA. Le Président Macky Sall est en train de jeter l’argent du contribuable par la fenêtre. Il n’a aucune conscience des impacts de la crise sanitaire et de la misère dans laquelle vit son peuple.

Mais si le PDS a mobilisé autant d’argent pour de pareilles manifestations dans le passé qu’est-ce qui peut empêcher Benno Bokk Yakaar d’en faire autant ?

Le PDS l’a fait et a été dégagé du pouvoir en 2012. Cela signifie que Macky Sall est aujourd’hui sur la voie pour être dégagé en 2024. Macky Sall aurait été beaucoup plus intelligent, en tirant les leçons de ce que le PDS a fait de moins bien, de 2000 à 2012. Ce type de manifestations dispendieuses n’est pas vraiment ce qu’attend le peuple sénégalais de son dirigeant.

 

Vous semblez très optimiste quant à l’issue des prochaines locales. Or, depuis 2012, le PDS a été affaibli par des départs et pas des moindres. Sur quoi fondez-vous votre optimisme ?

Le PDS a été durement attaqué, humilié, emprisonné, trainé dans la boue, frappé par le Président Macky Sall, de 2012 à nos jours. Mais, le PDS a su faire montre d’une capacité de résilience que personne n’aurait pu imaginer. Quelqu’autre parti aurait subi autant de brimades, d’emprisonnement et d’injustice de la part d’un pouvoir, aurait simplement disparu du landerneau politique et c’était cela la perspective du Président Macky Sall. C’était sans compter sur la capacité de résilience du parti, sur l’aura du Président Abdoulaye Wade dont l’éclat continue encore aujourd’hui de guider les lignes du PDS et d’attirer des masses vers notre parti, au-delà de ce qu’on peut imaginer. Il est vrai que le PDS a perdu des hommes depuis 2012. La plupart ont été contraints à la transhumance ou réduits au silence  par le Président Macky Sall à travers des dossiers judiciaires. Mais, l’essentiel de l’ossature digne et debout du PDS est resté avec le Président Wade.

 A côté de cette ossature, nous avons eu énormément de ralliements, pendant l’emprisonnement de Karim Wade, par exemple. Vous ne pouvez pas imaginer combien de mouvements karimistes sont nés à Dakar, au Sénégal et dans la diaspora, entre 2012 et 2015. Aujourd’hui, tous ces mouvements karimistes se sont bonifiés face à l’injustice que leur leader Karim Wade a subie. D’un autre côté, les bases traditionnelles du PDS ont vu le retour des militants dont le dirigeant local avait transhumé. Ils se sont rendu compte que leur transhumance ne leur a rien apporté substantiellement et leur cœur est resté avec le PDS. Ce qui fait que le parti a, d’une part, reconstitué sont noyau politique originel et, d’autre part, s’est renforcé avec les mouvements karimistes. C’est cela qui fonde notre conviction que le PDS est la seule alternative face à l’échec constaté du Président Macky Sall.

Ces mouvements Karimistes ont affaibli le parti. Certains ténors leur en veulent d’avoir pris leur place. On dit même qu’au PDS, il faut être aujourd’hui proche de Karim pour être promu.

En lisant l’organigramme du PDS, vous verrez que ceux qui sont issus de ces mouvements ne sont pas du tout aux commandes dans la direction. Les gens peuvent se faire leur propre opinion sur la question.

Etes-vous Karimiste ?

Oui ! En fait, le Karimisme, si on put dire, ce sont tous ces gens qui pensent aujourd’hui que Karim constitue une alternative, en tant que candidat à la présidence de la République pour remplacer Macky Sall. De ce point de vue, je suis bien Karimiste, parce que je crois en une candidature gagnante de Karim Wade face à Macky Sall. C’est d’ailleurs ce qu’a très tôt compris ce dernier. Dès le lendemain de son installation à la présidence de la République, il s’est retourné vers Karim Wade pour le détruire. Il a compris bien avant la plupart des dirigeants et responsables du PDS que Karim était la principale menace qui pouvait entraver son deuxième mandat qu’il préparait déjà, dès le premier jour de sa première investiture. Karim est pour moi un ami, un interlocuteur avec qui je travaille à construire, à consolider les bases du PDS. Cela s’arrête là. Mon leader reste et demeure le Président Abdoulaye Wade.

