Publié le 15 Oct 2013 - 01:29
LIBRE OPINION

Le Sénégal va mal ! Et les Lions d’en rajouter…

 

 

Au lendemain de l’élimination de notre équipe nationale de football par celle de la Côte d’Ivoire l’année dernière en éliminatoires de la CAN 2013, d’aucuns avaient juré que si c’était à refaire et que le destin remettait encore les « Eléphants » sur le chemin des « Lions » du Sénégal, les jeunes « Lions » n’en feraient qu’une bouchée car, convaincus que la Côte d’Ivoire est une équipe vieillissante.

Un an après, les Didier Drogba, Yaya Touré, Didier Zokora et consorts ont certes « vieilli » de 12 mois supplémentaires, mais ont tout de même infligé à nos gosses une bonne correction.

A l’arrivée, la prestation des « Lions » remet en question des certitudes solidement assises et nous rappelle que nous sommes encore très loin des meilleurs en Afrique.

Au moment où le Sénégal traverse une période très difficile, le gouvernement de Macky Sall qui est presque abonné aux déboires de toutes sortes ces derniers temps et qui, friand de bonnes nouvelles à même d’apaiser la situation sociale très tendue dans le pays en cette veille de Tabaski, priait sans doute secrètement pour une victoire des « Lions » à Abidjan et s’y accrochait comme une bouée de sauvetage, cette lourde défaite arrive au plus mauvais moment.

Pour les quelques téméraires ou optimistes à la folie qui voulaient, le temps d’un match, rompre avec leur triste vie et la mélancolie de leurs jours, et qui voulaient se donner des raisons d’espérer une éclaircie dans la grisaille du ciel sénégalais, un très bon résultat des « Lions » à Abidjan, aurait l’avantage de faire retrouver le sourire à un Peuple sénégalais qui en avait cruellement besoin. On connait la suite. Cruelle et implacable.

Retour sur les instantanés de la débâcle des « Lions » au « Félicia » ce samedi 12 octobre 2013 qui ont permis aux « Eléphants » de prendre une sérieuse option pour la qualification:

Cueillis à froid à deux reprises, à chaque début de période (4ème minute et 50ème minute) en plus du 2ème but ivoirien intervenu à la 14ème minute et qui leur coupe littéralement les jambes, les « Lions » n’ont jamais eu l’opportunité de faire douter les « Eléphants ».

La messe est dite. Le reste n’est qu’anecdotique.

Pour en revenir au jeu proprement dit, voilà un match à ne montrer surtout pas aux écoles de football du pays tant il y est fait étalage de tout ce qu’il ne faut pas apprendre aux jeunes apprentis du maniement du ballon rond.

Dominés dans tous les compartiments du jeu, les « Lions » trop empruntés, n’ont pas une seule fois montré qu’ils étaient en mesure de rehausser leur niveau de jeu.

Dans un festival de maladresses et d’approximations, les « Lions » ont donné aux « Eléphants » la cravache avec laquelle ces derniers les ont sévèrement corrigés.

Surfant sur une réputation surfaite, et ne pouvant en réalité rivaliser avec les fortes individualités ivoiriennes qui font le bonheur des plus grands clubs européens, les « Lions » se sont vus trop beaux, aidés en cela par des Sénégalais qui ont surestimé leurs capacités.

Contrairement aux ivoiriens, les « Lions » sont certes des professionnels en Europe, mais évoluent dans des clubs de moindre envergure où ils ne sont pas toujours des titulaires indiscutables, en plus de ne pas avoir le même vécu que les « Eléphants » en sélection.

