Publié le 29 Mar 2024 - 14:12
Les Comptes de Almamy Bocar LA CHRONIQUE DU VÉTÉRAN

Sonko gagne, Diomaye rafle la mise 

 

‘’Dans ce monde, deux choses sont infinies : l’univers et la bêtise humaine.’’ (Albert Einstein)

Le saut de l’ange

C’est acté. Un véritable nouveau cap est pris par le Sénégal, avec l’élection à la présidence de la République de Bassirou Diomaye Faye. Le Sénégal ose tous les paris avec cette élection et s’autorise toutes les audaces avec un président de moins de 50 ans, comme l’a été Abdou Diouf quarante ans avant lui, élu à 45 ans, là où le nouveau président en affiche un de moins.

Deux autres traits communs à Diouf l’ancien et  à Faye le nouveau étant que tous les deux sont de la communauté sérère et des grands commis administratifs de l’État ; administrateur civil pour l’un et inspecteur des impôts pour l’autre.

À coup sûr, le Sénégal du futur et la gestion des affaires publiques vont être fort différents de l’empreinte qu’Abdoulaye Wade, le dernier Damel du Cayor et Macky Sall, l’Almamy du Fouta ont imprimée au pays durant ces vingt-cinq dernières années. Il y aura moins de folklore, très certainement une gestion plus orthodoxe des finances publiques et peut-être la fin de l’implication de la famille présidentielle dans la gestion de l’État. Cela ne voulant pas pour autant en conclure que le nouveau pouvoir va, forcément, faire plus et mieux que ses prédécesseurs.

En politique, un conquérant se comporte comme un séducteur qui, avec des yeux de Chimène, tente de séduire sa dulcinée en étant volubile et tonitruant sur les promesses de meilleure gouvernance, si la confiance des populations lui est accordée. C’est ce que Pastef a réussi avec l’opinion publique et nationale.

 Néanmoins, comme le dit un adage, le bon maçon n’est jugé qu’au pied du mur. Le président Diomaye Faye et Pastef ont la main, maintenant, sur le  gouvernail et vont conduire le pays vers de nouveaux flots.

Tout le monde a intérêt à ce qu’ils réussissent, car leur victoire a été claire, nette et sans bavure. Leur légitimité ne peut souffrir d’aucune contestation et en procédant ainsi, l’électorat sénégalais a envoyé un signal fort à l’ensemble de la classe politique sur leurs mœurs débridées et leurs comportements désastreux qui faisaient fi des bonnes valeurs et des principes avec un culte total accordé à l’opportunisme.

Nul doute que la transhumance politique et sociale a pris fin avec cette élection et qu’on ne verra plus ce spectacle désastreux de ralliement au nouveau vainqueur de politiciens, de religieux, d’acteurs culturels et sociaux ainsi que de journalistes à la recherche de gain facile.

Le crépuscule des dieux

Le candidat de la majorité présidentielle, Amadou Ba, a subi un véritable revers en se voyant couronner sur le fil par le vainqueur du scrutin le président Bassirou Diomaye Faye. Plus qu’un agneau du sacrifice et un dindon de la farce, il a été jeté en pâture sur une scène politique où tout a été fait pour lui faire perdre cette compétition. Et pourtant, il s’en sort avec un score de près de 1 700 000 suffrages et ceci pour une première candidature sans l’appui de son camp politique et de son mentor, le président sortant. Tout a été fait pour qu’Amadou Ba ne puisse pas remporter cette élection. Il est entré dans cette bataille avec le lourd handicap d’être le seul comptable du passif des douze années de présidence APR, traînant ainsi le boulet de la continuité, alors que visiblement l’électorat, du fait de la déception, de la colère et de la dureté de la crise économique, était acquis plus à un changement qu’à l’envie de reconduire le bilan matériel positif de Macky Sall.

Il s’y ajoute que les dernières décisions de celui-ci avec le report de la Présidentielle, l’amnistie générale des faits politiques récents et la libération d’Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye ont fini d’abattre en plein vol la candidature d’Amadou Ba.

Le parti présidentiel APR, de par le comportement de la très grande majorité de son oligarchie, a refusé de mouiller le maillot pour aller en soutien durant cette mère des batailles politiques, contribuant à l’affaiblir encore plus face à une adversité combattive, organisée et bien déployée sur le terrain.

Sans nul doute, on peut qualifier ce comportement à la fois du président Sall, des dirigeants de l’APR de suicide politique, car ils se sont ouvert le plus grand boulevard pour leurs plus belles années à venir dans une opposition où Pastef n’aura aucune raison de leur faire des cadeaux. Et surtout que, il faut oser le dire, jamais une opposition n’a été aussi brutalisée et harcelée que ces vingt dernières années, avec l’avènement au pouvoir des libéraux sous l’ornière d’Abdoulaye Wade et de Macky Sall.

Pourtant, Amadou Ba, le candidat défait, ne devrait pas être le plus malheureux dans cette affaire, car le coup de Jarnac dont il a été victime de la part de ses camarades lui a permis de s’émanciper et d’obtenir ainsi le vote de 35 % de l’électorat sans rien leur devoir ainsi. Ce qu’un Idrissa Seck qui, après quatre tentatives pour se faire élire, n’est jamais parvenu à atteindre et que Khalifa Sall, pour sa première tentative, doit se désoler de n’avoir pas poursuivi son alliance politique avec Yewwi Askan Wi.

Les années terribles s’annoncent pour certains avec la chute de l’État APR comme l’ont été les années incertaines pour le PS après la défaite de Diouf et le PDS après la déroute de Wade.

Abdoulaye Bamba DIALLO

 

PS : Cette chronique du vétéran est la dernière sous ma signature dans les colonnes du quotidien ‘’EnQuête’’. Je remercie les lecteurs qui m’ont fait l’amitié de s’intéresser à ces réflexions d’un journaliste de près de quarante années d’exercice.

Mes compliments et mes encouragements vont aussi à l’endroit de la dynamique et généreuse rédaction de ce quotidien qui m’a accueilli et qui m’a ouvert ses colonnes.

La séquence nouvelle qui s’ouvre pour notre pays me conduit à croire que ce sont des militants ou des sympathisants de Pastef, dont je ne suis pas, qui sont les mieux outillés pour analyser et décrypter les politiques nouvelles que le président Diomaye Faye va impulser pour les cinq prochaines années.

Et que, donc, je ne devrais exprimer mes propos que dans les pages forum et débats, car étant des opinions, donc, forcément moins objectives que des analyses ou des décryptages.

Merci.

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