Au sein du PDS, avez-vous discuté de l’opportunité de faire de Karim Wade votre candidat en 2024 ?

Il y a des procédures au PDS. Le candidat pour la Présidentielle est nécessairement investi par le parti. De ce point de vue-là, le PDS n’a pas encore désigné un candidat pour 2024. Nous ne sommes pas encore à l’échéance de 2024, mais évidemment, Karim qui était le candidat empêché en 2019 se positionne très fortement pour être encore le candidat du PDS en 2024.

N’avez-vous pas peur que le scénario de 2019 se répète, sachant que votre candidat ne sera pas là pour battre campagne ?

Vous pensez que Karim ne sera pas là en 2024, non, quand même… Le PDS n’est pas un petit parti. Les responsables du PDS ne sont pas des enfants de cœur. Ils peuvent avoir été surpris une fois par le Président Macky Sall qui, à travers cette décision d’exil, de déportation de Karim Wade, a violé tous les lois et règlements de notre pays. Nulle part dans le Code de procédure pénale, la déportation n’est mentionnée. Au-delà de cela, le Président Sall s’est mis en marge des règlements de la communauté internationale, en installant le Sénégal dans la situation d’un Etat voyou qui refuse de répondre à ses exigences de droit, au plan international. Autant, la Cour de la CDEAO que les Nations unies ont demandé la reprise substantielle du procès qui avait conduit à la condamnation de Karim Wade, en raison des violations graves de ses droits, lors de la procédure judiciaire. Toutes ces injonctions ont été royalement ignorées par le Président Macky Sall. Nous avons appris les leçons de 2019, 2024 sera différent.

Karim Wade sera là ?

Je pus vous assurer qu’il sera là pour conduire les troupes.

Vous occupez une place stratégique au PDS, mais on ne vous connait pas assez. Parlez-nous de votre parcours politique

Cela a commencé à ma sortie de l’école nationale supérieure d’agriculture comme ingénieur agronome. J’étais un militant et responsable d’And Jëf/PADS avec Landing Savané. C’était en 1992. Mes camarades m’ont élu secrétaire général de la Fédération de Pikine/Guédiawaye. J’ai milité dans ce parti jusqu’en 2002. J’ai participé à l’élection du Président Abdoulaye Wade en qualité de responsable de la Coalition alternance 2000 à Pikine, puis Faal 2000 toujours à Pikine. C’est après l’entrée d’And Jëf dans le Gouvernement que j’ai eu des divergences de point de vue dans la conduite du parti. L’une d’elles était l’opportunité ou non et la manière d’entrer dans ce gouvernement. Cela s’est cristallisé en 2002 et a abouti à ma démission de ce parti. J’avais le choix entre créer mon parti ou adhérer à un autre parti. J’ai choisi de continuer à accompagner le Président Abdoulaye Wade. J’ai commencé à militer à la base. Mon adhésion s’est faite auprès du responsable de la Fédération de Pikine d’alors, Baye Tall Diop et non pas devant un autre quelconque haut responsable du PDS. En 2014, je suis devenu maire de Djidah Thiaroye Kaw sous la bannière du PDS.

Qu’en est-il de votre parcours académique et professionnel ?

J’ai commencé mes études primaires à l’école Pikine 14 sous la haute direction du maitre pour laquelle je garde toujours la plus haute et la plus grande admiration, M. Gadio. Il a conduit mes premiers pas. C’est là-bas où j’ai connu ma plus grande satisfaction scolaire, quand en classe de CM2 je suis admis, major de la promotion au plan national, au concours d’entrée au Prytanée militaire de Saint-Louis. C’était un grand évènement, parce que c’était un jeune enfant de la banlieue qui vivait dans les conditions de la banlieue qui a su damer le pion à tous ceux qui bénéficiaient, théoriquement, de conditions d’études, d’encadrement beaucoup plus favorables. J’ai fait tout mon secondaire au PMS où j’ai obtenu un baccalauréat D (actuelle série S2). Mon ambition était de devenir un médecin chirurgien, au point que c’était mon seul choix pour être orienté à l’université Cheikh Anta Diop de Dakar. J’y ai été orienté après le Bac.