Sur le terrain, la différence s’est vite fait sentir, et les « Lions » de livrer une prestation plus que pitoyable. Tout y passe : jeu décousu, fautes de concentration, « passes téléphonées » ou…faites à l’adversaire (en fait, ils se débarrassent du ballon plus qu’ils ne font des passes à leurs partenaires), absence d’un meneur de jeu, de métronome ou de leader à même de prendre le jeu à son compte et de sonner la révolte quand l’équipe s’endort, manque d’engagement, d’agressivité, de combativité, de « gnac » ou de « grinta », aucune vélléité d’élaboration d’actions proprement construites, manque de percussion en attaque, pertes de balles dangereuses qui plus est au plus mauvais endroit, difficultés dans le repli et le replacement en phase défensive, approche technico-tactique illisible et incompréhensible, centres et corners envoyés au...3ème poteau, aucune pression sur les ivoiriens que les « Lions » ont laissés et regardés jouer à leur guise – comme à l’entraînement – et qui ne se sont pas fait prier pour les tourner en bourriques, manque de réaction encore moins d’action, absence totale dans la conquête du « deuxième ballon », lenteur dans le jeu et la transmission du ballon, confusion entre vitesse et précipitation, une défense fébrile qui avait organisé pendant ce match une « journée portes ouvertes », dégagements du ballon à l’emporte-pièce, mauvaise occupation du terrain qui donne l’impression que les « Lions » jouaient en infériorité numérique, etc.

Résultat des courses : une raclée aussi humiliante que mémorable. La correctionnelle.

Pourtant, sur les rares occasions où les « Lions » ont semblé relever un tant soi peu la tête et montré qu’ils sont des hommes, les « Eléphants » ont montré et étalé toutes leurs failles et limites : une défense lourde, prenable, friable et tatillonne.

Il s’y ajoute que, Yaya Touré considéré comme la rampe de lancement des « Eléphants » et qui n’était pas dans un grand jour, n’a été que l’ombre de lui-même.

Qu’à cela ne tienne, les ivoiriens ont su résumer les deux manches en une seule. Une équipe qui n’a pourtant pas été ce foudre de guerre qu’on attendait. Mais une équipe ivoirienne qui a du métier, et qui a mis à profit l’expérience de ses « papys » trentenaires (Didier Drogba, Didier Zokora, Yaya Touré, Kopa Barry) pour construire vite et sûrement sa victoire.

Une fois le gain du match dans la poche, ces vieux briscards ont géré le match à coups de simulations de blessures pour casser le jeu et refroidir l’ardeur (s’il y en avait) des « Lions ».

Et même quand les « Lions » semblaient se rebiffer et allaient à l’abordage, les « Eléphants » les aspiraient au mieux avant de récupérer facilement le ballon et de placer des contre-attaques meurtrières. Une véritable leçon de football.

Finalement, le score de 3 buts à 0 n’est même pas chèrement payé pour les « Lions » au vu du grand naufrage qui aurait sans doute mérité une plus sévère correction.

Même ce but de raccroc ou « but de l’espoir » marqué par Papiss Cissé, dans les arrêts de jeu, ne devrait pas faire illusion car, quand bien même un passif de 2 buts ne devrait pas constituer un obstacle insurmontable pour une équipe qui doit « recevoir à domicile » au match retour, ce n’est pas cette équipe du Sénégal qui nous semble capable de créer l’exploit le 15 novembre 2013 à Casablanca. Ce n’est pas du défaitisme, mais faut pas rêver.

Maintenant, le même scénario que l’année dernière se présente : 2 buts à remonter au match retour comme ce fut le cas le 13 octobre 2012 à Dakar.

Sauf que, avec tout ce que les « Lions » nous ont montrés, pas seulement sur ce match aller, mais sur une longue série de matchs, nous ne donnons pas cher de leurs chances de renverser la vapeur dans un mois au Maroc où les « Eléphants », désormais libérés du boulet qu’ils trainaient avant le match aller, joueront sans pression.

Aussi, prions-nous, sans trop y croire, pour que le miracle se produise. Nous demandons dès à présent aux supporters des « Lions » qui seront sur les gradins du stade de Casablanca de pousser leurs joueurs à réaliser l’exploit en terre marocaine. Et au cas où les « Lions » n’y arriveraient pas, que les supporters sénégalais sachent perdre dans la dignité. Pas de casses, de mauvais gestes ou de manifestations repréhensibles qui peuvent faire de sorte que l’hospitalité marocaine soit imméritée pour l’équipe du Sénégal et nous valoir des sanctions de la FIFA comme celles qui nous ont valu de recevoir à domicile…en terre étrangère.

