Publié le 11 May 2023 - 22:24
UNION EUROPÉENNE

Micmac sur un marché de 94 millions F CFA

 

Malgré tout le discours de l’UE sur la transparence, la promotion des PME africaines, certains de ses partenaires européens se permettent de faire travailler des entreprises sur le continent sans les payer. C’est le cas de l’Agence internationale de communication MC Group. Après avoir sous-traité un marché de 94 millions F CFA à l’entreprise sénégalaise ACC (Agence de conseil et de communication), la société allemande refuse tout simplement de payer, alors qu’elle a été totalement payée par la représentation de l’UE.

 

On parle souvent de l’ultra-domination économique des États développés sur les pays en développement, africains en particulier. Moins de celle qui est exercée sur les petites entreprises africaines par certaines multinationales étrangères. Dans certaines situations, il est difficile pour ces PME africaines de se relever. C’est le cas de l’entreprise sénégalaise ACC (Africaine de conseil et de communication).

Il y a quelques mois, l’entreprise était très contente de remporter, avec son partenaire allemand l’agence internationale de communication MC Group,  un marché de l’Union européenne d’un montant de 94 millions F CFA. Avec enthousiasme, elle a exécuté ledit marché conformément au cahier des charges. A sa grande surprise, renseigne une source proche de la boite, la multinationale allemande qui lui avait sous-traité le marché et qui a été totalement payée par l’UE, refuse de passer à la caisse.

‘’ACC a tout essayé, tout fait pour entrer dans ses fonds, mais MC Group ne répond même pas. Aujourd’hui, elle est empêtrée dans de grosses difficultés à cause de cette affaire, parce qu’elle y avait engagé des dépenses très importantes… Elle travaillait sur fonds propres’’.

Aux origines de cette affaire, il y a un marché lancé par la représentation de l’Union européenne au Sénégal. Consciente de ses limites, MC Group s’approche de son homologue sénégalais ACC dont la notoriété n’est plus à démontrer. Le duo a ainsi postulé et remporté haut la main le juteux marché de 94 millions F CFA. Selon les termes du partenariat, l’entreprise sénégalaise devait se charger de l’exécution du marché au nom de la multinationale allemande, moyennant des honoraires. Ce qui a été fait dans les règles de l’art.

‘’L’Union européenne a reconnu qu’ACC a fait tout ce qu’elle avait à faire. Elle a essayé d’appuyer pour que l’entreprise soit payée, mais il n’y a pas eu de suite. Vous vous en rendez compte ! Ils ont travaillé pendant plus de deux ans gratuitement. Non seulement il y a leurs honoraires, mais il y a tous les frais qu’ils ont dépensés et qui n’ont pas été remboursés. Dans un premier temps, les dirigeants de MC Group usaient du dilatoire pour ne pas payer, mais depuis quelque temps, ils ne répondent même plus aux mails. Ils sont vraiment désemparés’’, confie la source.

Le silence gênant de l’UE

Malgré ses efforts au début, certains s’interrogent sur le laxisme de la représentation européenne. En effet, nonobstant son comportement inqualifiable sur un marché de l’Union européenne, MC Group continue de gagner des marchés de la structure, un peu partout dans le monde, notamment en Turquie, en Argentine et même au Sénégal, sous le silence complice de Bruxelles. Nos interlocuteurs de se demander qui les protège. ‘’L’Union européenne n’est pas n’importe quelle structure. Quand elle travaille avec une entreprise, elle doit s’assurer qu’elle respecte un certain nombre d’exigences. On se demande vraiment comment une entreprise qui se comporte de la sorte, qui fait travailler des gens et qui ne les paie pas, puisse continuer à remporter des marchés européens. Ce n’est pas normal. D’autant plus que ses actes engagent la responsabilité de l’UE. Ceci est aux antipodes des standards et valeurs que promeut l’Union européenne’’.

En fait, si elle ne s’empresse pas de payer, c’est parce que la multinationale sait parfaitement que les risques sur le plan financier sont moindres.

C’est le tribunal de Berlin qui est compétent dans cette affaire

En effet, pour connaitre de ce litige, les clauses du contrat prévoient que c’est le tribunal de Berlin qui est compétent. Une erreur à ne pas commettre, conseille ce membre du patronat sénégalais. ‘’Pour quelqu’un exécute un contrat, il faut qu’il sache qu’il peut être contraint. Quand votre contractant sait que juridiquement il ne court pas de risque, eh bien il n’a pas grand-chose à perdre. En ce qui concerne ces multinationales, la plupart du temps, si vous allez dans leur pays, il est difficile de s’imposer’’, fulmine le membre du patronat.

Pour lui, ceci est loin d’être un fait isolé et que les PME de nos pays qui contractent avec ces grandes entreprises ont intérêt à s’entourer de toutes les garanties. ‘’Cela nous est arrivé une fois avec une entreprise espagnole. Nous sommes allés les chercher pour postuler à un marché. En retour, nous devions avoir la sous-traitance, mais ils ont voulu nous remplacer avec une autre entreprise. Heureusement, nous avions un bon contrat fait avec un grand cabinet sénégalais. Ils avaient voulu nous imposer le tribunal de leur pays, mais notre avocat avait dit niet. On avait mis une clause d’arbitrage et désigné le tribunal arbitral de Paris comme compétent. Le problème avec ces pays, on n’a pas les mêmes règles. On part donc avec un désavantage. Non seulement ils ont plus de moyens, mais ils ont aussi l’avantage de connaitre mieux leur droit’’.

 

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