‘’Daaray Kamil’’, la bibliothèque de Touba, reste populaire par son nom. Mais son contenu est ignoré par les fidèles, du fait de son nom. Beaucoup pensent que c’est juste un lieu où sont gardés des exemplaires du Coran. Les responsables veulent lever cette équivoque, en vulgarisant davantage son contenu, notamment à travers les technologies modernes.

‘’Daaray Kamil’’ (la maison du Coran), située à 50 mètres de l’Est de la grande mosquée de Touba, n’échappe pas à la ferveur des pèlerins du grand Magal, édition 2017.  Des centaines de fidèles, séparée en deux longues files d’attente, se dirigent lentement vers cet édifice de couleur beige pour effectuer leur traditionnel ziar (prières). Ce bâtiment dont la devanture comporte des écritures en langue arabe abrite à la fois une bibliothèque dédiée au Livre Sacré de la religion musulmane et le mausolée de Serigne Abdou Lahat Mbacké. Ce fils de Serigne Touba, devenu troisième khalife général des Mourides (1968-1988), a été inhumé à l’intérieur de ce temple du savoir qu’il a avait érigé en 1977. C’est ce qui explique d’ailleurs la présence de ces nombreux fidèles sur les lieux.  La plupart d’entre eux sont là pour se recueillir devant la tombe du successeur de Serigne Fallou Mbacké à la tête de la confrérie mouride. 

Awa Fall est originaire de la ville de Thiès.  La jeune fille, habillée en grand boubou jaune, chapelet à la main, vient de sortir des lieux. ‘’J’effectue un passage chaque année ici devant la tombe de cet élu de Dieu. Je demande maintenant que mes prières soient exaucées par le Seigneur’’, se confie-t-elle. Les salles de la bibliothèque sont fermées le temps du Magal pour des raisons de sécurité. Mais, explique le secrétaire général de l’institution, l’administration a organisé à l’esplanade une exposition sur la vie et l’œuvre de Cheikh Ahmadou Bamba afin de permettre aux fidèles de se ressourcer sur les écrits de cet homme. Les va-et-vient des pèlerins continuent sous la supervision des policiers pointés devant les portes d’entrée et de sortie. 

Serigne Abdou Lahat Mbacké avait créé cet institut dans le but de conserver les écrits de son père. Mais selon le secrétaire Ousseynou Diattara, cet établissement est aujourd’hui méconnu à cause de son appellation ‘’Daaray Kamil’’. ‘’Quand on parle de Daaray Kamil, les gens pensent immédiatement qu’il n’y a que des livres de Coran. Cela empêche beaucoup de personnes de venir visiter ce lieu. On y trouve d’autres documents relatifs au droit islamique, des khassaïdes etc., des livres sur la théologie, le fiq (pratique), le Tawhid (Unicité de Dieu), le Nahwu (grammaire) etc. », précise-t-il.

Vulgarisation de son contenu à travers les TIC

Ce temple du savoir est divisé en cinq appartements. Le premier est réservé aux livres coraniques provenant de l’Arabie Saoudite et de l’Egypte. On y trouve également des exemplaires du Coran écrit par des fils, petits-fils ou fidèles de Cheikh Ahmadou Bamba renseigne Oussseynou Diattara. Le deuxième bloc sert de lieu de garde aux khassaïdes (poèmes). ‘’Il y a plusieurs recueils de ses poèmes gardés dans cet appartement comme Fulkul Mashune et d’autres qui ne sont pas encore mis à la disposition des fidèles’’, confie notre interlocuteur.

La troisième salle est dédiée à la culture générale. Dans cet appartement, des livres de tout genre y sont gardés et bien rangés. Il y en a des Bibles traduites en arabe et en français. Cette partie de la bibliothèque permet aux chercheurs sénégalais et étrangers de trouver de la documentation pour leurs mémoires ou thèses dans les branches du soufisme, de la culture islamique, l’économie, l’agriculture, l’agronomie, le droit islamique etc. Le quatrième compartiment contient des correspondances et témoignages de fidèles et des agents de l’administration coloniale, envoyés à Serigne Touba. Les lettres des autres figures religieuses des autres confréries comme la Tidjania, la Khadria sont aussi gardées dans ce bâtiment. La cinquième partie est aménagée pour les conférences et la lecture du Saint Coran. Toutes les conférences, surtout celles tenues pendant le mois de ramadan, sont organisées dans cette grande salle. A chaque ramadan, à longueur de journée, des causeries religieuses sont organisées dans la salle.

L’administration de la bibliothèque de Touba ou ‘’Daaray Kamil’’ ambitionne, sous l’égide de Serigne Moustapha Diattara, de vulgariser son contenu à travers les technologies de l’information et de la communication (TIC.) Pour cela, elle a numérisé les fichiers, installé un site internet pour la conception des recueils des documents permettant aux chercheurs arabisants de pouvoir consulter et lire les livres à distance.  Mais ce bloc du savoir dédié au Livre Saint de la religion musulmane a un autre défi. Celui de lever l’équivoque attachée à son nom ‘’Daaray Kamil’’, pour permettre aux fidèles et chercheurs de découvrir son riche contenu.   

OUMAR BAYO BA (TOUBA)