La lettre de Transparency international à l'UA

À l’occasion de cette 6e Journée africaine de lutte contre la corruption, Transparency International, à travers ses 28 sections des communautés économiques régionales de l’Afrique, s'est adressée aux dirigeants de l'Union africaine.
C'est par des félicitations à l'endroit de l'UA que Transparency International (TI) ouvre sa missive. Cet hommage s'explique par le fait que l'entité continentale a désigné le "11 juillet comme Journée africaine de la lutte contre la corruption''. Le thème de cette année, "Stratégies et mécanismes pour la gestion transparente des fonds Covid-19’’, est aussi magnifié. Car, reconnaît Transparency, la pandémie a considérablement "perturbé les moyens de subsistance des citoyens africains, entravé la circulation des personnes et révélé les inégalités d’accès aux biens et services essentiels, y compris les soins de santé et la nourriture'’.
En outre, renseigne l’ONG, trois États membres de l’UA ont récemment ratifié la Convention de l’Union africaine sur la prévention et la lutte contre la corruption (CUAPLC). Ils rejoignent ainsi les 44 pays déjà signataires. Dans cette foulée, une invite aux huit autres États, encore non-signataires, a été formulée, afin de prendre des mesures pour "ratifier et domestiquer" cette importante convention.
En effet, ‘’la CUAPLC fournit une feuille de route audacieuse et robuste pour la mise en œuvre des efforts de lutte contre la corruption et renforce les engagements pris par les États membres de l’UA en faveur de la démocratie, des Droits de l’homme et de l’État de droit, ainsi que des valeurs sous-jacentes de transparence, d’intégrité, de participation et de redevabilité’’, souligne-t-on.
Dans un autre registre, Transparency International félicite les 36 États membres de l’UA qui "ont ratifié la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance". Là aussi, il exhorte les 19 États membres restants à prendre rapidement des mesures pour adopter cet "important traité africain".
Accentuer la lutte contre la corruption
L’ONG fait aussi part de sa préoccupation face à cette menace qu'est la corruption. Entre autres, "elle entrave la vie, la jouissance des Droits de l’homme, la démocratie et les institutions démocratiques, et constitue un obstacle important pour les États africains dans la réalisation de l’Agenda 2063 et des Objectifs de développement durable", mentionne-t-elle dans la missive.
De ce fait, elle se joint aussi à l’UA pour appeler à des réformes de l’architecture financière mondiale et reconnaître ainsi la création du Sous-Comité sur les questions fiscales et les flux financiers illicites (FFI), dans le but de renforcer la mobilisation des ressources et de réduire les pertes et le gaspillage sur le continent, ainsi que de réduire la dépendance vis-à-vis des "prêts abusifs externes" qui ont "alourdi le fardeau de la dette sur le continent".
Toujours dans ce dessein d'endiguer la corruption, elle invite l’UA à accélérer "l’achèvement, le déploiement et la mise en œuvre de la stratégie sur les questions fiscales et les FFI". La stratégie en cours d’élaboration "positionnera efficacement le continent pour initier des réformes mondiales sur une convention fiscale inclusive et augmenter les ressources disponibles dans une ère post-pandémie".
Une publication des délais pour l’établissement de registres publics, sous forme de données ouvertes contenant des informations sur les bénéficiaires effectifs, est aussi considérée comme une arme efficace contre le fléau.
Par ailleurs, les entreprises étrangères opérant en Afrique sont aussi appelées à mettre la main à la pâte. Transparency attend d'elles qu'elles enregistrent et divulguent leurs "bénéficiaires effectifs". Dans cette même veine, les soumissionnaires pour les marchés publics sont invités à soumissionner à des "procédures de diligence raisonnable", afin de vérifier les "antécédents de la société et de ses cadres supérieurs, actionnaires majoritaires et bénéficiaires effectifs ultimes, ainsi que de divulguer l’identité des bénéficiaires effectifs".
In fine, TI invite à veiller à ce qu’il existe des "sanctions appropriées proportionnées" à l’inconduite, pour les personnes reconnues coupables d’avoir enfreint ces lois et les lois connexes.
Ainsi, pour lutter efficacement contre la corruption, Transparency appelle à miser dans "la fourniture de services de base, en particulier le logement, l’eau, l’assainissement, l’éducation, la santé, les réponses aux crises humanitaires et les systèmes judiciaires". Car la corruption dans la fourniture de services de base a tendance à toucher principalement les citoyens les plus pauvres qui dépendent de ces services publics et désavantage les personnes vivant avec handicap, les femmes et les enfants en particulier.
Il en est de même de la corruption dans l’administration foncière qui exacerbe les inégalités, en violant les droits fondamentaux des communautés locales, en particulier des groupes vulnérables.
MAMADOU DIOP (STAGIAIRE)