Mais, j’avais réussi au concours national d’entrée à l’école des cadres ruraux de Bambey, à celui de l’Enea et de l’Ebad. J’ai choisi la première école. C’est malgré moi, sous la pression de parents qui analysaient la situation sociale de la famille qui m’ont convaincu d’opter pour une formation de trois ans, à l’issue de laquelle le recrutement dans la fonction publique était garanti. La formation était de trois ans et permettait de réduire la souffrance sociale de la famille qui allait avoir un fonctionnaire qui participerait à prendre en charge leurs besoins. J’ai fait un an à Bambey pour le cycle tronc commun et deux ans à Djibélor pour le cycle de formation en foresterie. C’est après que j’ai été directement intégré dans la fonction publique au niveau du ministère de l’Environnement. Après j’ai été affecté à la Direction des Eaux et Forêts où j’ai travaillé comme adjoint au chef de bureau information, sensibilisation et formation.

Au bout des deux ans de formation réglementaire de séjour, après les études, j’ai préparé et réussi le concours d’entrée à l’école nationale supérieure d’agriculture de Thiès pour préparer, pendant trois ans, le diplôme d’ingénieur agronome avec une spécialité en économie rurale. Après l’obtention de ce diplôme, je suis retourné à la Direction des Eaux et Forêts pour y occuper les fonctions de chef du bureau économique forestière. J’y ai travaillé pendant deux ans, avant de chercher et obtenir une bourse de la coopération belge pour faire un faire diplôme d’études approfondies de statistiques et informatique appliquées à la faculté universitaire des sciences agronomiques de Gembloux. Je suis rentré au Sénégal, après deux ans d’études.

Pourquoi vous n’êtes pas resté en Belgique ?

 J’avais une opportunité de travailler pour une entreprise de fabrique de médicaments. Je devais  travailler dans leur unité de statistiques.  En y réfléchissant, le peuple sénégalais a pris en charge ma formation, de l’école primaire au supérieur. Je trouvais très ingrat de ma part, qu’après que le peuple ait autant investi dans ma formation, d’aller offrir les fruits de leur récolte à une entreprise américaine basée à Bruxelles. J’ai fait ce choix, malgré les conditions financières très attrayantes proposées. J’ai préféré me mettre au service de l’administration sénégalaise, d’autant que certaines compétences n’existaient pas au niveau de la direction des Eaux et Forêts. Cet appel du devoir m’a obligé à rentrer.

Je n’ai même pas voulu rester pour travailler un peu et avoir de quoi acheter au moins une maison. Quand j’ai réintégré mon poste à la direction des Eaux et Forêts, cela coïncidait pratiquement avec le démarrage d’un projet de la Banque mondiale que j’avais initié, quand j’étais le chef du bureau économie forestières avec d’autres collègues de la division aménagement et production forestière. J’ai eu l’opportunité d’être recruté par la Banque mondiale comme expert national chargé de programme. J’avais en charge la mise en place d’un système d’information écologique, forestier, pastoral et la gestion de la diversité biologique dans la périphérie du parc national de Niokolokoba. Je gérais ces deux programmes au sein du programme de gestion durable et participative des énergies traditionnelles et de substitution.

Je me suis investi à moderniser et à mettre à jour les connaissances du potentiel forestier du Sénégal, les systèmes d’inventaire écologique, forestier et pastoral, à mettre en place des dispositifs de suivi de la dynamique de la végétation. C’est autant d’initiatives prises au niveau de ce Proged qui ont été démultipliées en Afrique. On a reconduit cette expérience au Bénin, au Burkina, au Mali et le Niger. Le Sénégal a été un précurseur, avec ce programme, d’un autre système de gestion des ressources financières et d’aménagement des forêts naturelles dont le Sénégal et l’Afrique de l’ouest sont très fières. C’est durant la période où je gérais ce programme que j’ai eu l’opportunité de bénéficier d’une bourse de la Banque mondiale pour faire un PHD à l’université de Fribourg, en Allemagne. C’est en 2006 que j’ai obtenu mon PHD, d’où le titre de Dr Cheikh Dieng qui n’est pas médecin, comme il l’aurait voulu, mais qui est docteur en environnement.

N’avez-vous jamais regretté n’avoir pas suivi votre ambition de devenir médecin ?

