Publié le 5 Feb 2019 - 02:13
MOMAR NDAO, ASCOSEN

‘’Les populations doivent dire non’’

 

Les prix de certaines denrées sont toujours en variation. Si les consommateurs se plaignent, le président de l’Association des consommateurs du Sénégal (Ascosen) Momar Ndao, lui, situe les responsabilités.

 

Comment expliquer cette variation de prix, d’un endroit à un autre ?

Malheureusement, lorsque les frontières sont fermées, afin de promouvoir la commercialisation des produits locaux, les commerçants en profitent pour multiplier les spéculations et c’est vraiment dommage. Ils augmentent tout sans raison valable. L’huile, par exemple, qui est un produit administré, coûte 900 F Cfa le litre. Un prix qui, pourtant, n’est pas respecté par tous.

Il y a quelques jours, on a eu écho d’une possible augmentation du prix du pain. Etait-ce une rumeur ?

Non. Effectivement, les boulangers voulaient augmenter le prix du pain. Ils nous ont dit vouloir proposer un pain plus consistant. Toutefois, nous n’en avons pas voulu, puisqu’il y a trois ans, ils nous avaient fait croire la même chose. Les boulangers ont proposé un pain à 200 F Cfa, en disant que ce serait juste une alternative pour ceux qui voulaient un pain plus lourd et riche.

Cependant, sur le terrain, ils ont tout bonnement supprimé les pains de 150 F Cfa. A chaque consommateur, ils disaient que le stock de ce pain était épuisé. Vous vous rendez compte de la stratégie ? Rappelons aussi qu’aucun des éléments entrant dans la confection du pain n’a augmenté. Lorsque le prix du pain a été fixé à 150 F Cfa, le sac de farine coûtait 18 000 F Cfa. Aujourd’hui, il coûte 16 200 F Cfa, l’électricité était plus cher, à un taux de 10 % ; ce n’est plus le cas. Pourtant, il n’y a aucune répercussion sur le prix du pain. C’est anormal, surtout que le poids normal n’est même pas respecté. Ils nous vendent un pain de 175 g, quand la norme est de 190 g. Pour toutes ces raisons, nous nous sommes carrément opposés à toute hausse du prix du pain.

En tant qu’association de consommateurs, quel rôle jouez-vous dans la régulation des prix des denrées de première nécessité ?

Nous siégeons à la commission en charge de la fixation de ces prix. C’est au conseil d’administration d’accorder ou pas une augmentation et, à notre niveau, grâce au conseil de la consommation, nous nous opposons tout simplement lors d’échanges avec les commerçants. Surtout quand les raisons qu’ils évoquent ne sont pas valables.

Existe-t-il des agents de terrain capables de mettre fin à ces spéculations ?

Tout à fait, il y en a, mais en nombre réduit. Ce sont des agents de la Direction du commerce intérieur. Ces derniers recensent les commerçants qui ne respectent pas les prix normaux et les verbalisent. Les sanctions qui suivent vont de la saisie des marchandises au paiement d’une amende.

Peut-on dire que les populations ont une part de responsabilité dans cette affaire ?

Evidemment. Lorsqu’elles subissent sans dénoncer, elles sont aussi responsables. Elles doivent dire non. Vous allez dans un quartier trouver, par exemple, un vendeur qui fait ce qu’il veut sans que personne ne bronche. C’est justement parce que la plupart du temps, il fait des prêts, accorde des crédits à beaucoup. Ainsi, de peur de perdre ces avantages, les consommateurs n’osent le dénoncer. Le service régional du commerce est là pour cela. Les populations peuvent signaler tout abus au 33 821 12 18.

Quel appel lancez-vous à l’Etat du Sénégal, afin de réguler ce secteur ?

Tout d’abord, il doit refuser toute augmentation du prix des denrées, tant que les raisons ne sont pas fondées. Aussi, l’Etat doit veiller à lutter contre toute spéculation, en assurant une bonne coordination entre la demande nationale et les stocks disponibles. Dans le cas de l’oignon et la pomme de terre, il faut ouvrir les frontières et permettre une importation, quand la demande est forte.

EMMANUELLA MARAME FAYE

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