Publié le 17 Feb 2012 - 12:38
LA CHRONIQUE DE MAGUM KËR

Élection : moins dix jours…

Sauf catastrophe imminente, les Sénégalais iront aux urnes dans dix jours pour la dixième fois depuis l’indépendance afin de désigner un président de la République. Dans les démocraties avancées, ce poste est dévolu pour un mandat déterminé à un postulant qui s’attache dans sa quête du pouvoir à cultiver le profil du citoyen ordinaire. Sous nos tropiques, ce candidat est un démiurge sauveur qui aspire à refonder la nation, redresser les torts antérieurs, combler les citoyens de faveurs et inonder le pays de bonheur. Une fois installé, il s’incruste. Notre tradition présidentielle reste à ce jour : Senghor 20 ans, Abdou Diouf 20 ans, Wade 12 ans, et plus ?

 

Senghor vieilli dans la fonction, n’a pas repris à son compte le pari d’inamovibilité de Sékou Touré défiant les complots, ni d’Houphouët-Boigny soutenant qu’un chef traditionnel meurt au pouvoir. La houle avait emporté les autres alentours. Tout près, Modibo Keïta, prévenu, n’avait pas levé le petit doigt, ni la milice populaire sur les membres d’un Comité militaire qui évitaient son regard. Ould Daddah eut juste le temps de finir sa prière du matin. Luis Cabral, le fier guérillero ne vit pas venir Nino Vieira alors que Senghor, en bon fonctionnaire, mijotait sa retraite et son coup de Jarnac.

 

De longue main, il avait organisé une succession autoritaire pour installer son dauphin Abdou Diouf. Lequel, moins habile ou défavorisé par le contexte, a manqué d’un cheveu de récidiver en faveur d’Ousmane Tanor Dieng, après avoir neutralisé ses rivaux dans le Parti socialiste. La chute fut dure pour eux deux. L’alternance vit le président Wade s’installer, pour deux mandats promettait-il, dans une Constitution dont le Pr. Amsatou Sow Sidibé a flétri, non sans raison, les conditions de sa rédaction. Elle est devenue pour cela un nœud gordien que le Conseil constitutionnel n’a pas réussi à dénouer à la satisfaction de tout le monde.

 

Ce nœud gordien sera-t-il tranché à l’épée par un nouvel Alexandre ? Le chaud prélude à la campagne électorale promettait de tumultueuses obstructions vite démenties. Celle-ci bat son plein et à dix jours, la question de savoir qui l’emportera s’articule toujours sous l’alternative d’un scrutin démocratique ou d’une issue subversive. Seul le rapport des forces sur le terrain entre le pouvoir, les organisations politiques et de ladite société civile, engagés de part et d’autre de cette alternative, tranchera : mercredi, les forces de l’ordre wadien ont pu filtrer les manifestants, contenir les extrémistes et laisser circuler les candidats qui se sont prévalus de cette qualité. Pas un mot cependant pour les candidats Ndour, Sarr, et Keinde. Le Conseil constitutionnel a eu raison d’eux ou sur eux ?

 

Rien ne laisse supposer que l’épreuve de force puisse être favorable à l’opposition dès lors que les forces de sécurité n’ont pas d’états d’âme. Et que les appels du pied à la soi-disant communauté internationale et à la Cour pénale internationale (CPI) confèrent à ses auteurs une compromettante posture qu’accentue la décision anticipée de Macky Sall de fermer l’ambassade de Cuba, la fière île à laquelle, seuls les analphabètes politiques l’ignorent, nous devons la libération de la plupart des colonies portugaises, puis de la Namibie, ainsi que le démantèlement de l’apartheid et par conséquent la libération de Nelson Mandela, le héros fétiche des démocrates larmoyants.

 

Sa perte de prestige, le président sénégalais le doit en grande partie à son instrumentalisation de la soi-disant communauté internationale contre le colonel Kadhafi. Son principal atout en matière de relations internationales reste les retombées visibles sur l’équipement, le transfert technologique et les infrastructures de sa coopération avec la Chine populaire et les pays du Sud. Le mimétisme de l’American way of life est lisible dans le discours de deux autres candidats de l’ex-mouvance libérale qui devraient peser les enjeux pour le peuple d’un retour au leadership timoré et veule qui acheta longtemps des bus français au prix fort alors que les Allemands offraient un meilleur rapport qualité/prix.

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