Finalement, j’ai eu le même amour pour l’environnement. Quelque part les environnementalistes sont les médecins de la terre, les médecins du futur. Nous partons du principe que cet environnement où nous vivons, nous devons le préserver au bénéfice de nos enfants et petits-enfants. Ils ont le droit dans un environnement meilleur que celui que nous avons hérité des générations antérieures. Il y va de notre responsabilité. Ce principe-là fera la santé, pas d’une personne, mais de l’humanité. C’est pour cela que nous nous battons aujourd’hui contre la problématique des changements climatiques, l’érosion côtière, la désertification, la dégradation des ressources frontières, pour l’aménagement de nos forêts naturelles, de sorte à léguer des forêts de meilleure qualité à nos enfants. Nous nous battons également pour la préservation de la faune sauvage. Toutes les sorties que j’avais faites pour dénoncer ce qui est arrivé à nos oryx par la faute du ministre de l’Environnement participe à notre passion de préserver les ressources.

Que pensez-vous de la déclassification d’une partie de la bande de filao de Guédiawaye ?

C’est le plus grand scandale du régime du Président Macky Sall. C’est un génocide. Le Président Macky Sall ne mesure pas suffisamment la portée écologique et économique de cette décision irréfléchie, totalement inopportune. Elle est motivée par la boulimie foncière de son jeune frère qui l’a entrainé dans cette galère. Le Président Macky Sall a déclassé 150 Ha de la bande filaos dans la commune de Wakhinane Nimzatt dont la moitié, disent-ils, va servir à des habitations. Nous qui sommes dans la banlieue savons que les maires de Wakhinane Nimzatt, de Ndiareme Limamoulaye et de Golf, en plus du maire de Guédiawaye, ont commencé à vendre ces parcelles, trois mois avant la sortie du décret de déclassement. Elles coutent entre 8 et 12 millions de FCFA. Nous en avons des preuves. J’ai personnellement des amis qui y ont acheté des terrains. Tout ce que je dis, je le vis avec les populations de la banlieue. Cette prédation sur ces ressources est un crime environnemental qui devait être porté au tribunal et le Président Macky Sall devrait répondre de ce crime.

Pourquoi dites-vous que c’est un crime ?

C’est depuis 1948, bien avant les indépendances, que le service des Eaux et Forêts a démarré la plantation de cette bande de filaos. La plantation des filaos était un défi technique, parce que nulle part, les gens n’avaient la technicité pour pourvoir planter dans des zones aussi hostiles, aussi infertiles et mouvantes. Ce défi technique, la direction des Eaux et Forêts l’a relevé, après beaucoup d’échecs. Aujourd’hui, ce sont plus de 9 mille hectares de reboisement de filaos que nous avons entre Diamalaye et la ville de Saint-Louis. Des forestiers ont dormi dans les Niayes, des gardiens ont dormi nuit et jour pour sécuriser ces lieux. Il faut connaître la fonction de cette bande de filaos. Nous sommes dans la zone des Niayes qui est à la fois extrêmement fragile et fertile. La bande de filaos a pour fonction écologique de stabiliser les dunes, pour éviter qu’elles ne remplissent les cuvettes maraichères. La bande des Niayes participent à près de 80% à l’approvisionnement en produits horticoles du Sénégal.

La destruction de cette bande de filao met en danger toute la production horticole dans les Niayes, avec tous les risques de remobilisation de ces dunes qui vont finir par envahir les cuvettes maraichères productrices. D’un autre côté, nous avons des infrastructures, en particulier, la nouvelle autoroute Dakar-Saint-Louis qui est à côté de la bande de filaos. Elle est protégée par la bande de filaos, mais risque de disparaître sous les dunes, quand cette dernière sera détruite avec la remobilisation des dunes. Aujourd’hui, quand vous allez vers Gadaye, Malika où la bande est fortement agressée, vous verrez de petites dunes de sables qui s’amoncellent sur l’autoroute. Elles constituent un danger pour les automobilistes. Dans quelques années, elles ne seront plus de petits monticules de sables, mais des dunes. Cette décision est un crime social.

Pourquoi ?

