Publié le 19 Jan 2016 - 17:21
KOLDA : LUTTE CONTRE LES MGF

Reconversion de 50 exciseuses 

 

La cellule de Kolda de la Fédération des associations féminines du Sénégal (FAFS) a organisé, ce samedi 16 janvier, un forum sur les mutilations génitales féminines et les mariages précoces, en collaboration avec l’UNICEF. Un bilan des actions menées a été fait.

 

En dépit des efforts réalisés par la cellule de  Kolda de la Fédération des Associations féminines du Sénégal (FAFS) pour prévenir les violences basées sur le genre, des goulots d’étranglement subsistent, en raison de la persistance de certaines pratiques socio-culturelles néfastes, telles que les mariages précoces et les mutilations génitales féminines (MGF). Selon l’ONG Enda-Santé de Kolda, l’arrestation et la condamnation d’une exciseuse chevronnée et ses deux complices et le taux des filles âgées de 0 à 15 ans victimes excisées qui est à 85 % à Kolda en sont une parfaite illustration. « Les mutilations génitales féminines, les mariages précoces et forcés et leurs corollaires, les grossesses précoces, sont des pratiques traditionnelles qui mettent en danger la santé des femmes et des enfants, parfois leur vie, et constituent une indiscutable atteinte à leur dignité. »

Selon Fatou Baldé, une participante à ce forum, les conditions d’hygiène lamentables dans lesquelles les mutilations sont effectuées et la vascularisation très importante du clitoris expliquent la fréquence et la gravité des complications. « Certaines sont immédiates : douleurs, hémorragies, chocs, rétentions d’urine. D’autres sont secondaires : pelvipéritonite, salpingite, gangrène gazeuse, tétanos, infection par le virus etc. », a-t-elle listé. Awa Badiane, une chef de famille, a renchéri en citant : la stérilité, les troubles gynécologiques variés, les troubles de la sexualité. Abondant dans le même sens, le relais a ajouté que « les mutilations génitales féminines aboutissent à des souffrances fœtales, des morts fœtales, des ruptures utérines, des fistules vésico-vaginales ou de larges déchirures du périnée avec fistule recto-vaginale. La conduite à tenir doit allier compréhension et prévention ».

Ainsi pour pallier ce fléau, 50 exciseuses ont été reconverties en matrone, en « Bajenu Gox », en commerçantes etc. « C’est pour éviter qu’elles retournent dans leurs pratiques. Nous avons mis à leur disposition une somme importante, grâce à l’Unicef qui nous appuie financièrement. Cet argent leur a permis de s’adonner à d’autres activités génératrices de revenus qu’elles ont eu à choisir elles-mêmes. Certaines parmi elles ont été reconverties en matrones. A cela s’ajoute le renforcement de capacités dans divers domaines », a annoncé la présidente de la cellule de la FAFS de Kolda, Gnagna Fall Ba. Parce que, d’après elle, les conséquences physiques des MFG peuvent se traduire par le stress, la perte d’estime de soi, la dépression, le trouble de l’humeur, la perte d’appétit.

Autre fléau qui gangrène la société : les mariages précoces. D’après la présidente de la cellule de Kolda, lorsqu’une fille est promise en mariage ou officiellement mariée, elle est souvent retirée de l’école pour jouer son rôle d’épouse et de mère à la maison. Selon la modératrice du forum, les mères adolescentes sont davantage exposées aux complications médicales, lors de la grossesse et de l’accouchement. « Les cicatrices, les fistules, les troubles de la croissance, les traumatismes physiques et les dysfonctionnements sexuels, l’infertilité, les troubles de la croissance en sont, entre autres complications, courants ». Ainsi, dira Gnagna Fall Ba : « Nous nous efforçons de sensibiliser les populations sur ces pratiques traditionnelles néfastes pour protéger les enfants. Notre objectif est de contribuer à réduire la prévalence de la MFG et le taux de mariages d’enfants et de  proposer des programmes aux femmes et aux filles.  

Pour amener les parents à tourner le dos à ces pratiques néfastes, les membres de la cellule de la FAFS de Kolda mènent des visites à domicile et des causeries partout dans la région de Kolda. D’autant que, regrette-t-elle, « au Sénégal, le droit de l’enfant est bien protégé. Les lois sont là, bien faites. Mais là où le bât blesse, c’est l’application de ces lois. Donc je pense qu’on doit aujourd’hui, s’appesantir sur cela. C’est-à-dire sensibiliser et conscientiser les populations sur les mariages précoces, les mutilations génitales féminines, entre autres fléaux, qui ne cessent d’augmenter malgré les nombreuses activités menées dans ce sens-là ».

EMMANUEL BOUBA YANGA (Kolda)

 

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