Cela dit, face aux humiliations à répétition que le football sénégalais essuie en Afrique faisant qu’on est presque blasé aujourd’hui à force d’être toujours battu, il n’est plus de bon ton de se taire et de laisser prospérer cette hécatombe.

Puisque le Gouvernement et le Peuple sénégalais ne refusent rien aux « Lions » du ballon rond, ce qui rend fous de rage les amateurs des autres disciplines, jaloux de l’hégémonie et des faveurs accordées au football sénégalais, pourtant « jamais gagnant », il ne faudrait pas qu’on soit trop complaisant envers les « Lions » quand ils se montrent indignes de la Patrie.

Puisque ce sont les deniers du contribuable sénégalais qui sont dépensés pour les mettre dans les meilleures conditions de performance, on se doit d’exiger d’eux la même rigueur et la même obligation de résultats (sportifs) à l’instar des Sénégalais qui évoluent dans d’autres secteurs et qui sont tenus de répondre de leur gestion. Le maillot national se mérite.

Cet énième revers des « Lions » remet au goût du jour l’éternelle évocation de « l’épopée de 2002 » dont les nostalgiques se plaisent d’en ressasser les merveilleux souvenirs.

Ceux qui reprochent aux inconditionnels de la joyeuse bande à El Hadji Diouf d’avoir du mal à se départir et d’enterrer la « génération de 2002 », doivent revoir le jugement car les faits montrent que les poulains de Bruno Metsu ne seront pas oubliés de sitôt.

Ces forts-en-thème qui invitent les férus de foot à avoir les yeux résolument tournés vers l’avenir et à ne pas regarder dans le rétroviseur, ne font que précher dans le désert.

La raison, il n’y a rien jusqu’ici qui puisse nous faire oublier la « génération dorée » de 2002 qui nous a fait tant rêver et qui est restée gravée dans la mémoire collective à cause de tout le bonheur qu’elle nous a procuré et qui est parti pour durer au vu des piètres performances de leurs cadets qui sont à des années-lumière des exploits de leurs devanciers qu’ils ne pourront escamoter qu’en faisant plus et mieux.

Atteignant à force d’audace, de talent et de fighting spirit, un niveau jusque-là jamais atteint par le football sénégalais, les finalistes de la « CAN Mali 2002 » et quart de finalistes du « Mondial Corée-Japon 2002 » ont fait chavirer de bonheur tout un Peuple, au Sénégal comme à la Diaspora, des mois durant, et lui ont fait oublier ses soucis. Ce qui n’est pas rien. Depuis lors, les héritiers de ces valeureux « Lions » déçoivent à chacune de leurs sorties, ce qui ajoute au mal-vivre des Sénégalais si l’on sait la dimension et la magie du football sur les populations ainsi que ses incidences aux plans politique, économique et social d’un pays.

Toutefois, il ne faudrait pas se défausser sur les joueurs ainsi que leur encadrement technique seulement et éluder la responsabilité de l’Etat du Sénégal dans cette (probable) élimination presque programmée.

En effet, c’est plus qu’une honte que pour un seul stade suspendu, non pas une ville, encore moins un pays, que l’Etat du Sénégal et de la Fédération de football ne soient pas fichus, pendant 12 mois, de réfectionner à temps le stade Demba Diop et de le mettre aux normes de la FIFA, ce qui aurait permis aux « Lions » d’y recevoir la Côte d’Ivoire au match retour et de maximiser leurs chances de qualification plutôt que de squatter les stades à l’étranger.

Osons le dire, les « Lions » du Sénégal ne méritent pas de se qualifier à la Coupe du monde.

Il faut se rendre à l’évidence, faire preuve d’un surcroît d’humilité et continuer à travailler, sérieusement, en s’inscrivant dans la durée et non dans la logique de campagnes car le football sénégalais ne va pas s’arrêter avec cet échec.

 

Pape SAMB

papeaasamb@gmail.com

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