Toutes les habitations qui vont faire face à la mer sont menacées par la remobilisation des dunes qui, sur le long terme, va les envahir. Elles vont finir par engloutir leur cité. Elles vont dégrader la qualité de vie avec des vents de sable incessants qui feront que personne ne pourra vivre dans sa maison au niveau de la zone Hamo 4. C’est un crime environnemental une fois encore, parce que la remobilisation des dunes constituait une barrière contre l’avancée de la mer. Quand ces dunes vont être terrassées, rien ne retiendra l’avancée de la mer. Dans les plages sableuses similaires comme à la Somone, sur les 10 dernières années, des estimations faites par les populations, la mer a avancé de plus de 200 mètres. Imaginez ce que seront les Hamo, dans 20 ans et plus.  Ils seront au milieu de la mer, parce que la barrière naturelle qui étaient la bande de filaos et les dunes de filaos auront été détruites, terrassées.

J’appelle les populations de Guédiawaye, de Malika et les environnementalistes du Sénégal, tous les Sénégalais de se dresser devant ce décret, pour qu’il ne soit pas mis en œuvre, au regard des nombreuses catastrophes sociales, écologiques, économiques, environnementales. Les populations de Guédiawaye doivent se lever, parce qu’elles seront les premières victimes de ce désastre organisé par le Président Macky Sall.

En attendant que Guédiawaye se lève pour régler ce problème, Djidakh Thiaroye Kaw est déjà debout pour un tout autre problème. Avec le nouveau découpage administratif, ‘’Marché Bou bess’’ vous a été amputé.

Le Président Macky a profité de ce décret pour faire un contournement d’une décision de justice. Ce marché avait déjà fait l’objet d’un contentieux que j’avais introduit devant la Cour Suprême. Je réclamais que le ‘’Marché Bou bess’’ qui se trouve sur le territoire communal de Djidah Thiaroye Kaw, que la commune puisse en bénéficier. Historiquement, il y avait un arrangement entre les maires de Pikine et de Guédiawaye qui ont fait qu’en 1996, le maire de la ville de Pikine, Alioune Samba, avait ‘’prêté’’ ce marché à la nouvelle ville de Guédiawaye qui venait d’être créée et qui manquait de ressources. Ce prêt, ce ‘gentleman agreement’ entre les deux maires socialistes a perduré et Guédiawaye en a fait un acquis contre la loi. C’est en 2015 que j’ai porté l’affaire devant la Chambre administrative de la Cour suprême qui a reconnu la territorialité de ce marché dans la commune de Djidah Thiaroye Kaw. En conséquence, a fait droit à ma requête que ‘’Marché Bou bess’’ retourne dans le giron de la commune. Il est dommage que le président de la République, qui est censé être la clef de voûte de toutes les institutions, puisse prendre un décret pour contourner une décision de la Cour suprême. C’est vraiment regrettable de la part d’un Chef de l’Etat qui use et abuse de son pouvoir de décret.

Il le fait pour combattre un maire qui n’est pas de son camp au profit d’un maire qui est de son camp. Racine Talla, pour l’essentiel, n’est demandeur de rien. Il est transparent dans ce système, parce que ce conflit avait été porté par le maire de la ville de Guédiawaye qui estimait qu’il avait le droit de sauvegarder une situation acquise, depuis 1996. Il a perdu son combat devant la justice. Cette défaite a été dure à avaler, c’est pourquoi avec les manipulations du ministre des Collectivités territoriales, ils ont glissé une phrase dans l’annexe du décret portant scission de la commune de Keur Massar. Ils ont mis que la partie nord-est du quartier de Bakhdad 4 appartient à la commune de Wakhinane Nimzatt. Ce qui est faux. La Cour suprême avait constaté le contraire, à travers l’arrêt numéro 04 du 12 février 2017 de la Cour suprême. Le Président a été soit induit en erreur, soit il a fait sciemment. S’il a fait sciemment, il est complice de cette manipulation et doit alors être traduit devant la Haute Cour de justice, parce qu’il aura failli à sa mission de faire appliquer les lois. C’est une faillite présidentielle. Dans la précipitation, ils ont violé les articles 76, 77 et 78 du Code des collectivités territoriales. Une fois que la Cour suprême a tranché et qu’un autre décret doit modifier les limites territoriales, ces articles font obligation à l’administration d’en informer les populations, mais surtout, de recueillir obligatoirement l’avis du conseil municipal concerné.

