Publié le 17 Dec 2014 - 11:13
INSUFFISANCE DE MATERIELS, ABSENCE DE CENTRES DE REVALIDATION…

Les traumatismes, des lésions négligées

Professeur Mouhamadou Habib Sy

 

Les orthopédistes ont dénoncé hier l’absence de centre de revalidation au Sénégal et l’insuffisance de matériels et d’infrastructures pour la prise en charge des traumatisés. Ils demandent l’élévation des traumatismes au rang de priorité sanitaire nationale.

 

Les traumatismes constituent des lésions très souvent oubliées par la société. En conférence de presse hier, la Société sénégalaise d’orthopédie-traumatologie (Sosecot) a dénoncé l’insuffisance de matériels, d’infrastructures pour faire face aux victimes de traumatismes. Ce, en prélude à leurs 9e journées du genre, prévues les 18 et 19 décembre prochain.

Selon le Professeur Mouhamadou Habib Sy de la Sosecot, les traumatismes constituent au Sénégal l’une des premières causes de consultation au service des urgences. ‘’A l’hôpital Principal, révèle-t-il, ils sont à hauteur de 51% et 59% pour l’hôpital Général De Grand-Yoff’’. Et pourtant, ils sont très souvent négligés. Cette négligence, selon le Pr Sy, est d’abord liée à la place qu’ils occupent, en termes de politique. Les traumatismes doivent être opposés aux maladies.

‘’Dans nos politiques de santé, il n’est pas dit de façon explicite ce que nous devons faire. En terme d’allocation de ressources, les endroits où on doit soigner les traumatisés sont en norme insuffisants. Aujourd’hui, les grands axes routiers sont très distants des centres de traitement. On a un retard en termes de délais, de prise en charge. Il y a un défaut d’infrastructures en ressources matérielles, un déficit en termes de ressources humaines capables de faire face à ces traumatismes’’, constate le Professeur Mouhamadou Habib Sy.

Pour lui, les questions de traumatismes, classés en deux groupes (les traumatismes intentionnels, et ceux non intentionnels ou accidents), n’ont pas été prises en charge à leur juste valeur. ‘’Il y a une demande traumatologique élevée qui ne correspond pas à l’offre que nous faisons. A chaque fois qu’on évoque la question des traumatismes, on nous renvoie aux urgences. Les urgences traumatologiques ne sont qu’une partie de la traumatologie. Le devenir des victimes de traumatisme est un problème. On n’a aucun centre de revalidation pour ces blessés, parce qu’après l’hôpital, il va falloir bien s’occuper des gens qui ont des séquelles, des gens qui ont des soins continus, besoin de rééducation, de réadaptation et il faut le faire’’.

De son côté, le Professeur Seydina Issa Laye Sèye a souligné l’insuffisance d’orthopédistes au Sénégal. ‘’Nous sommes 48 orthopédistes seniors. Ceux qui sont en formation sont 67. Sur ces 67, il n’y a que 10 Sénégalais dont 6 internes, et 4 sont des docteurs en médecine qui veulent faire leur spécialité. La formation qui a été ouverte, depuis 98-99, en réalité pour une grande partie, ne forme pas les Sénégalais. L’obstacle majeur lié à cela est le non-octroi de bourses. Il faut faire une politique promotionnelle pour cette specialité qui est la deuxième spécialité chirurgicale, après les chirurgiens généralistes et viscéralistes’’, a souligné Professeur Sèye. 

Actuellement dit-il, presque toutes les régions sont couvertes. Kolda, Kédougou, Matam,  Fatick sont les seules où il n’y a pas d’orthopédistes. ‘’Il faut qu’il y ait des structures adaptées, du matériel renouvelé en permanence. Parce que quand vous êtes fracturé, il faut du matériel pour vous réparer et ce matériel n’est pas du tout donné. Les gens pensent plus aux maladies infectieuses, à la gynécologie, avant les accidents. Avant tout, il faut la couverture du matériel, avant celle du personnel’’.

Les orthopédistes demandent l’élévation des traumatismes au rang de priorité sanitaire nationale. Ils réclament aussi le renforcement dans les curricula à l’université, ainsi que dans les formations paramédicales de la chose dite traumatique, et une éducation en direction des populations.

VIVIANE DIATTA

 

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