On ne peut pas modifier le territoire de Djidah Thiaroye Kaw, sans que son conseil municipal ne donne un avis. Cette formalité substantielle a été violée par Omar Guèye. Dès lors, ce décret est nul et de nul effet. Nous sommes en train de construire un dossier avec nos avocats. Ils seront en promenade de santé, tellement les erreurs entourant ce décret sont grossières. Ils pensaient, malgré tout que nous n’aurions pas décelé ce vol à l’arrachée. Ils ont échoué devant notre vigilance.

Vous serez candidat aux prochaines locales ?

Oui ! parce que nous avons commencé de belles choses à Djidah Thiaroye Kaw. On s’est d’abord intéressé à la problématique du cadre de vie. Notre commune était l’épicentre des inondations dans la banlieue, avec 60 quartiers sur les 66 qui étaient inondables et inondées, toutes les années. Lutter contre cela a été une priorité. Aujourd’hui, c’est un réseau de plus de 1350 mètres linéaires de canalisation secondaires et tertiaires qui ont été construites par la municipalité. Cela a permis d’évacuer l’essentiel des eaux des inondations des quartiers les menacés. Dans les endroits non encore canalisés, nous avons un système de pompage continu. Le seul problème qu’on a aujourd’hui est le rabbatement de la nappe phréatique qui est de la responsabilité de  la Sen’Eau. On a réhabilité plus de 250 maisons. Ce qui a fortement impacté la restauration du cadre de vie. Nous nous sommes aussi attaqué à l’éclairage public.

J’ai aujourd’hui la fierté de dire que Djidah Thiaroye Kaw est la commune la mieux éclairée de l’ensemble du département Pikine. Nous avons maintenant des espaces publics communaux avec du wifi gratuit. Ce sont des espaces de socialisation. Au plan éducation, nous soutenons les étudiants et les élèves. Nous avons plus de 62 étudiants que nous soutenons de la Licence 1 eu master 2. Ils seront des pourvoyeurs de ressources pour leurs familles et des références dans leur quartier. C’est la meilleure manière pour nous de lutter contre la pauvreté. Nous soutenons aussi des jeunes qui n’ont pas  eu la chance d’aller à l’école de suivre une formation professionnelle. Nous avons eu une première promotion de 30 jeunes, les 28 ont aujourd’hui un travail. Soit, ils travaillent pour eux-mêmes, soit ils travaillent dans des restaurants ou salons de coiffure, selon la formation suivie.

Pour l’école primaire, nous confectionnons des blouses pour les élèves et les daaras. La commune commande chaque année 12 mille à 14 mille blouses que l’école redistribue aux élèves, à raison de 500 F par blouse. Cet argent leur permet de payer les factures d’électricité et d’eau.  Nous organisons des cours de vacances gratuits avec des enseignants professionnels que nous payons. Pour les classe d’examen, nous trouvons un accord avec les enseignants pour des cours de renforcement pour les élèves. Nous les payons en conséquence. Tous ces efforts cumulés ont fait Djidah Thiaroye Kaw qui était à la 15e place concernant les résultats scolaires est, depuis 2 ans, à la deuxième place. Nous en avons autant fait dans le domaine de la santé, de la culture ou encore des sports.

Parlant de sports, en pratiquez-vous un ?

J’ai pratiqué le judo, pendant de longues années. Maitre Mbaye Ndoye de Saint-Louis et Maitre Diambong de Ziguinchor m’ont formé. J’ai été jusqu’à la ceinture marron. Malheureusement, je n’ai jamais eu le temps de faire des compétitions pour passer à la ceinture noire. Mais, j’aime ce sport, même si je ne pratique pas.

Etes-vous féru de musique ?

Oui, j’adore la musique, j’adore Bob Marley. Pour moi, il est la référence ultime en matière de musique. Il est mort le 11 mai 1981, mais aujourd’hui quand j’écoute sa musique, c’est comme s’il était encore vivant. Je peux écouter ‘’Redemption song’’, tous les jours de la semaine.

Qu’est-ce qui peut vous détendre quand vous êtes stressé ?

De la musique à fond. Cela peut être du Bob Marley ou du Peter Tosh. J’adore le reggae et le zouk.

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